• La fierté blessée- De l’exclusion des citoyens dans les démocraties



    Peter Sloterdijk

    Traduit par  Michèle Mialane
    Edité par  Fausto Giudice

     1.La fierté blessée

    Dès que politiciens et politologues réfléchissent à ce qu’est devenue la moderne « res publica », les réminiscences de la Rome antique se pressent en foule. C’est arrivé récemment à notre malheureux ministre allemand des Affaires étrangères qui, souhaitant critiquer l’État-Providence, trop généreux à ses yeux, s’est avisé de comparer l’époque actuelle avec la décadence de l’Empire romain. Ce qu’il entendait par là n’a pu être tiré au clair. Peut-être l’invité, chef de la diplomatie allemande, s’était-il vaguement souvenu du management de la plèbe par les combats de gladiateurs, usité au temps des empereurs romains, peut-être aussi des distributions obligatoires de blé aux masses sans emploi de la métropole antique. L’un et l’autre auraient été un écho de l’enseignement historique bâclé dont ont joui la plupart des lycéens de la classe 1961 (Westerwelle notamment). Rien de bien grave en tout cas.
     
    Mais l’allusion à la décadence romaine, dans la bouche d’un homme politique allemand, n’était pas seulement le signe du vernis culturel un peu mince qui sied à leur office. Et pas davantage un débordement verbal visant à rallier une certaine clientèle. Elle comportait aussi toute une série d’implications périlleuses dont l’orateur se serait sûrement gardé s’il en avait été conscient.
     
    Le système romain du « pain et des jeux » n’était en effet rien de moins que la première forme de ce qu’on nomme depuis le siècle dernier « culture de masse ». Il symbolisait le passage de l’austère République sénatoriale à l’État-spectacle post-républicain centré sur un empereur-acteur. Ce changement était devenu inévitable depuis que l’Empire romain, après s’être converti au césarisme, tendait de plus à plus à éliminer le peuple et le Sénat des affaires publiques. Vue sous cet angle, la décadence romaine n’était rien d’autre que le revers de l’exclusion politique des citoyens : tandis que l’administration de l’Empire s’empêtrait progressivement dans le formalisme, les divertissements - notamment dans les arènes disséminées sur les rivages d la Méditerranée et les orgies des couches supérieures en métropole - se faisaient de plus en plus bestiaux et débridés. La coexistence de l’État administratif et de l’État-divertissement constituait la réponse à un état du monde où seule la dépolitisation massive des populations de l’Empire permettait d’exercer le pouvoir.

    Du SPQR à la néomonarchie

    Jouer avec de réminiscences romaines revient tôt ou tard à jouer avec le feu. Qui dit Rome dit aussi res publica, et quiconque en parle ne devrait pas manquer de s’interroger sur le secret de ses origines. Même si les César continuaient à apposer sur leurs décrets la formule consacrée « Le Sénat  et le Peuple romain » (SPQR), il n’en reste pas moins que ces deux instances ne détenaient pratiquement plus aucun pouvoir.


    Giulio Romano, Tarquin et Lucrèce, fresque du palais ducal de Mantoue (Italie), voûte du Camerino dei Falconi, 1536.

     La « chose publique » de l’Europe antique a commencé par un mémorable déchaînement d’affectivité : le fils du dernier roi romain étrusque, Tarquin le Jeune, s’était avisé des charmes d’une jeune matrone romaine, Lucrèce, après avoir entendu le mari de celle-ci, Collatinus, vanter sa beauté et sa vertu. De toute évidence il n’admettait pas qu’un inférieur puisse être plus heureux que lui sur le plan érotique. Nous tenons le reste de l’Histoire universelle de Tite-Live et de l’écrivain universel qu’est Shakespeare : le jeune Tarquin s’introduit dans la demeure de Lucrèce et au moyen d’un chantage la contraint à se laisser violer. La jeune femme, ainsi déshonorée, convoque toute sa famille, lui raconte ce qui s’est passé et se poignarde sous leurs yeux. Les Romains, jusque-là paisible peuple de bergers et de cultivateurs, se transforme sous le coup de l’émotion en une bande révolutionnaire. On chasse Tarquin le Superbe, ce qui met fin définitivement à la domination étrusque. Plus jamais on ne tolérera d’arrogants à la tête de la chose publique Le nom même de roi est banni pour la suite des temps.
     
    Cette « convulsion » citoyenne donnera naissance à une idée lourde de conséquences : la gestion de la chose publique sera désormais assumée uniquement par les Romains, de manière pragmatique et profane. Deux consuls se tiennent mutuellement en échec, réélus chaque année pour éviter toute confusion entre la personne et la charge. Ces décisions prises en 509 avant J.C. enclenchent la machine républicaine la mieux construite de toute l’histoire ; l’ajout postérieur de la charge de tribun de la plèbe lui confèrera une efficience insurpassable. C’est le début d’une « success story » sans égale qui durera près d’un demi-siècle, jusqu’à ce que le complexe de domination romain s’étende excessivement, contraignant Rome à passer à la situation néomonarchique.
     
    La légende de Lucrèce fait naître la « res publica » de l’esprit de révolte. Ce que l’on appellera plus tard « l’opinion publique » est au début un simple épiphénomène de la colère populaire. C’est le mécontentement d’une foule rassemblée qui donne naissance au premier forum. Le premier ordre du jour ne comportait qu’un point : le rejet d’une infamie commise par le souverain. C’est leur colère synchrone contre l’arrogance sans bornes des puissants qui a appris aux petites gens qu’ils voulaient désormais être des citoyens. Le consensus par lequel a commencé tout ce que nous appelons aujourd’hui « vie publique » a été l’unanimité de la société civile contre un affront infligé aux lois non écrites de la pudeur et du cœur.


    Lucrèce allemande du XXIème siècle (Manifestation contre les transports Castor, novembre 2010)

    2.Monologue d’un club d’autistes

    Pour en revenir au point décisif : ce que nous désignons par le mot grec de « politique »  est un dérivé du sens de l’honneur et des sentiments de fierté de gens ordinaires. Pour l’éventail des affects liés à la notion de fierté la tradition de l’Europe antique dispose du mot de « thumos ». L’échelle du « thumos » recouvre de nombreuses nuances du psychisme humain - depuis la jovialité, la bienveillance et la générosité jusqu’à l’indignation, la colère, le ressentiment, la haine et le mépris en passant par la fierté, l’ambition et le défi. Tant qu’une communauté politique est sous l’empire de sa fierté, c’est sur l’honneur et la respectabilité que se focalise l’attention générale. La dignité du citoyen doit rester intacte, c’est elle le bien suprême. L’opinion publique veille jalousement à ne jamais laisser l’arrogance et l’avidité, ces deux principaux visagesde la bassesse, toujours virulentes, prendre le pouvoir dans la « res publica ».
     
    Les raisons pour lesquelles il n’est pas sans danger de parler de nos jours de la décadence romaine et de lui assimiler des situations contemporaines devraient être claires. En parlant ainsi on se rallie implicitement à l’idée - ou à la crainte- que la république moderne - issue il y a plus de 200 ans de la colère des révolutionnaires américains ou français contre la monarchie, soit un jour ou l’autre suivie d’une phase post-républicaine. Elle serait très précisément caractérisée par le nouveau compagnonnage du « pain et des jeux » ou, pour employer un vocabulaire contemporain, par une synergie entre l’État-Providence et le sensationnalisme industriel.
     
    On ne peut nier qu’il existe partout des signes avant-coureurs de cette gestion bicéphale. Ne relevons-nous pas depuis assez longtemps déjà des indices d’une régression de la vie publique vers l’administratif et le spectaculaire – isolation thermique pour les ministères et casting shows pour les ambitieux ? Le discours sur la « post-démocratie », né en Grande-Bretagne et visant à expliquer que la participation des citoyens aux affaires de la cité peut être avantageusement remplacée par la compétence de décideurs politiques de haut vol, n’a -t-il pas discrètement envahi les centrales des partis et les séminaires de sociologie de l’hémisphère occidental ? D’innombrables individus ne se sont-ils pas retirés du monde, à l’instar des stoïciens et des épicuriens de jadis, s’accommodant de voir la bureaucratie, la société du spectacle et les collections privées  représenter désormais les seuls horizons envisageables?
     
    On pourrait tirer de ces observations la conclusion hâtive que les tendances post-démocratiques s’étaient déjà totalement imposées durant le crépuscule de la seconde ère républicaine, celle que nous nommons la modernité. Il ne nous resterait plus alors, à nous qui habitons la deuxième « res publica amissa » (la chose publique abandonnée) qu’à attendre une deuxième fois les César et leur version bon marché, le populisme, dans la mesure où ce populisme apporte aujourd’hui la preuve que le césarisme peut aussi fonctionner avec des comparses. Devrait-on donc se rallier à Oswald Spengler et à sa dangereuse suggestion : qu’il faut être un théoricien de la décadence pour être capable de lire les signes des temps ?

    On n’a pas tenu compte de la fierté des citoyens

    Nous serons toutefois mieux avisés de ne pas nous laisser entraîner, en cette affaire, par les analogies. Certes les signes ne manquent pas qui nous prédisent l’imminenced’une situation post-républicaine et post-démocratique. Le symptôme le plus net, l’exclusion des citoyens par un pouvoir d’État fonctionnant en circuit fermé est largement perceptible. Dans notre pays la politique ressemble de plus en plus au monologue d’un club d’autistes ; la ligne actuelle du gouvernement jaune-noir [chrétiens-démocrates et libéraux, Ndlt] en matière d’énergie nucléaire le montre bien.
     
