• Accusés d’avoir incendié le Centre de rétention (CRA) de Vincennes le 22 juin 2008, dix sans-papiers ont été condamnés le 17 mars par la 16ème Chambre correctionnelle du Tribunal de grande instance de Paris à des peines de 8 mois à 3 ans de prison ferme. Ainsi qu’à verser des dommages et intérêts aux flics du CRA. Retour sur un procès où la justice se rend –dans tous les sens du terme– devant la police et l’Etat.

    Procès des inculpés de Vincennes : « Dans le monde réellement renversé », le parquet est sur le siège

    samedi 3 avril 2010, par Antimollusques

    Relevé dans la section « Rectificatifs et précisions » de la version électronique du journal Le Monde :

    « Justice. Le titre de l’article sur le procès de l’incendie du centre de rétention de Vincennes était incomplet (Le Monde du 9 février). Il aurait fallu écrire ‘Le procès des dix incendiaires présumés du centre de rétention de Vincennes a viré au fiasco’ plutôt que ‘Le procès des incendiaires du centre de rétention de Vincennes…’ » [1]

    Les nouvelles du monde renversé
     [2]

    Faire le choix d’assister à un procès procède de l’attitude que l’on peut avoir par rapport à l’existence : même si on en connaît l’issue, on y participe quand même. Les condamnations qui ont frappé les dix sans-papiers soupçonnés d’avoir mis le feu au Centre de rétention administrative de Vincennes sont, en ce sens, plus une confirmation qu’un démenti de ce qui était attendu : « Dans le monde réellement renversé, le vrai est un moment du faux. » [3]

    Quand on se rend dans un tribunal, on perçoit très vite l’oscillation entre ces deux dimensions – le vrai et le faux. Il y a là, également, quelque chose de l’ordre du chevauchement entre le Réel, le Symbolique et l’Imaginaire [4]. Le Symbolique, dans l’institution judiciaire, pourrait se donner à voir dans la place de chaque protagoniste – que cette place s’incarne dans la prise de parole ou dans le placement de chacun dans l’enceinte du palais et dans la salle d’audience [5], la nature de la condamnation ; et l’Imaginaire, on peut le trouver dans toutes ces paroles entendues dans le public lors des audiences – les représentations que chacun se fait de la Justice, de son fonctionnement supposé, ou dans les auditions des plaignants (les flics du CRA, donc) quand ils parlent des prévenus. Le Réel ? Cette drôle de sensation quand disparaît par la porte du box vitré un prévenu, préalablement menotté par deux gendarmes.

    Et puis, lié à ces dimensions qui s’imbriquent, le discours produit par et dans l’institution judiciaire : «  Je suppose que dans toute société la production du discours est à la fois contrôlée, sélectionnée, organisée et redistribuée par un certain nombre de procédures qui ont pour rôle d’en conjurer les pouvoirs et les dangers, d’en maîtriser l’événement aléatoire, d’en esquiver la lourde, la redoutable matérialité. » [6]

    Rappel des faits :

    « Le centre de rétention [administrative] de Vincennes était à l’époque le plus grand de France, séparé en deux bâtiments (CRA 1 et CRA 2) de 140 places chacun. Le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) prévoit à son article R 553-3 que les centres ne dépassent pas une capacité de 140 places. Malgré l’artifice juridique qui consiste à faire croire qu’il y avait à Vincennes deux centres distincts, on était bien face à un centre de rétention de 280 places, bien au-delà du nombre de places prescrites par la réglementation.

    Les constats effectués par la Cimade, seule association qui était autorisée à entrer en centre de rétention avant janvier 2010, ne laissent aucun doute à ce sujet : ‘Il s’agit de la même gestion de police, un seul commandant secondé d’un capitaine, un bureau unique qui centralise les dossiers, les mêmes escortes, le même service médical…’ [7] L’association dénonce par ailleurs l’agencement du centre : ‘Sa configuration spatiale, l’exiguïté des locaux, le peu d’espace de promenade, le contact humain réduit à l’extrême, les guérites de surveillance, la multitude des caméras, les rouleaux de barbelés posés en double transforment Vincennes en un véritable camp de rétention.’ [8] » [9]