    Mais celui qui aurait cru qu’il ne serait pas plus difficile de déconnecter les citoyens dans la deuxième époque post-républicaine que lors de l’établissement du régime césarien se serait trompé. Car les auteurs grecs classiques avaient de l’homme - être à la fois érotique et fier - une connaissance incomparablement plus profonde que nos modernes, qui se sont majoritairement contentés de croire que l’être humain n’était guidé que par la libido, le manque et la soif de posséder. Ils n’ont rien inventé de neuf en matière de fierté et d’honneur depuis plus de cent ans. Rien d’étonnant donc si les politiciens et psychologues actuels sont désemparés face aux manifestations publiques de tout ce qui, dans l’économie du psychisme humain, ressort à des sentiments de fierté aujourd’hui oubliés. Le panorama des troubles politiques en Europe, et en particulier les foyers de crise allemands, devrait nous montrer clairement une chose : si l’on ne réussit pas tout à fait à déconnecter les citoyens, en dépit du règne des experts et de la culture du divertissement, c’est qu’on a tout simplement négligé la fierté du citoyen de base.
     
    Voilà que tout à coup ils refont surface, le citoyen et son « thumos », le citoyen conscient, informé, qui veut réfléchir et décider avec les autres, homme et femme, qui porte devant le tribunal de l’opinion sa déception de voir ses préoccupations et ses prises de conscience si mal représentéespar le système politique actuel. Le revoilà, le citoyen de base, qui a gardé sa capacité d’indignation, parce qu’en dépit de tous les efforts pour le réduire à un blocde libido, il a continué à pouvoir être lui-même, et il le manifeste en portant sa dissidence sur la place publique. Ce citoyen malcommode se refuse à tout gober politiquement, à être docile et à s’abstenir d’opinions « qui ne font pas avancer le schmilblick». Ces citoyens informés et indignés ont tout à coup eu - comment ? on n’en sait rien - l’idée saugrenue de s’appliquer à eux-mêmes l’article 20, paragraphe 2 de la Loi fondamentale [Constitution allemande, Ndlt] en vertu duquel le pouvoir de l’État n’émane que du peuple. Que lui est-il arrivé, lorsqu’il a compris ce mot mystérieux « émaner » comme une injonction à sortir de ses quatre murs pour proclamer ce qu’il veut, sait, et redoute ?
     


    "Stuttgart brûle et "Néron" fait des grandes phrases. Dehors, Mappus !" (Mappus est le président de la région du Bade-Wurtemberg, grand artisan du projet S21)

     

    3.La régulation psychopolitique des affaires publiques part à la dérive

    À la source du goût des Romains pour les affaires de la cité se trouve le refus de tolérer plus longtemps l’arrogance devenue trop évidente des puissants. Même si cette morgue est devenue anonyme et se dissimule dans des systèmes contraintes pratiques - il arrive aux citoyens, notamment en tant que contribuables et récepteurs de discours creux en période électorale, de voir assez clairement à quel jeu on joue avec eux Mais pourquoi d’un seul coup les gens ne peuvent-ils pas rester à la place qu’on leur a assignée ? Pourquoi ne peut-on plus se fier à la léthargie inhérente au système ? En démocratie représentative, les citoyens servent surtout à légitimer les gouvernements C’est pourquoi on les invite, à des intervalles assez larges, à exercer leur droit de vote. Entre temps c’est surtout en restant passifs qu’ils se rendent utiles. Leur tâche la plus louableconsiste à exprimer par leur silence leur confiance dans le système
     
    Restons polis et disons seulement que cette confiance se fait rare. Même les politologues à la botte de Berlin parlent de la désunionmanifeste entre la classe politique et la population. Les experts hésitent toutefois encore à porter le pénible diagnostic : la nécessaire dépolitisation du peuple est en passe d’échouer.
     
    Les Romains de l’époque césarienne ont réussi à dépolitiser leurs contemporains parce que les élites de l’époque ont longtemps su proposer aux citoyens des ersatz à peu près satisfaisants, en dépit de signes manifestes de décadence post-républicaine. Elles s’entendaient fort bien à rendre le « civis romanus » (citoyen romain) fier des succès de l’Empire à apporter sa civilisation; elles reliaient les peuples de la périphérie au centre romain en exerçant un soft power (“douce tyrannie”) ; elles ont eu l’intelligence de faire participer les masses urbaines à la mise en scène narcissique du culte dû à l’empereur. Comparée à elles, la maladresse de notre classe politique à satisfaire toutes les exigences du « thumos » saute aux yeux.
     
    Souvent elle n’a rien d’autre à offrir aux citoyens que la participation à sa propre misère - une offre qui n’intéresse en générale ces derniers qu’en période de Carnaval ou lors des Mercredi des Cendres politiques [tradition politique allemande d’origine bavaroise consistant en des meetings arrosés de bière où les politiciens se livrent à des attaques virulentes contre leurs adversaires, NdE]. Si l’on demande aux sondeurs d’opinion quelle est la réaction la plus répandue aux performances des gouvernants, la réponse la plus fréquente est depuis quelque temps : le mépris. Inutile d’ajouter qu’une telle réponse se range dans le vocabulaire d’analyse du « thumos ». Si le degré inférieur dans l’échelle des sentiments de fierté est, de nos jours, cité avec autant de fréquence et de virulence, cela devrait montrer à quel point la régulation psychopolitique des affaires publiques part à la dérive.

    Profession : Exclure les citoyens des affaires publiques

    Le rêve des systèmes engendre des monstres [paraphrase de la maxime de Goya : “Le sommeil de la raison engendre des monstres”, NdE]. Nos gouvernants en font l’expérience dès que des citoyens mécontents s’opposent à leurs projets et à leurs procédures. Rien de surprenant à ce qu’on réponde au mépris par le mépris. Contre l’inopportune dissidence citoyenne, à Stuttgart et Berlin, le pouvoir effrayé a déployé massivement la police et choisi l’injure. C’est donc ça, ce quelque chose obscur, d’où émane tout pouvoir d’État ? «  Des contestataires de profession, des anarchistes du dimanche, des démocrates de l’affect, de vieux égoïstes, des enfants gâtés de la prospérité ! »
     
    Voilà ce qu’inspirèrent au gouvernement du land et à ses alliés berlinois les dizaines de milliers de gens descendus dans la rue pour protester contre un mégaprojet en pleine bérézina Doit-on excuser ce vocabulaire en invoquant l’état de choc où se trouvaient ceux qui l’employaient ? Bien au contraire : remercions ces politiques d’avoir enfin dit ce qu’ils pensaient des citoyens. Notons qu’une part importante de la presse, y compris des titres sérieux, comprenait très bien la classe politique malmenée :  “Citoyens enragés” - tel est le nom récemment donné aux nouveaux contestataires - ce qui aurait été une bonne chose, s’il avait rappelé le lien originel entre république et colère. Malheureusement, de nos jours, il ne peut servir qu’à chasser les importunes mouches dissidentes. Quoi qu’il en soit : bien des journalistes savent comment contribuer à exclure les citoyens des affaires publiques.
     
    Matraques et gaz lacrymogènes, telle fut la réponse d’une caste affolée à un peuple qui lui opposait résolument des arguments, ayant découvert des faillesdans le projet de la nouvelle gare de Stuttgart. Engager une procédure d’exclusion : telle fut la réaction du vieux et respectable SPD à l’encontre d’un membre réputé coriace, et qui, preuves détaillées à l’appui, avait pointé ce qui n’allait pas dans la politique d’immigration allemande- en présentant des faits plus solides en l’absence de justifications d’ordre génétique qu’en en cherchant. Les deux fois, il paraît que les décisions indispensables - cogner, exclure - n’avaient pas été faciles à prendre. Profession : chasser le citoyen des affaires publiques- c’est quelquefois plus dur encore que de percer des trous dans du bois dur.
     
    Les mêmes réflexes d’enfermement dans son bunker pour ne pas être dérangé dans sa routine, le même malaise lorsque d’aucuns prennent la parole sans y avoir été invités, la même confusion entre constipation et force de caractère sont désormais monnaie courante.
     
    Seule une analyse plus fine du système politique et de ses paradoxes peut dépasser l’absence de réactivité à laquelle nous sommes parvenus : les César ont réussi, apparemment en se jouant, à exclure les citoyens des affaires publiques tout en satisfaisant leurs aspirations. La démocratie représentative moderne en est incapable. Les modernes n’ont donc plus que deux solutions, l’une ruineuse sur le plan économique, l’autre hasardeuse au niveau psychopolitique : payer les citoyens pour se taire ou les paralyser en leur ôtant tout espoir. Le fonctionnement de la première est connu de tous ceux qui suivent les débats actuels autour de l’État pourvoyeur de subsides [en all. Alimentenstaat, un néologisme à partir de Alimente, pension alimentaire, NdE]. On sait aussi comment mettre la deuxième en œuvre. Elle ressemble à première vue à la satisfaction de citoyens bien gouvernés. Mais elle s’en distingue par un sentiment de rancœur impuissante : l’analyse politique se résume alors au “tous pourris”. Un tel climat peut faire tomber la participation électorale au-dessous des 50%, comme c’est d’ordinaire le cas aux USA, sans que la classe politique y voie une raison de s’inquiéter.


    Felice Ficherelli (1605 - 1660), Tarquinius et Lucretia

    4 .Aucun gouvernement au monde n’est à l’abri de la colère de ses citoyens

    Exclure les citoyens des affaires en les décourageant, c’est jouer avec le feu, car ce découragement peut à chaque instant se muer en son contraire, l’indignation ouverte et la colère manifeste. Et une fois que la colère a trouvé son objet, il est difficile de l’en détourner. La forme moderne de l’exclusion veut présenter celle-ci comme une “participation”. La dépolitisation des citoyens doit s’accompagner de la quantité de politisation nécessaire à l’autoreproduction de l’appareil politique.
     
    Nulle part les citoyens de notre hémisphère ne sont davantage exclus que dans le domaine de la fiscalité. L’État moderne a réussi à assigner à ses membres un maximum de passivité lors de leur contribution la plus matérielle aux affaires communes : quand ils passent à la caisse. Au lieu de souligner avec le respect qui leur est dû la qualité de donateurs des payeurs et le caractère de don des impôts, les États modernes accablent leurs contribuables sous le poids d’une déshonorante fiction : ceux-ci auraient d’énormes dettes envers les caisses publiques, des dettes si élevées qu’ils devraient passer leur vie à les rembourser par des paiements réguliers. On fait désormais peser sur eux une dette collective que demain et jusqu’à leur dernier souffle ils devront rembourser, et que leur imposent ceux-là mêmes qui les excluent aujourd’hui des affaires. Qu’on ne dise plus que la politique actuelle n’a plus de perspectives. Il nous reste encore une utopie : si la chance est de notre côté, et si tout le monde fait tout ce qu’il peut, nous accomplirons même l’impossible : éviter la faillite de l’État. C’est elle désormais l’étoile rouge au couchant de notre démocratie.

    La plupart des États spéculent sur la passivité de leurs citoyens

    D’innombrables commentateurs ont évoqué, depuis le début de la crise financière en 2008, les dangers de la spéculation sur les marchés. Mais personne n’a dit mot de la plus dangereuse de toutes les spéculations : presque tous les États, n’ayant tiré de la crise aucune leçon, spéculent maintenant sur la passivité de leurs citoyens. À l’Ouest on escompte qu’ils continueront à s’étourdir dans le divertissement ; à l’Est on parie sur l’efficacité inaltérable de la répression pure et simple. C’est la concurrence entre les deux modèles de déconnection, l’euro-américain et le chinois, qui modèlera le visage de nos lendemains. Les deux procédés partent du principe qu’un gouvernement peut court-circuiter le principe des Lumières, qui stipule qu’il n’est là pour représenter démocratiquement la volonté positive des citoyens et leur bon sens, en escomptant que les citoyens resteront largement passifs. Jusqu’à présent ça a étonnamment bien marché :  même après l’échec de la Conférence sur le climat à Copenhague en 2009, les citoyens européens se sont davantage préoccupés, en ce fatal mois de décembre, de leurs achats de Noël que de politique ; ils ont préféré rentrer chez eux avec des sacs pleins que de rouler dans le goudron et les plumes -au moins symboliquement- leurs “représentants” revenus de la Conférence les mains vides- et qui l’auraient pourtant bien mérité.
     
    Point n’est besoin d’être devin pour prédire que ce type de spéculations est voué tôt ou tard à l’échec, car aucun gouvernement au monde, à l’ère de la civilité numérique, n’est à l’abri de la colère de ses citoyens. Et quand la colère aura réussi son travail, la participation à la vie politique renaîtra sous de nouvelles formes. La post-démocratie qui est à nos portes devra encore attendre.
     
    NdT
    Je trouve ce texte intéressant et intelligent, mais outre que je relisais, par hasard, « Le Sexe et l’effroi » de Pascal Quignard, qui fait du viol de Lucrèce une tout autre lecture - celle de Musset dans « Lorenzaccio » en étant une troisième, qui participe de celle de Sloterdjik- et surtout que je suis très critique à l’égard du « soft power » de la « pax romana » (c’est une de mes tares, je descends en droite ligne de ces Arvernes qui n’en ont pas voulu) , je pense que les critiques actuels de la dépolitisation(et je leur suis reconnaissante, d’autant plus qu’ils sont rares) font une lecture petite-bourgeoise de l’Histoire. Ils croient encore à une autre fiction : celle de la croissance indéfinie de la consommation et des classes moyennes, oubliant que - et Marx l’avait repris à Ricardo - « toute richesse n’est produite que par du travail humain ». Et en prime, que les ressources de la planète sont finies et que notre gaspillage consumériste doublé d’une déraisonnable explosion démographique (due au moins autant au vieillissement abusif de la population en mauvaise santé qu’au taux de fécondité aberrant de certains pays) fait que désormais nous consommons le futur, et qu’il faudrait peut-être penser à nos descendants.

     



    Merci à Tlaxcala
    Source: http://www.spiegel.de/spiegel/0,1518,727904,00.html
    Date de parution de l'article original: 08/11/2010
    URL de cette page: http://www.tlaxcala-int.org/article.asp?reference=3254


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  • Le visage hideux de la bourgeoisie en temps de crise

    Fascisme, nazisme, identité nationale, extrême droite etc. sont des mots qui désignent, nonobstant leur capacité d’adaptation à de nouvelles situations, une seule et même réalité : la dictature du capital. Brutalité, démagogie, racisme, xénophobie, islamophobie sont les ingrédients essentiels utilisés ou plus précisément instrumentalisés par la classe dominante, en période de crise, pour maintenir, vaille que vaille, l’accumulation et la concentration de la richesse entre les mêmes mains.
     
    La stigmatisation de l’Étranger, du Noir, du Musulman, du Rom etc. lui permet non seulement d’occulter sa responsabilité et celle du capitalisme dans la situation économique et sociale désastreuse que connaît l’Europe aujourd’hui, mais aussi de détourner les travailleurs et les masses populaires des vrais problèmes qui les rongent au quotidien : chômage, précarité, suppression progressive des prestations sociales et régression sociale généralisée.

    Les bourgeoisies européennes n’arrivent plus à surmonter les crises à répétition du capitalisme. La crise actuelle dépasse largement le cadre bancaire, immobilier ou budgétaire. Il ne s’agit pas d’une crise conjoncturelle et passagère, mais bel et bien d’une crise structurelle dont les racines plongent jusqu’au cœur même du système. Les interventions massives des États, de l’Union Européenne, de la Banque centrale européenne (BCE) et du Fonds monétaire international (FMI) restent, pour l’instant, impuissantes face à l’ampleur du marasme économique. Les classes dominantes ressemblent de plus en plus à ces magiciens qui ne maîtrisent plus les forces maléfiques qu’ils ont eux mêmes créées !

    Leur fuite en avant dans les politiques ultra-libérales d’austérité ne fera qu’aggraver la situation économique et sociale d’ une Europe déjà ravagée par le chômage et la pauvreté. Ainsi, plus de 23 millions d’hommes et de femmes sont touchés par le chômage dans l’Europe à 27, soit près de 10 % de la population active, selon Eurostat, l’office statistique de l’Union européenne(1) et 116 millions de personnes étaient menacées de pauvreté ou d’exclusion sociale en 2008 soit près de 24 % de la population totale (2).

    Les plans de régressions sociales que les classes dominantes font adopter par des gouvernements qui gèrent leurs affaires sont de plus en plus contestés malgré une conjoncture défavorable aux luttes sociales. Les travailleurs, à cause du chômage de masse, se livrent sur le marché du travail une guerre fratricide qui brise leur unité face à leur ennemi de classe, la bourgeoisie. Mais même dans ces conditions difficiles, des mouvements populaires formidables ont éclaté et éclatent toujours un peu partout en Europe. Le conflit social mené par la classe ouvrière en France en octobre/novembre 2010 et soutenu par une large majorité de la population est un exemple vivant, parmi tant d’autres, de cette lutte de classes qui secoue l’Europe .

    Pour détourner les ouvriers et les salariés en général de ce combat de classe contre classe et pour reconquérir une « opinion publique » traumatisée par les différents plans d’austérité et dégoutée par le comportement d’une classe politique corrompue et totalement soumise aux intérêts d’une minorité de très riches, les bourgeoisies européennes inventent des ennemis et montrent du doigt l’Immigré, le Musulman, le Noir, le Rom etc. comme responsables de tous les maux et de tous les malheurs de l’Europe. La fabrication des boucs émissaires permet de décharger la colère populaire sur les victimes de la crise tout en épargnant ses véritables responsables.

    Ces cibles ainsi désignées, représentent pour une partie des classes populaires, élevée dans la haine de « l’Autre » par l’idéologie dominante, une concurrence insupportable sur le marché du travail. En période de crise, les travailleurs étrangers, ou supposés comme tels, sont présentés comme les responsables du chômage de masse qui ronge l’ensemble des salariés. Le chômage n’est jamais présenté comme le produit le plus authentique du capitalisme et de son système d’esclavage moderne, le salariat, qui lui est associé, mais comme le refus des salariés, de préférence étrangers, de travailler aux conditions du marché. Belle manière pour masquer la responsabilité des patrons dans la situation dramatique des chômeurs !

    En période de croissance économique, la bourgeoisie allait chercher la main-d’œuvre là où elle était la moins chère possible, en Afrique et au Maghreb par exemple. Aujourd’hui, les travailleurs immigrés Musulmans, Gitans, Noirs, avec ou sans papiers, avec ou sans nationalité, et leurs enfants sont présentés comme les coupables des crises du capitalisme.