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    « Monsieur Souli, ressortissant tunisien, placé en rétention en vu de son renvoi, est décédé dans le CRA de Vincennes, le 21 juin 2008. D’après les témoignages recueillis [10], le 20 juin, il aurait demandé à aller à l’hôpital, les policiers l’auraient emmené voir l’infirmier qui lui aurait affirmé qu’il était en bonne santé. Il n’aurait pas dormi de la nuit et aurait commencé à crier de douleur le matin du 21 juin. A 15 h, il ne se réveillera pas de sa sieste. Pourtant, les autorités ne feront rien pour chercher et informer ses proches. Le fils de Monsieur Souli n’a appris le décès de son père que quatre mois plus tard, la mère de l’enfant a porté plainte pour ‘rétention d’information, homicide involontaire par manquement aux obligations de sécurité, et omission de porter secours’ [11]. Les conditions du décès de Monsieur Souli ne sont toujours pas connues bien qu’une autopsie ait été diligentée en France ainsi qu’en Tunisie où le corps a été rapatrié mais seulement des conclusions lacunaires ont été transmises [12]. » [13]

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    « Une marche silencieuse en mémoire de Monsieur Souli fût organisée par les détenus, le 22 juin 2008, en début d’après midi. D’après certains témoignages [14], au CRA 2, la marche a été interrompue par les services de police qui auraient essayé de faire rentrer les détenus dans leurs chambres et auraient gazé les plus virulents. La tension serait alors montée d’un cran. Les détenus seraient rentrés dans leurs chambres mais en seraient sortis avec des matelas. Au même instant, toujours d’après les témoignages, les policiers se seraient dirigés en masse vers le CRA 1 puisque apparemment, une révolte était également en cours. Selon certains témoins, le gros de la révolte – et de la répression – aurait eu lieu au CRA 1. Les témoins du CRA 2 affirment qu’ils pouvaient sentir l’odeur des gaz lacrymogènes et entendre les cris venir du CRA 1 [15]. Des témoignages venant du CRA 1 affirment que des policiers ont frappé et gazé plusieurs détenus qui étaient dans leur chambre [16]. La tension aurait encore augmenté. Puis, il y a eu le feu […] »

    Chronologie des audiences, les faits saillants [17] :

    Trois demi-journées d’audience étaient initialement prévues, soit les 25, 26 et 27 février. Six demi-journées ont été ajoutées au procès, soit les 1er, 2, 3, 8, 9 et 10 février, suite à la demande de renvoi formulée par la défense. Dans les faits, la dernière journée d’audience s’est déroulée le 9 février, la défense ayant déserté le tribunal lors de la quatrième journée après le refus des magistrats du siège de prendre en compte la demande en nullité de l’ordonnance de renvoi – demande formulée par la défense. [18]

    À l’ouverture du procès le 25 février, sur les dix accusés, deux sont sous mandat d’arrêt (recherchés par la police), six se présentent libres lors de la première audience, un comparaît détenu. Ils ont tous effectué de la détention provisoire (un an en moyenne).

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    Jour 1 25 février : L’audience commence avec deux heures de retard à la 31ème chambre du TGI, l’un des prévenus ayant été arrêté le matin dans Paris, suite à un contrôle d’identité. Un autre prévenu reconnaît la présidente Dutartre, qui l’avait déjà jugé dans une affaire en 2005. Son avocate demande à ce que la présidente se dessaisisse du dossier au motif du soupçon de non-impartialité.

    Jour 2 26 février : La présidente ne se dessaisit pas du dossier. L’avocate du prévenu qui a déjà été jugé par la présidente Dutartre annonce qu’elle présente une demande de récusation auprès du président de la Cour d’appel de Paris.

    Jour 3 27 février : Rejet par la cour d’appel de la demande de récusation présentée par l’avocate [19]. Présentation des demandes d’ordre procédural par la défense qui questionne les modalités de l’instruction (à charge) [20]. Décision par le tribunal du prolongement des débats et du visionnage de l’intégralité de vidéosurveillance. Remise en liberté du seul prévenu qui comparaissait détenu.

    Jour 4 1er février : 16ème chambre du TGI. Absence des prévenus. La défense quitte le procès suite au refus du tribunal de répondre favorablement à la demande en nullité de l’ordonnance de renvoi. Visionnage des bandes de vidéosurveillance.

    Jour 52 février : La défense a sollicité l’intervention du vice-bâtonnier au sujet de la fixation par le tribunal du nouveau calendrier des débats. Nouveau refus essuyé par la défense suite à ses demandes : elle quitte la salle d’audience, définitivement. Reprise du visionnage des bandes de vidéosurveillance.