    Contre eux, les bourgeoisies européennes mobilisent toutes leurs énergies. De la France au Danemark, des Pays-Bas à l’Autriche, de la Suède à la Suisse en passant par l’Italie, l’Allemagne et la Belgique, la traque est organisée et parfois au plus haut sommet de l’État. En France par exemple, c’est le président de la République N. Sarkozy lui-même qui a ordonné à son ministre de l’intérieur Brice Hortefeux, condamné par ailleurs par la justice pour injures racistes, d’organiser la chasse aux Roms « j’ai demandé au ministre de l’Intérieur de mettre un terme aux implantations sauvages de campements de Roms. Ce sont des zones de non-droit qu’on ne peut pas tolérer en France. La décision d’évacuer les campements sera prise sous la seule responsabilité des préfets » (3). Des ordres précis et secrets sont donnés aux préfets pour « la réalisation minimale d’une opération importante par semaine (évacuation / démantèlement / reconduite) concernant prioritairement les Roms » (4). Ainsi une partie de la population est clairement désignée à la vindicte populaire. Plus les classes dominantes s’enfoncent dans la crise, plus elles deviennent cyniques, brutales et méprisantes.

    La France de Sarkozy a expulsé des milliers de Roms, comme l’Italie de Berlusconi, l’Allemagne de Merkel ou encore le Danemark d’Anders Fogh Rasmussen pour ne citer que ces pays. Mais les Roms ne sont pas les seuls à faire l’objet de stigmatisations dans toute l’Europe. Les travailleurs immigrés, notamment de confession musulmane, sont également victimes de la xénophobie et de l’islamophobie : « La discrimination envers les musulmans persiste dans les domaines de l’emploi, du maintien de l’ordre, de l’urbanisme, de l’immigration et de l’éducation. Depuis peu, les musulmans sont également visés par des restrictions spécifiques d’ordre juridique », souligne la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) dans son rapport pour 2009 (5).

    Un peu partout en Europe, les gouvernements, alliés aux partis d’extrême droite ou sous leur pression, font voter par leur parlement des lois interdisant le port du voile dit islamique, de la burqa et autre niqab. La Suisse, elle, fait interdire la construction des minarets ! L’hystérie collective organisée autour de la burqa par exemple ressemble quelque peu à ces Deux Minutes de la Haine décrites par Orwell dans 1984. Les bourgeoisies européennes instrumentalisent également,dans un continent vieillissant, la peur de « l’Autre » en propageant, en encourageant et en banalisant un discours politique de plus en plus xénophobe et islamophobe.

    La rhétorique anti-islamique se substitue largement au vide des programmes des gouvernements et des partis politiques. Même dans un pays comme la Finlande, qui compte pourtant très peu de travailleurs immigrés musulmans, l’islamophobie est devenue, dans le cadre de la campagne électorale des législatives d’avril 2011, la question essentielle du débat politique. Mais la Finlande est un pays en crise économique profonde : « La récession mondiale a frappé plus durement la Finlande que la plupart des autres pays de l’OCDE » (6).

    Le gouvernement français a, lui aussi, organisé « le grand débat sur l’identité nationale » à quelques mois des élections régionales de mars 2010 qui a vite tourné à la stigmatisation, encore une fois, des travailleurs immigrés musulmans. Il serait fastidieux d’énumérer ici tous les partis politiques européens dont les programmes se réduisent à la stigmatisation et à la haine de l’Islam et des musulmans.

    Les fondements matériels sur lesquels s’élèvent les valeurs dont se targue encore l’Europe s’effondrent lentement sous la pression des changements économiques et avec eux toute cette construction idéologique : droit de l’homme, laïcité, démocratie, État de droit, égalité entre citoyens, libertés individuelles etc. La disparition comme d’ailleurs la réapparition de ces valeurs dépendent de leur base matérielle. Aujourd’hui comme hier, la crise du capitalisme produit, toute proportion gardée, des « valeurs » de haine, de xénophobie, d’islamophobie etc.

    Il faut donc s’attaquer au système lui-même et à la classe qui le porte, la bourgeoisie. Ce sont les patrons et non les travailleurs immigrés, quelque soit leur confession, qui exploitent et jettent dans le chômage et la misère les salariés lorsqu’ils n’ont plus besoin de leur force de travail.

    Prolétaires de toute l’Europe unissez vous contre votre véritable ennemi, le capitalisme.

    Mohamed Belaali

    belaali.over-blog.com

    (1)http://epp.eurostat.ec.europa.eu/ca...

    (2) http://epp.eurostat.ec.europa.eu/ca...

    (3) Voir le discours de Grenoble du 30 juillet 2010 http://www.elysee.fr/president/les-...

    (4) http://www.rue89.com/2010/09/10/rom...

    (5) http://www.coe.int/t/dghl/monitorin...

    (6) http://www.oecd.org/document/3/0


    http://www.legrandsoir.info/Le-visage-hideux-de-la-bourgeoisie-en-temps-de-crise.html

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  • Luiz Inacio Lula da Silva respecte la justice et l’Italie.

    Le 31 décembre, s’appuyant sur un rapport du procureur général, le président brésilien sortant a décidé de ne pas extrader Cesare Battisti. Il a souligné que « cette décision ne représente pas un affront envers un autre Etat ».

    L’écrivain Fred Vargas devrait être heureuse.

    Elle a consacré beaucoup de son temps et de son argent en défense de Battisti. Elle a pris le risque de mécontenter les critiques qui font et défont un écrivain. Elle a écrit un livre sur cette affaire. Elle a organisé un Comité de défense. Elle a frappé à toutes les portes, y compris à celles de locataires a priori frileux.

    François Bayrou a été attentif.

    François Hollande aussi, par intermittence.

    BHL (il ne peut avoir tout faux sur tous les sujets) a pris nettement position pour le prisonnier et est allé le visiter au Brésil.

    Manuel Valls, vautré dans la molle théorie du « ratissons large », a cru que son image de présidentiable grandirait en épousant la vox populi fabriquée par la presse et il a souhaité, en des termes de procureur, l’extradition en Italie et l’incarcération à vie de l’écrivain.

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    Lula et Fred vargas

    Malgré la décision courageuse de Lula, l’affaire n’est pas close et Cesare Battisti reste en prison.

    En effet, écrit Fred Vargas dans des courriels au Comité de soutien de Battisti, le président du STF brésilien (Tribunal Suprême) veut «  examiner la conformité de la décision de Lula. Ce qui ne pourra se faire qu’en février, le STF étant en vacances ».

    « Il est annoncé que, seul le président du Tribunal, Cesar Peluzo, […] peut signer l’ordre de libération de Cesare et, d’autre part, que le Tribunal examinera la décision de Lula pour estimer si elle est conforme ou non au cadre du traité d’extradition Brésil-Italie ».

    Combat d’arrière garde, espoir que des pressions internes et externes sur Dilma Rousseff la conduiront à renier la décision de Lula ? Nous sommes dans une affaire politique où, à Rome, le sort d’un fétu de paille est conditionné par des considérations où ce qui est juste est vrai est secondaire.

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    Les hasards des salons du livre m’ont fait rencontrer plusieurs fois Cesare. Je recherchais sa compagnie à table pour sa gaité, son humour, sa modestie (quand tant d’autres « se la jouent ») et parce que je savais que dans sa jeunesse, il avait pris le risque de se dresser contre les tueurs fascistes italiens dont les uns posaient des bombes dans des lieux publics et les autres gangrénaient le pouvoir. Ceux-là sont libres à ce jour.

    Contrairement à ce qu’a écrit, qu’écrit et que continuera à écrire une presse pour qui les intérêts de classe de ses propriétaires ou de ses maîtres politiques priment sur la vérité, Cesare n’a pas été condamné pour avoir commis des meurtres durant les « années de plomb ». Cesare n’a tué personne. Pas un des témoins oculaires de actes qui lui sont imputés ne l’a vu. Aucune preuve, mais des accusations de « repentis » qui ont ainsi acheté leur liberté malgré des incohérences policières et judicaires à foison dont chacune aurait dû conduire à l’acquittement.

    Le 31 décembre dans le journal de 19 H de France Inter, une « journaliste » (sic et beurk !) nous a informés que les familles « des quatre victimes assassinées par Battisti » protestaient. Tel quel ! Sur une radio publique. Cadeau de fin d’année et rafraîchissement de mémoire pour ceux qui se demandent pourquoi des sites comme LGS existent et prospèrent.

    Cesare s’était échappé des geôles italiennes (où il se trouvait pour appartenance à une « bande armée ») et il s’est réfugié au Mexique. C’est pendant son exil qu’un procès, dont il ne savait rien a eu lieu et il a été condamné « par contumace » pour meurtres. Il est ensuite venu en France parce que Mitterrand lui avait accordé l’asile politique avant que Chirac ne bafoue la parole donnée par la plus haute autorité de l’Etat.

    Entre deux séjours en prison en France, Cesare a fui au Brésil où il a été incarcéré sur intervention de la France.

    Dans son dernier geste avant de céder le pouvoir à Dilma Rousseff, le président brésilien Lula a affirmé avec panache que la liberté d’un innocent peut mériter un incident diplomatique.

    Sa décision dit aussi que ses détracteurs de gauche, qui, en France, ne voyaient pas la différence entre lui et un politicien de droite ou tel dirigeant socialiste français bouffi d’ambition, seraient bien inspirés de se méfier du toutourienisme.

    Nos amis italiens auraient tort de s’arc-bouter sur ce dossier quand il peut être clos ainsi que l’avait voulu Mitterrand (alors président de la République et donc premier magistrat de France), ainsi que le veut Lula, non pas par un affront à un pays, mais par un souci d’apaisement que la France a connu en bouclant le dossier de l’OAS afin de ne pas ressasser pendant des décennies des rancœurs qui n’apportent rien à la paix civile. Aider l’Italie à oublier Cesare, le laisser vivre (si loin d’elle), c’est ce qu’a souhaité Lula sans que quiconque puisse voir dans cet homme d’Etat un partisan de la violence ou un ennemi de l’Italie.

    Depuis 2004, le Grand Soir s’est honoré de publier plusieurs articles sur l’affaire, dont un de Fred Vargas et un courrier de Cesare Battisti à son comité de soutien. Je renvoie donc ceux qui veulent savoir dans tous ces détails la vérité aux liens ci-après. ici

    Maxime Vivas.

    URL de cet article 12366
    http://www.legrandsoir.info/Luiz-Inacio-Lula-da-Silva-respecte-la-justice-et-l-Italie.html

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  • Rapport sur les violations israéliennes des droits humains

    Au deuxième anniversaire de l’offensive israélienne contre la bande de Gaza, les forces d’occupation israéliennes (FOI) ont multiplié et renforcé leurs agressions contre les civils palestiniens et leurs biens dans les Territoires palestiniens occupés (TPO).

    Pendant cette semaine du 23 au 29 décembre :

    • les FOI ont tué 2 bergers palestiniens dans la bande de Gaza ;
    • elles ont tué deux militants de la résistance palestinienne dans le sud de la bande de Gaza :
      • 3 civils palestiniens ont été blessés par des tirs israéliens en Cisjordanie ;
    • les FOI ont continué de tirer sur les travailleurs, agriculteurs et pêcheurs palestiniens dans les zones frontalières dans la bande de Gaza :
      • 4 Palestiniens ont été blessé ;
      • 6 pêcheurs palestiniens ont été arrêtés, et leurs bateaux confisqués par les FOI ;
    • des avions israéliens ont attaqué un certain nombre de cibles dans la bande de Gaza ;
    • les FOI ont continué d’user de la force contre les manifestations non violentes en Cisjordanie :
      • 5 Palestiniens et un journaliste israélien ont été blessés ;
      • 17 militants des droits de l’homme ont été arrêtés ;
    • les FOI ont mené 51 incursions dans les communautés palestiniennes en Cisjordanie :
      • 18 Palestiniens ont été arrêtés, dont un membre du Conseil législatif palestinien et 7 mineurs ;
    • Israël a maintenu son siège total sur les TPO et l’isolement de la bande de Gaza du monde extérieur :
      • des soldats israéliens sur un check-point en Cisjordanie ont arrêté un Palestinien ;
    • Israël a continué de prendre des mesures visant à créer une majorité démographique juive à Jérusalem :
      • la municipalité israélienne de Jérusalem a lancé une campagne de destructions et de démolitions à al-Tour, près de Jérusalem ;
    • Israël a poursuivi ses activités de colonisation en Cisjordanie et les colons israéliens leurs agressions contre les Palestiniens et leurs biens :
      • des colons se sont emparés de 600 dunums (60 ha) de terres palestiniennes près d’Hébron.

    (JPG)

    Des FOI agressent un enfant palestinien lors d’une incursion dans Selwan, à Jérusalem.
    (voir les photos de l’arrestation ci-dessous)


    Violations israéliennes recensées durant la période du 23 au 29 décembre 2010

    1 - Incursions dans les zones palestiniennes et agressions contre les civils palestiniens et leurs biens en Cisjordanie et dans la bande de Gaza

    Jeudi 23 décembre

    Vers minuit cinq, les FOI entrent dans Kufor Ra’ei, au sud de Jénine. Elles opèrent sur la maison de Wa’el Ahmed Melhem et arrêtent ses trois fils : Mo’tassem, 27 ans, Muntasser, 25 ans, et Mohammed, 21 ans. Elles confisquent également deux téléphones portables, deux télévisions et une caméra numérique.

    Vers minuit dix, les FOI ouvrent le feu sur un véhicule palestinien dans l’est d’Hébron. Elles tirent sur lui à un distance de 15 à 20 mètres alors que son conducteur roulait doucement après s’être arrêté un court instant. Le conducteur et un passager sont blessés. Les soldats les font descendre de la voiture, vérifient leurs cartes d’identité et les font transporter en ambulance vers un hôpital. Elles confisquent la voiture. Les deux personnes sont :

    -   Isma’il Salah al-Ja’bari, 20 ans, gravement blessé par au moins une balle dans le dos et une autre dans la tête ; et

    -   Mohammed ‘Aamer al-Ja’bari, 24 ans, blessé de deux balles dans le bras et d’un éclat à la tête.

    Le lendemain soir, 24 décembre, les FOI vont permettre au frère de l’un des deux blessés de leur rendre visite à l’hôpital. Quelques heures plus tard, les FOI emmènent le deuxième blessé vers une destination inconnue, alors que la premier reste en soins intensifs.

    Vers 2 h, les FOI entrent dans Qabatya, au sud-est de Jénine. Elles fouillent la maison de Mahmoud Ahmed Zakarna, 22 ans, et l’arrêtent.

    Vers 6 h 30, les soldats postés dans les miradors au nord de Beit Lahia, dans le nord de la bande de Gaza, ouvrent le feu sur des travailleurs palestiniens qui ramassent des débris de matériaux de construction sur le site d’une ancienne colonie israélienne évacuée, Elli Sinai. Mohammed ‘Aayesh al-Hossoumi, 19 ans, de Beit Lahia, est blessé par une balle à la cuisse gauche, alors qu’il se trouve à près de 300 m de la frontière entre la bande de Gaza et Israël.

    Vers 9 h, les soldats israéliens postés à la frontière nord-est de la bande de Gaza ouvrent le feu sur des agriculteurs palestiniens en train de cultiver des légumes près de l’ancienne colonie d’Elli Sinani. Hatem Isma’il Shalha, 17 ans, est blessé d’un ricochet de balle à la tête alors qu’il est à près de 200 m de la frontière.

    Incursions avec patrouilles dans les rues, sans arrestations ni opérations sur les maisons :

    -   vers 9 h 30, dans Habla, au sud-est de Qalqilya avec retrait vers 13 h 40 ;

    -   vers 10 h dans Ras ‘Atiya, au sud de Qalqilya ;

    -   et dans Kufor Qaddoum, à l’est de Qalqilya.

    Vers 10 h 55, les soldats israéliens dans les miradors sur la frontière entre la bande de Gaza et Israël, au nord du village bédouin, tirent sur des bergers palestiniens qui font paître leurs troupeaux dans le nord du village. Salama Hazzaa’ Musleh Abuj Hashish, 19 ans, est gravement blessé d’une balle dans le ventre. Il est transporté sur une charrette à cheval vers la grande route puis évacué par ambulance vers l’hôpital Kamal ‘Edwan à Beit Lahia. Malgré une opération aux urgences, son décès est constaté vers 17 h 30.

    Vers 13 h 20, les soldats israéliens postés à la frontière nord-est de la bande de Gaza ouvrent le feu sur des travailleurs palestiniens qui collectent des restes de matériaux de construction sur le site d’une colonie israélienne évacuée, Elli Sinani. Mahmoud Saleh Karim, 17 ans, du camp de réfugiés d’al-Shati à Gaza est blessé d’une balle à la main gauche, il était à 500 mètres environ de la frontière.

    Incursions avec patrouilles dans les rues, sans raids sur les maisons ni arrestations :

    -   vers 16 h, dans ‘Izbat al-Tabib, à l’est de Qalqilya ;

    -   vers 18h 40, dans ‘Azzoun, à l’est de Qalqilya ;

    -   et vers 21 h 40, dans la zone de Jabal al-Aqra, à l’est de Kufor Qaddoum, près de Qalqilya, l’armée ratisse le secteur et lance des flash bombes.

    Vendredi 24 décembre

    Vers 8 h, les FOI posent un check-point à l’entrée sud de Nabi Saleh, au nord-ouest de Ramallah. Elles arrêtent et fouillent les voitures palestiniennes. Des jeunes Palestiniens se rassemblent et lancent des pierres sur les soldats de l’occupation. Immédiatement, les soldats tirent à balles caoutchouc sur les enfants, lancent des lacrymogènes et des bombes sonores. ‘Odai ‘Abdul Raziq al-Tamimi, 18 ans, est blessé par au moins 11 balles dans la poitrine. D’autres jeunes souffrent de l’inhalation des gaz.

    Incursions avec patrouilles dans les rues, sans raids sur les maisons ni arrestations :

    -   vers 16 h, dans Shwaika, banlieue nord de Tulkarem ;

    -   dans al-Jaroushiya, même secteur ;

    -   et vers 18 h, dans Ya’bad, au sud-ouest de Jénine.

    Vers 23 h 40, des avions israéliens bombardent un tunnel sur la frontière avec l’Égypte, près du quartier d’al-Salam dans le sud de Rafah. Aucune victime n’a été signalée ; même opération vers 23 h 55, sur un autre tunnel près du quartier d’al-Brazil, même secteur.