    Jour 6 3 février : Visionnage des bandes de vidéosurveillance.

    Jour 7 8 février : Rappel du contexte de l’affaire par la présidente. Pour chaque prévenu, sont présentés par la présidente : les chefs d’accusation dont ils relèvent (dégradations et/ou destruction par incendie et/ou violences volontaires sur des fonctionnaires de police), l’ensemble de leurs déclarations au sujet de l’affaire, leurs réponses quant à la question de leurs conditions de rétention, la vérification éventuelle de déclarations de certains prévenus concernant leur état de santé auprès des services médicaux du CRA notamment. Lecture des dépositions des fonctionnaires de police. Lecture d’une audition d’un retenu (à charge contre les prévenus). Lecture des « éléments de personnalité » des prévenus, soit le détail de leur éventuel casier judiciaire. Auditions de trois plaignants.

    Jour 8 9 février : Lecture des auditions – lors de l’instruction – de deux sénateurs [21]. Plaidoirie de l’avocate des plaignants. Plaidoirie de l’avocate du Trésor Public. Réquisitoire du procureur Flam. Entre six mois et trois ans ferme sont requis pour les prévenus.

    Jour 9 17 mars : Annonce du verdict. Tous les prévenus sont reconnus coupables. Ils sont condamnés à des peines comprises entre huit mois et trois ans de prison ferme. Ils doivent également verser des dommages et intérêts aux plaignants.

    Des accusés, on ne sait rien

    Lors du procès, il y a les prévenus, les plaignants, les avocats [22], les gendarmes et les flics en civil, les magistrats, un interprète, les familles et les proches des prévenus, le public, les journalistes.

    Il y a eu certes en périphérie de l’audience un article de L’Humanité en juin 2009 consacré à l’un des prévenus [23] ou l’évocation de la rencontre fortuite au CRA de Vincennes entre celui-ci et le sénateur apparenté communiste Brard – évocation faite pendant le procès lors de la lecture de l’audition du sénateur au moment de l’instruction [24] ; des accusés, on ne sait rien. Comme l’ont relevé plusieurs avocats de la défense lors de la troisième journée d’audience, aucune « enquête de personnalité » n’a été versée au dossier lors de l’instruction. Le premier jour, c’est de façon presque involontaire que l’on en apprend indirectement un peu plus sur les accusés, enfin sur l’un d’entre eux. En effet, un des prévenus reconnaît la présidente Dutartre qui l’avait déjà jugé en 2005.

    Le prévenu est donc défini par l’institution judiciaire ; il n’existe ainsi que dans l’histoire juridique. Lors de la troisième journée d’audience où la défense s’est appliquée à questionner les modalités de l’instruction (à charge) – en d’autres termes, la défense s’est engagée dans une stratégie procédurale –, on a appris qu’un des prévenus – celui qui avait déjà été jugé par la juge Dutartre – avait une famille, des enfants, « qu’[il] n’en pouvai[t] plus ». Comment l’a-t-on su ? Parce qu’il a pris la parole, une ou deux fois, depuis le banc des prévenus, sans y avoir au préalable « été invité » à le faire par le tribunal. Sa prise de parole a été évidemment de courte durée puisque la présidente a menacé de le faire sortir. On a entendu sa compagne, également, s’exprimant depuis le banc du public, mentionnant leurs enfants à la présidente qui a de nouveau menacé de la dégager de la salle d’audience. L’institution fixe et détermine les règles du je.

    Le récit de leur propre histoire nié, c’est par d’autres biais que les prévenus sont définis par l’institution judiciaire. Lors de la septième journée d’audience, la présidente a lu les « éléments de personnalité » des prévenus. Qu’est-ce qu’un « élément de personnalité » pour la justice ? L’absence ou pas de casier judiciaire. Le prévenu n’est défini que par l’institution elle-même. En tant que prévenu, on ne se présente pas (à part pour faire référence à son état civil et à sa domiciliation), on est présenté par, voire représenté – et encore, ce sont les intérêts du prévenu qui sont représentés. Le seul statut qui soit accordé au prévenu, c’est au mieux celui de client. Dans l’histoire, les dix prévenus ne sont pas sujets mais objets [25]. S’agissant de la présentation du prévenu par lui-même, on peut noter que celle-ci dépend toujours de la validation in fine de l’institution judiciaire, par exemple lors de l’instruction : à propos de l’un des prévenus, la présidente dit « Monsieur X. qui se dit Y. ».