    Samedi 25 décembre

    Vers minuit, des avions israéliens tirent 3 missiles sur un site des Brigades ‘Izziddin al-Qassam (la branche armée du Hamas) à al-Mughraqa, près du pont de la Vallée à Gaza, dans le centre de la bande de Gaza. 3 militants palestiniens de la résistance qui circulaient en voiture dans le secteur sont blessés et le site est gravement endommagé.

    Incursions des FOI avec patrouilles dans les rues, sans raids sur les maisons ni arrestations :

    -   vers minuit, dans Faqqou’a, au nord-est de Jénine ;

    -   dans Shwaika, au nord de Tulkarem ;

    -   vers midi et demi, dans Kfiret, au sud-ouest de Jénine ;

    -   dans Kufor Qoud, à l’ouest de Jénine ;

    -   dans al-‘Araqa, au sud-ouest de Jénine ;

    -   et vers 18 h 30, dans Ya’bad, même secteur.

    Vers 15 h, des soldats israéliens postés dans les miradors sur la frontière nord-est de la bande de Gaza ouvrent le feu sur des pêcheurs palestiniens en mer, près de la plage de Beit Lahia, dans le nord de la bande de Gaza. Ahmed Mohammed Zayed, 25 ans, de Beit Lahia, est blessé d’une balle dans le pied droit.

    Dimanche 26 décembre

    Vers minuit, incursion dans ‘Azzoun, à l’est de Qalqilya, l’armée fouille deux maisons appartenant à la famille Radwan, aucune arrestation n’est signalée.

    Vers minuit et demi, l’armée entre dans Jalqamous, au sud-est de Jénine, patrouille dans les rues quelques temps avant de se retirer, pas d’arrestations.

    Vers une heure du matin, un accrochage armé a lieu entre des militants des Brigades al-Quds (branche armée du Jihad islamique) et les FOI, près de la frontière la bande de Gaza et Israël, à l’est de Khuza’a, au sud de Khan Yunis. Des tirs sporadiques se poursuivent jusqu’à 6 h, des hélicoptères et des chars sont utilisés par les Israéliens. 2 militants des Brigades sont tués :

    -   Mos’ab ‘Eissa ‘Ali Abu Rouk, 20 ans, et

    -   Mahmoud Yousef Shihda al-Najjar, 21 ans.

    Vers 2 h 30, l’armée entre dans Beit Liqya, à l’ouest de Ramallah, patrouille dans les rues quelques temps et se retire. Pas d’arrestations ni raids sur les maisons.

    Vers 3 h, incursion dans Nabi Saleh, au nord-ouest de Ramallah, l’armée fouille un certain nombre de maisons, mais sans arrestations.

    Vers 11 h 30, dans Beit Ummar, au nord d’Hébron, où l’armée investit l’école Zahrat al-Mada, ratissent les cours puis se retire. Pas d’arrestations.

    Vers 17 h, les FOI entrent dans Zabbouba, au nord-ouest de Jénine, patrouillent dans les rues et investissent un terrain de jeu. Elles arrêtent Mohammed Zuhair Jaradat, 15 ans, et Ahmed Rida Jaradat, 16 ans. Elles les libèrent dans la soirée. Les FOI préviennent le président du conseil local du village qu’il doit empêcher quiconque de lancer des pierres sur les soldats israéliens postés près du mur d’annexion.

    Vers 18 h 30, des navires israéliens ouvrent le feu sur des bateaux de pêcheurs palestiniens au large de la plage d’al-Nussairat, dans le centre de la bande de Gaza, les obligeant à revenir vers la plage.

    Vers 20 h, les FOI entrent dans Jayyous, au nord de Qalqilya, patrouillent dans la ville et se retirent. Pas de raids sur les maisons ni d’arrestations de signalés.

    Vers 21 h, incursion dans Beit Fajjar, au sud-ouest de Bethléhem, où l’armée investit des maisons et arrêtent 2 Palestiniens, dont un mineur :

    -   Murad Ahmed Taqatqa, 17 ans, et

    -   Mahmoud Faisal Thawabta, 21 ans.

    Lundi 27 décembre

    Vers minuit, les FOI reviennent dans Jayyous, pour patrouiller quelques temps dans les rues et se retirent.

    Vers une heure, incursion dans Taqqou’, au sud-est de Bethléhem, où l’armée fouille certaines maisons et arrête 4 mineurs palestiniens :

    -   Waheed Ahmed Kawazba, 17 ans,

    -   Radi Hamdan Kawazba, 17 ans,

    -   Mohammed Yousef Kawazba, 15 ans, et

    -   Mohammed Na’im Kawazba, 13 ans.

    Vers 2 h, incursion dans Deir Samet, au sud-ouest d’Hébron, avec fouilles de maisons et arrestations de 2 Palestiniens :

    -   Fadi Yousef al-Hroub, 20 ans, et

    -   Ahmed al-Hroub, 18 ans.

    Vers 4 h, les FOI entrent dans la ville et le camp de réfugiés de Jénine, investissent la maison de Khaled Saleh Abu Zaina, 52 ans, dirigeant du Jihad islamique. Elles le font sortir avec son fils, Saleh, 23 ans, et les interrogent. Environ une demi-heure plus tard, les FOI obligent le fils à les guider vers le domicile de son oncle, ‘Omar Saleh Abu Zaina. Elles fouillent son domicile et arrêtent son fils, Mohammed, 22 ans. Elles se saisissent également d’un ordinateur.

    Incursions des FOI avec patrouilles dans les rues, sans raids sur les maisons ni arrestations :

    -   vers 4 h, dans Tulkarem ;

    -   vers 9 h 30, dans ‘Arraba, au sud-ouest de Jénine ;

    -   dans Brouqin, à l’ouest de Salfit ;

    -   vers 10 h 30, dans Jayyous à nouveau ;

    -   vers midi, dans Maithaloun, au sud-est de Jénine ;

    -   dans Tulkarem à nouveau ;

    -   vers 13 h, dans Hijja, à l’est de Qalqilya ;

    -   vers 13 h 55, dans ‘Azzoun ;

    -   et dans Kufor Thuloth, près de Qalqilya ;

    -   vers 14 h, dans Baqat al-Hatab, au nord-est de Qalqilya ;

    -   vers 14 h 30, dans Beit Leed, à l’est de Tulkarem ;

    -   vers 15 h 30, dans Rafat, à l’ouest de Salfit ;

    -   vers 18 h 30, dans ‘Ein al-Dyouk, au nord de Jéricho ;

    -   vers 20 h, dans ‘Iraq Bourin, au sud de Naplouse ;

    -   vers 21 h 30, dans Koubar, au nord-ouest de Ramallah ;

    -   et vers 23 h 35, dans Brouqin, à l’ouest de Salfit.

    Mardi 28 décembre

    Vers une heure du matin, les troupes entrent dans al-Zahiriya, au sud-ouest d’Hébron. Elles investissent et fouillent la maison de Mohammed Isma’il al-Tal, 38 ans, député du Conseil législatif palestinien, et l’arrêtent. Il faut indiquer qu’al-Tal avait été emprisonné par les Israéliens pendant quatre ans et qu’il a été libéré fin 2009.

    Vers 8 h 30, les FOI entrent dans Kufor Zeibad, au sud de Tulkarem, patrouillent dans les rues avant de se retirer quelques temps plus tard. Sans raids sur les maisons ni arrestations.

    Dans l’après-midi, les FOI assassinent un Palestinien près de la frontière de la bande de Gaza avec Israël, à l’est de Khan Yunis. D’après l’enquête conduite par le PCHR, vers 15 h 45, Hassan Mohammed Qudaih, 19 ans, et 4 membres de sa famille s’en allaient sur la zone frontalière à l’est de Khuza’a, près de Khan Yunis, où deux membres de la résistance palestinienne avaient été tués lors d’un accrochage avec les FOI l’avant-veille, le dimanche 26, à environ 300 m de la frontière. Les soldats israéliens postés sur la frontière font feu sur ces civils qui font demi-tour et s’enfuient vers Khuza’a. Qudaih est blessé par une balle et s’écroule. Il rampe vers l’ouest et appelle ses parents et amis leur demandant du secours. Cependant, les soldats israéliens continuent de tirer sur la zone, et aucun d’entre eux ne peut s’approcher. Environ une demi-heure plus tard, les soldats tirent un obus sur le secteur où Hassan est étendu. Il est tué sur le coup. Des équipes médicales réussissent à évacuer son corps vers 17 h 15.

    Vers 19 h, des parachutistes israéliens sautent sur la zone délimitée par les villages de Seilat al-Harthiya, Ta’nak, ‘Aanin, al-Taybeh, et Rummana, à l’ouest de Jénine, et sur l’école d’al-Taybeh, dans le cadre d’un saut d’entraînement militaire. Pas de raids sur des maisons ni d’arrestations.

    Vers 19 h 15, les marins de l’occupation israélienne arrêtent 6 pêcheurs palestiniens qui pêchaient au large de la plage d’al-Sudaniya, dans le nord de la bande de Gaza. Ils les emmènent au port d’Ashdod, en Israël, pour interrogatoire. Ils se saisissent également du poisson pêché à bord des bateaux. Les pêcheurs sont libérés vers 6 h le lendemain mercredi. Ce sont :

    -   Ahmed Sha’ban al-Hissi, 58 ans,

    -   Subeh ‘Abdul Salam al-Hissi, 23 ans,

    -   ‘ Aadel ‘Abdul Karim Bakere, 49 ans,

    -   Ramadan Isma’il al-Hissi, 49 ans,

    -   Fayez Ahmed al-Hissi, 27 ans, et

    -   Yassin Ahmed al-Fassih, 37 ans.