    Défini par son rapport à l’institution judiciaire (casier ou pas), le prévenu est défini également par d’éventuelles pathologies psychiatriques. Ce sont son casier et ses médicaments qui vont dire quelque chose de lui. Lors de la septième journée d’audience, la présidente a lu les déclarations des prévenus lors de leur garde à vue et de l’instruction. Certains ont mentionné des traitements pour dépression, des traitements au Subutex, des sevrages involontaires au Deroxat, des grèves de la faim.

    À propos de l’argument avancé par le prévenu au sujet de l’arrêt d’un traitement au Deroxat (un antidépresseur) qui aurait influencé son comportement, le procureur – lors de son réquisitoire – avance que le prévenu « n’a pas de dossier médical qui indiquerait qu’il était traité avec ce médicament et qu’après vérification, un sevrage au Deroxat n’entraîne pas ce genre de conséquences ». Le procureur ajoute : « Il n’avait pas l’air particulièrement mal sur les photos, il n’avait aucune raison médicale de faire ça. » De plus, selon un rapport qui a été révélé lors de l’audience du 8 février, un des prévenus a fait plusieurs tentatives de suicide en détention. Le 11 août 2008, un surveillant avait découvert le prévenu « les pieds et les mains pendants ». Il s’était mutilé au niveau du visage, des bras et du cou. Il avait avalé des lames de rasoir avec du shampooing.

    En creux, apparaît également la question de la prise en compte des pathologies psychiatriques par l’institution judiciaire, et plus précisément de sa non prise en compte. La « vérification » évoquée par le procureur dans son réquisitoire du «  genre de conséquences » entraînées par un sevrage aux antidépresseurs n’a pas été développée davantage. De la « vérification », on ne connaîtra rien, du «  genre de conséquences » non plus. Et pour juger de la nature de la maladie et de ses conséquences éventuelles, il y a « les photos ». [26]

    Du prévenu qui a fait plusieurs tentatives de suicide en détention, le procureur mentionne en préambule de la peine qu’il demande à son encontre : « Le plus jeune, assez fragile. Il voulait rentrer chez lui, ça prouve qu’il a acquis la maturité. » [27]

    De la violence structurelle, on en sait plus

    Les mécanismes de négation de l’individu/prévenu à l’œuvre dans l’institution judiciaire participent d’une violence institutionnelle qui trouve ses voies d’expression dans et hors de la salle d’audience. Si le prévenu ne peut librement accéder à la parole dans le cadre du procès et se définir hors du cadre de la médiation rémunérée de l’avocat et de la lecture que fait de lui l’institution judiciaire via la consultation du casier ou de rapports médicaux, il s’agit également pour l’État d’exercer son pouvoir de coercition par le contrôle de tous ceux qui viendrait le soutenir à un moment particulier de son histoire. Pour dire les choses autrement, la présence policière lors des audiences produit plusieurs signes : le pouvoir et l’ordre se manifestent.

    Lors de la première journée d’audience, environ 200 personnes étaient venues assister au procès. Le dispositif d’accès à la salle d’audience était à ce titre intéressant : passage d’un portique sous l’œil des gendarmes et filtrage des entrées du public. «  Sont rentrés les avocats, les journalistes et les invités (sic). » Les gens qui n’ont pas pu entrer (c’est-à-dire presque tout le monde) crient : « Pas de justice à huis clos », et ce sont une cinquantaine de gendarmes qui encadrent le hall desservant les salles d’audience. À la fin de l’audience, le public est bloqué par les gendarmes dans le palais, personne ne peut sortir. La seule sortie possible : le quai des Orfèvres, mais après filtrage par les gendarmes présents également sur le quai. Les gendarmes prennent leur temps et se marrent.

    La deuxième journée, les gendarmes sont plus nombreux que la veille. À la fin de l’audience, une cinquantaine de personnes est encerclée dans le grand hall par les gendarmes. Les deux minutes du chant « liberté pour les sans-papiers » entonné par les gens sont, pour les gendarmes, un désordre caractérisé (« la lourde, la redoutable matérialité » d’un discours dont parlait Foucault). Ils poussent le groupe vers la sortie ; un monsieur se fait sortir, les gendarmes se font un plaisir de le foutre à terre, puis le refourguent sur le trottoir.