    Mercredi 29 décembre

    Vers 10 h, les FOI entrent dans Rummana, au sud-ouest de Jénine et patrouillent dans les rues de la ville. Elles arrêtent deux tracteurs, conduits pas Rebhi As’ad Farassini, 48 ans, et Mohammed Bashir Abu Shamla, 22 ans. Elles obligent les deux civils à conduire leurs tracteurs aux quartiers de la liaison militaire israélienne, à l’ouest de Jénine, où le tracteur de Farassini est confisqué au motif qu’il n’avait pas de permis.

    Vers 10 h 45, les soldats israéliens postés à la frontière de la bande de Gaza avec Israël, dans le nord de Jabalya, ouvrent le feu sur des agriculteurs palestiniens. Ceux-ci sont contraints de quitter le secteur. Pas de victimes.

    (JPG)

    Les dépouilles des deux résistants du Jihad islamique tués le 26 décembre
    dans l’accrochage avec les forces d’occupation
    (photo : Reuters)


    2 - Usage d’une force démesurée contre les manifestations non violentes protestant contre la colonisation et la construction du mur d’annexion

    Durant la semaine écoulée, les FOI ont continué d’utiliser la violence contre les manifestations pacifiques organisées par les Palestiniens et des militants des droits de l’homme internationaux et israéliens. 5 Palestiniens et un photographe de presse israélien ont été blessés. Des dizaines de Palestiniens et d’internationaux souffrent de l’inhalation des lacrymogènes, d’autres des coups reçus des soldats. De plus, les FOI ont arrêté 2 Palestiniens, 4 militants israéliens et 11 internationaux.

    Bil’in, à l’ouest de Ramallah : le vendredi 24 décembre après la prière, la manifestation non violente hebdomadaire, des Palestiniens, avec des militants internationaux et israéliens, se dirigent vers le mur d’annexion qui traverse et vole les terres du village. 5 manifestants ont revêtu une tenue de Père Noël et distribuent des cadeaux, qui sont des corps de grenades lacrymogènes qui ont été lancées par les soldats israéliens. Les soldats postés sur le mur tirent sur eux à balles caoutchouc et lancent des lacrymogènes. 2 Palestiniens et un photographe de presse israélien sont blessés :

    -   ‘Ouda Rebhi Abu Rahma, 22 ans, photographe du Comité public contre le mur à Bil’in, est touché par un corps de grenade lacrymogène au pied droit ;

    -   Tariq Mohammed al-Khatib, 27 ans, même blessure, et

    -   un photographe de presse israélien, même blessure.

    De plus, un certain nombre de manifestants souffrent des lacrymogènes et d’autres, des coups reçus des soldats.

    Ni’lin, à l’ouest de Ramallah : le vendredi 24 décembre, la manifestation des Palestiniens et d’internationaux, hebdomadaire, est organisée contre la construction du mur d’annexion. Elle est agressée par les soldats postés sur le mur. Des dizaines de manifestants ont inhalé les lacrymogènes, et d’autres ont été roués de coups par les soldats de l’occupation.

    Nabi Saleh, au nord-ouest de Ramallah : le vendredi 24, après la prière, la manifestation des Palestiniens, des militants internationaux et israéliens, est organisée comme chaque semaine, pour protester contre la confiscation de terres dans la zone de Wad al-Raya, entre les villages de Nabi Saleh et Deir Nizam. Quand les manifestants s’approchent de ces terres volées au profit des colons de Halmish, l’armée les agresse à coups de grenades lacrymogènes et de bombes sonores, tirant à balles caoutchouc. Un homme et son épouse sont blessés :

    -   Ibrahim Hassan al-Tamimi, 60 ans, est blessé d’une balle caoutchouc à la tête, et

    -   Fa’eda al-Tamimi, 50 ans, même blessure.

    De nombreux manifestants également souffrent des lacrymogènes. De plus, les FOI arrêtent un Palestinien et 3 militants israéliens :

    -   ‘Alaa’ Mohammed al-Tamimi, 22 ans,

    -   David, 45 ans,

    -   Josef, 28 ans, et

    -   Yuval, 34 ans.

    Hébron : vers 14 h 30, le samedi 25 décembre, le Forum des jeunes contre les colonies à Hébron organise une manifestation non violente contre la colonisation israélienne et la fermeture qui se poursuit de la rue al-Shuhada dans le centre d’Hébron, de même qu’en souvenir des victimes de l’offensive militaire israélienne contre la bande de Gaza, en décembre 2008/janvier 2009.

    La manifestation, à laquelle participaient de nombreux Palestiniens et internationaux, se dirige vers le quartier al-Zahed, dans le centre d’Hébron, vers l’avant-poste colonial de Beit Rumano, au nord de la vieille ville. Des soldats et policiers israéliens sont près de la route qui mène à cette colonie et à la vieille ville. Ils agressent la manifestation et déclarent la vieille ville « zone militaire fermée ». Aussitôt après, les manifestants se dirigeant vers un autre avant-poste et parviennent jusque dans la zone d’al-Qassaba, près de l’avant-poste Abraham Avino. Les soldats attaquent les manifestants et cognent sur certains.

    Deux manifestants, dont une femme, souffrent d’ecchymoses :

    -   Nawal Akram Eslaimiya, 40 ans, et

    -   Mohammed Mahmoud ‘Amru, 23 ans.

    Les FOI arrêtent également 2 internationaux et un Israélien :

    -   Lilian, 19 ans, citoyenne française,

    -   John, 24 ans, citoyen écossais, et

    -   Aluna, 55 ans, citoyenne israélienne,

    qui seront relâchés dans la soirée sous caution.

    Il faut indiquer que les FOI ont fermé la rue al-Shuhada, qui fait plus de 600 m de long, et relie le centre commercial d’Hébron avec la vieille ville. Elles maintiennent fermées également plus de 500 magasins, 120 maisons particulières et 19 rues dans la vieille ville d’Hébron.

    Qalandya : vers 10 h, dimanche 26 décembre, des Palestiniens et des militants israéliens et internationaux, dont 90 Français, se rassemblent au check-point de Qalandya, au nord de Jérusalem. Ils ont organisé une manifestation non violente contre le mur d’annexion, la colonisation et les check-points militaires. Les FOI ont fermé le check-point avec des barbelés. Quand les manifestants tentent de traverser le check-point, direction Jérusalem, les soldats tirent à balles caoutchouc, lancent des lacrymogènes et des bombes sonores sur les manifestants. De nombreux d’entre eux souffrent d’avoir respiré les lacrymogènes. Les soldats arrêtent également 9 Français et un photographe du quotidien local, Al-Quds, mais les libèrent deux heures plus tard. Les FOI bouclent le check-point.

    Bil’in : le même jour, vers 15 h 30, des Palestiniens et militants israéliens et internationaux, dont les 90 Français, se rassemblent dans le centre du village de Bil’in, pour planter des oliviers des deux côtés du mur d’annexion. Les FOI ont fermé la porte dans le mur avec des barbelés et quand les manifestants arrivent, ils tirent sur eux à coups de balles caoutchouc, et lancent des grenades. Certains sont frappés.

    Bittin, au nord-ouest de Ramallah : le lundi 27 vers 15 h, des Palestiniens, Israéliens et internationaux, dont toujours les 90 Français, se rassemblent dans le centre de Bittin. La manifestation non violente organisée se dirige vers le check-point de Beit Eil, entre le village et Ramallah, exigeant son démantèlement. Même accueil par les soldats et même violence. ‘Alaa’ Fawzan Hamed, 25 ans, est touché à la tête par un corps de grenade lacrymogène, de nombreux manifestants sont gênés par les lacrymogènes, et d’autres prennent les coups des soldats.

    (JPG)

    Bittin, manifestation non violente des Palestiniens, militants israéliens et internationaux, dont 90 Français, exigeant le démantèlement du check-point de Beit Eil.
    (Photo : AP/Majdi Mohammed)

    3 - Maintien du bouclage des TPO

    Israël maintient le bouclage serré de tous les territoires palestiniens et ses restrictions aux déplacements des Palestiniens dans la bande de Gaza et en Cisjordanie dont Jérusalem-Est.

    Jérusalem : des milliers de Palestiniens de Cisjordanie et de la bande de Gaza ne peuvent toujours accéder à la ville. Les restrictions sont encore renforcées les vendredis, jours de prière, empêchant davantage de Palestiniens de venir prier à la mosquée al-Aqsa, dans la vieille ville palestinienne.

    Hébron : le vendredi 24 décembre, les FOI ferment toutes les portes au nord et à l’est d’Hébron, et de la ville voisine d’Halhoul. Les portes restent fermées jusqu’au lendemain soir, et pendant ce temps, les FOI arrêtent et fouillent toutes les voitures palestiniennes. Lundi midi, 27 décembre, elles posent un certain nombre de check-points sur les routes autour d’Hébron.

    Ramallah : les soldats postés aux check-points de Jaba’ et Qalandya maintiennent toujours des contrôles plus approfondis pour le passage des Palestiniens. Le jeudi 23, vers 19 h, les soldats reviennent prendre position sur le check-point d’’Attara, à l’entrée nord de Bir Zeit. Vers 18 h 30, le samedi 25, ils mettent un barrage à l’entrée de Beit Liqya.

    Qalqilya : le jeudi 23, les FOI posent 3 check-points autour de Qalqilya ; le vendredi 24, 3 ; le samedi 25, un à l’entrée d’Ematin, et un autre près de Kufor Laqef, à l’est de Qalqilya. Le dimanche 26, 6 sont posés autour de la ville, et le lundi 27, 4. A chaque check-point, les soldats arrêtent, fouillent les véhicules palestiniens et contrôlent les personnes.

    Tulkarem : le lundi 27, vers 13 h 30, les FOI posent un barrage sur la route Kufor Zeibad/Kufor ‘Abboush, au sud de Tulkarem.

    Jénine : le mardi 28, vers 11 h, les FOI posent un check-point au carrefour d’ ‘Anza, au sud de Jénine, et le mercredi 29, vers 11 h, un autre au carrefour de Rummana, à l’ouest de la ville.

    Salfit : l’entrée nord de la ville est toujours fermée par l’armée, depuis 2000, de même que les deux routes qui relient Marda à ses terres agricoles. Vers 10 h 30, le lundi 27, nouveau check-point à l’entrée de Marda.

    Jéricho : vers 19h, le jeudi 23, l’armée pose un check-point volant à l’entrée de Fassayel, au nord de Jéricho.

    Arrestations sur les check-points militaires

    Le samedi 25 décembre, vers 15 h 30, les soldats israéliens postés au check-point d’al-Hamra, au sud-est de Tubas, arrêtent Mohammed Jameel Jindeb, 21 ans, du camp de réfugiés d’al-Far’a, au sud de Tubas.

    Harcèlement sur les check-points militaires

    Le dimanche 26, vers 9 h, deux soldats israéliens agressent trois civils palestiniens près du check-point de Za’tara, au sud de Naplouse, et arrêtent l’un d’eux. Dans son témoignage au PCHR, ‘Alaa’ Sbaih Hassan, 20 ans, de Qasra au sud-est de Naplouse, déclare :

    «  Vers 9 h, dimanche, 26 décembre, j’étais au carrefour de Za’tara, au sud de Naplouse, attendant un taxi pour me rendre à Salfit. Waleed Barakat, 20 ans, et Bilal Ja’far Hassan, 20 ans, de mon village, Qasra, sont près de moi. Un jeep (Hummer) de l’armée israélienne arrive et s’arrête près de nous. Un soldat ouvre la portière et nous interpelle en hébreu. Nous ne comprenons rien de ce qu’il dit car nous ne parlons pas l’hébreu. Il ordonne alors à Waleed Barakat de venir à lui, ce que fait Waleed. Le soldat attrape Barakat par ses vêtements et le tire vers lui, lui criant dessus en hébru, et le fait tomber. Le soldat m’ordonne alors de venir près de lui. Il me parle en hébreu et me pousse. Aussitôt après, le soldat ordonne à Bilal Hassan de s’approcher. Même chose, il lui parle en hébreu et le bouscule. Le soldat alors entoure le cou de Bilal avec un fil de radio et se met à le frapper. Aussitôt, lui et un autre soldat descendent de la jeep et bandent les yeux et menottent les mains de Bilal. Ils me tapent dessus et sur Barakat pendant 5 minutes. D’autres véhicules de l’armée et de la police israéliennes arrivent sur la zone. Un officier de police m’expulse de là avec Barakat. Ils interrogent Bilal et l’emmènent dans une jeep vers une destination inconnue. »

    4 - Mesures visant à créer une majorité démographique juive à Jérusalem

    Le mercredi 29 décembre, vers 9 h, la police israélienne, accompagnée de nombreux bulldozers, camions et élévateurs de la municipalité israélienne de Jérusalem, entre dans le secteur de Khillat al-‘Ein, à l’est d’al-Tour, à l’est de Jérusalem. Ils démolissent un certains nombre de salles, de boutiques et d’élevages de volailles. Ils rasent aussi de vastes terres agricoles et confisquent certains biens appartenant à des civils palestiniens. Au moins, 100 civils sont pénalisés par ces actes, qu’on peut résumer de la façon suivante :

    1 - ils ont rasé 2200 m² de terrains plantés d’oliviers, de raisons, de bananiers et citronniers, est démoli 7 mobil-homes qui servait de magasins, appartenant à Ahmed Abu Adam ;
    2 - ils ont rasé une grande ferme, des basses-cours et des canalisations pour l’eau appartenant à Wa’ed Darwish D’ana, dont la famille comprend 12 membres ;
    3 - ils ont démoli un grand magasin et confisqué 30 tonnes de fer et 3 tonnes de ferraille appartenant à Yahia ‘Arafat al-Zam, dont la famille comprend 9 membres ;
    4 - ils ont rasé 1500 m² de terres agricoles et démoli une basse-cour et un magasin appartenant à Na’im Salama Abu Sbaitan ;
    5 - ils ont rasé 2000 m² de terres agricoles, démoli une basse-cour et arraché au moins 50 arbres appartenant à Maher Sbaitani, dont la famille comprend 6 membres ;
    6 - ils ont rasé 600 m² de terrains plantés d’oliviers et de citronniers, et détruit une salle et une canalisation pour l’eau, appartenant à Ra’ed al-Sayad, dont la famille comprend 6 membres ;
    7 - ils ont arraché au moins 70 oliviers appartenant à Ahmed Khwais ;
    8 - ils ont démoli une salle et arraché plus de 20 oliviers appartenant à Ibrahim al-Balbissi ; 9 - ils ont démoli deux salles appartenant à ‘Abdulla Nabulsi.

    5 - Colonisation et agressions des colons contre les civils palestiniens et leurs biens

    La colonisation de la Cisjordanie se poursuit en violation du droit humanitaire international, ainsi que les agressions des colons contre les Palestiniens.

    -  Le samedi 25 décembre, des colons israéliens, escortés par les FOI, de la colonie Missa Ya’ir, à l’est de Yatta, au sud d’Hébron, lancent une opération pour s’emparer de terres palestiniennes. Ils montent une clôture sur une zone de 600 dunums (60 ha) appartenant aux familles Houhiya et al-Najjar. Les terres confisquées font partie d’un secteur qui est souvent attaqué par les colons et fermé par les FOI.

    -  Le dimanche matin, 26 décembre, des colons de Gilad, à l’est de Qalqilya, s’emparent d’une terre appartenant à ‘Aadel Hassan Yamin, 54 ans, de Jeet, au nord-est de Qalqilya. Dans son témoignage au PCHR, Yamin déclare :

    « Vers 7 h 30, dimanche 26 décembre, je me rendais sur ma terre au sud de Jeet, en face la colonie Gilad. En arrivant, je suis surpris de voir que la clôture est complètement démontée. Ils s’en étaient pris aussi à un puits d’eau. Je suis certain que l’attaque a été lancée par des colons, car régulièrement, ils s’en prennent à des terres agricoles dans ce secteur. J’ai appelé le Centre international de la Croix-Rouoge, mais je n’ai reçu aucune aide. »

    -  Le lundi 27, vers 14 h 30, des colons de Tits’har, mettent le feu à des cultures à Khillat ‘Ein al-Sha’ira, dans le sud-est du village de Madama, au sud de Naplouse. 20 oliviers sont partiellement brûlés quand les pompiers palestiniens peuvent arriver sur les lieux. Les colons ont également arraché un certain nombre d’arbustes.

    -  Le mardi 28, des colons brûlent 3 tentes appartenant à la famille al-Nawaj’a, à Sushia, au sud d’Hébron. Selon Sarah Isma’il al-Nawaj’as, quand elle s’est réveillée, elle a vu les tentes en train de flamber. Elle a vu aussi un colon israélien qui s’enfuyait dans une voture vers la colonie voisine de Sushia.


    (JPG) Document public

    Pour plus d’informations, merci de vous rendre sur le site du PCHR, ou de le contacter à son bureau à Gaza ville par courriel : pchr@pchrgaza.org, ou par téléphone : (+972 (0)8 2824776 - 2825893).

    Un enfant arrêté pour avoir jeté des pierres à Jérusalem-Est

    Katie Cannon écrit : sur la troisième photo ci-dessous, on voit le garçon qui a été arrêté en arrière-plan, et il est difficile de dire s’il s’est trouvé mêlé aux jets de pierres après cette photo. Le garçonnet sur sa trottinette à sa droite sur la photo ne rend pas la lecture de la photo plus facile. Mais coupable ou non, il a dû être extrêmement dur pour sa famille de voir l’enfant emmené par les autorités.

    PhotoBlog - photos de Ammar Awad/Reuters

    (JPG)

    Ahmad Daana, jeune Palestinien de 12 ans, inquiet et méfiant, dans le véhicule de la police - l’image de sa mère et de ses frères se reflète dans la vitre - après son arrestation par la police israélienne qui le soupçonne d’avoir participé à des jets de pierres durant les affrontements de Silwan, à Jérusalem-Est, le 26 décembre.


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    L’oncle d’Ahmad Daana le retient par la main alors que la police israélienne l’arrête.


    (JPG)

    De jeunes Palestiniens lancent des pierres sur la police israélienne à Silwan, dans Jérusalem-Est (illégalement occupée puis annexée par Israël - ndt), le 26 décembre, alors qu’Israël déploie de nouvelles forces de police et des policiers anti-émeute près de la colonie juive de Beit Yonathan.


    (JPG)

    La police israélienne arrête Ahmad.

    Rapport hebdomadaire pour la période du 23 au 29 décembre 2010 : PCHR - traduction : JPP


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