    Irène Terrel, l’une des avocates, qui était dans le grand hall à ce moment là, demande des explications à l’un des gendarmes. Si les gens ont été très gentiment repoussés vers la sortie, c’est parce qu’ « il y avait des gens qui avaient des comportements provocants (sic) ». Quelqu’un précise que la « provocation » réside peut-être dans la présence de flics en surnombre. On apprend le lendemain que le monsieur qui s’était fait sortir a été arrêté.

    La troisième journée, après des heures d’audience, les gens ont envie d’aller aux toilettes et profitent de la suspension de l’audience pour tenter de s’y rendre. À la sortie de la salle, une soixantaine de gendarmes bloquent tous les accès aux différents couloirs. À moins de sortir quai des Orfèvres, de pisser dans cette rue prestigieuse, et ce en bonne compagnie, et donc de ne plus avoir accès à la salle d’audience, il est impossible de se vider la vessie.

    Des gens gueulent, les gendarmes jouissent de ce petit pouvoir. Le contrôle des corps dans ce qu’il peut avoir de plus impétueux s’exerce alors à plein. Pisser ou assister aux audiences. À la fin de la séance où l’on apprend la libération du seul prévenu qui comparaissait détenu, une partie du public (une trentaine de personnes) se retrouve quai des Orfèvres (seule sortie possible). Ça discute, ça s’embrasse ; ça s’émeut de savoir que ce soir, tard, le gars sera dehors. Ça discute, ça s’embrasse, ça s’émeut ; ça n’est pas possible pour les flics. En moins de cinq minutes, huit cars de CRS débarquent le long du quai. En sortent des flics, matraques et lacrymos bien en main, bien en vue. Dans le registre du contrôle, tant l’humiliation que les vexations multiples et le quadrillage du moindre mètre carré de trottoir ont été appliqués dans ce procès. Une vieille dame, canne en main, traversant le passage clouté : « Y m’font peur ces policiers. »

    Le quatrième jour, le procès – qui s’était ouvert dans la 31ème chambre – se tient dans la 16ème chambre correctionnelle du tribunal : alors que la première disposait d’une quarantaine de places pour le public, la seconde n’en compte que vingt-cinq. Si la « publicité des débats » se heurte à une conception très étroite de l’espace dans lequel ont lieu les audiences, elle s’arrête à la porte des chambres correctionnelles. Sauf cas de huis clos, toute personne doit pouvoir accéder librement à une salle d’audience. Au motif fallacieux d’un contrôle de l’identité des témoins, les gendarmes en poste devant la 16ème chambre demandent leurs papiers aux personnes souhaitant assister à l’audience. Des contrôles d’identité sont également effectués lors de la sortie du public, après le départ des avocats de la défense.

    Comme les jours précédents, les débats doivent commencer à 13 h 30. Afin de permettre leur déroulement, d’autres affaires qui devaient être jugées dans la 16ème chambre sont renvoyées (reportées, donc). Pour ces affaires, ne sont présents généralement que les prévenus, les parties civiles et leurs avocats. Des personnes venues assister au procès de Vincennes essaient d’entrer dans la salle d’audience avant 13 h 30 – ce qui est théoriquement possible puisque les affaires ne sont pas jugées à huis clos. Sauf que lors de la septième et de la huitième journée d’audience, ces personnes se voient refuser l’accès à la chambre : « On a des consignes, on nous a demandé de ne faire entrer que les personnes qui doivent comparaître », selon les gendarmes en poste devant la 16ème chambre. Le public devra donc attendre que « on » accepte de le faire entrer – ce qui sera finalement fait cinq minutes avant le début des audiences.

    Lors du verdict, alors que la présidente entame la lecture du délibéré d’une voix extrêmement basse, une dame – d’un âge honorable –, présente dans le public, dit : « Je n’entends rien », et demande à la présidente de parler plus fort. La présidente lui réplique : « Madame, vous sortez ! » [28]. Des gendarmes entourent alors la dame qui explique que « c’est au nom du peuple français que la justice est rendue ». À peine sa phrase terminée, elle se fait sortir par au moins trois gendarmes [29].

    Dans le dispositif de contrôle mis en place autour du procès, on peut mentionner également la présence, aux côtés des gendarmes, de flics en civil. Patauds, en casquette et bombers, dans les escaliers, sur les bancs contigus aux salles d’audience, contre les barrières délimitant une sorte d’antichambre aux correctionnelles, dans la salle d’audience près des portes, dans la salle d’audience sur les bancs. Un outil supplémentaire dans le dispositif d’intimidation mis en place par l’État pour accueillir au mieux toutes les personnes susceptibles de s’intéresser un peu à ce procès [30].

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    « Raconter d’une autre manière pour finalement raconter autre chose », Jean-Luc Godard

    Pourquoi cette référence au monsieur ? Eh bien parce qu’il énonce ici, dans une interview réalisée en 1972 au sujet de son film Tout va bien  [31], quelque chose d’assez essentiel : comment dire la lutte ? Plus précisément, comment dire les gens qui luttent dans le cadre d’un lieu qui est déjà le produit d’une mise en scène ? Godard parlait de son film qui traitait d’une grève dans une usine. Où il est question de rapports de forces dans une «  France mise en scène par Pompidou et Marcellin ». Les « exploités » représentés dans la classe ouvrière dont parle Godard ont un droit à la parole très limité – en termes de fréquence de l’accès à la parole publique. Et quand ils sont interviewés par des journalistes, c’est la forme même de cette invitation très ponctuelle à la prise de parole qui est problématique. Car, comme le souligne fort justement Godard : «  Qui peut répondre ayant eu la bouche cousue ? »

    Dans le cas du procès du CRA, la France, et plus précisément sa politique migratoire et judiciaire, est mise en scène par un pouvoir tout aussi réactionnaire. Le rapport de forces qui se joue au procès du CRA, le langage utilisé pour raconter ce qui s’y passe, la « mise en scène » du procès peuvent être analysés à la lumière des questions posées par Godard.

    Le rapport de forces s’incarne par exemple dans les mots utilisés : Vincennes n’est pas une prison pour étrangers sans-papiers mais un centre de rétention administrative. La violence d’État procède – entre autres choses – du recours à l’euphémisation, telle que décrite par Éric Hazan dans LQR : la propagande du quotidien [32]. À ce propos, il est intéressant de relever le mode de qualification du statut des prévenus et du CRA par l’avocate des plaignants lors de sa plaidoirie :

    « Les mesures ne sont pas celles d’une prison. Oui, l’enfermement, mais à part ça ? » L’avocate poursuit : «  Les retenus ont un nécessaire de toilette à l’arrivée, ils ont des droits, il y a quand même des visites, ils s’échangent des cigarettes, des portables, des briquets voire des allumettes. […] Les portables sont autorisés, les Playstations sont autorisées, les fonctionnaires de police ont une présence réduite au strict minimum. Les retenus bougent [car] il faut éviter un ressenti d’agression. »

    Lors de la révolte au CRA, on a pu voir sur les vidéos une trentaine de flics se planquer dans une sorte de cube grillagé en extérieur, ce qui fait dire à l’avocate : « Quand les policiers sont dans la grille, c’est comme s’ils étaient du côté de l’emprisonnement, de l’enfermement. »

    Douce lutte à sens unique pour le monopole de la définition de la violence dans un tribunal… L’imposition de l’ordre par la production des mots et de leur définition procède par un renversement des places de chacun dans le discours du pouvoir. A l’image de la thématique shakespearienne du «  world turned upside down » (le monde renversé), ici c’est mot et monde (word and world) qui sont inversés/renversés de façon concomitante. Dans la bouche de l’avocate des flics, cela donne très exactement ceci :

    « On a beaucoup parlé de la détresse des retenus mais on n’a pas parlé de la détresse des fonctionnaires de police […] Ils sont là pour aider les retenus étrangers, laisser passer des cigarettes, expliquer la Cimade (sic). Ils ont un rôle social et humanitaire. Ils sont là pour rassurer [les détenus]. »

    Le monde renversé dans les mots pour mieux le maintenir en l’état, version avocate du Trésor Public lors de sa plaidoirie : « La situation difficile des fonctionnaires de police qui appliquent la loi dans des circonstances difficiles à supporter. » Selon elle, les flics «  viennent là en soutien ». « Leur mission est d’être à l’écoute, de rendre les choses les moins difficiles possible. » Aussi, « ils ont le soutien de cet État qui n’est pas la société mais un organisme qui les emploie ». Elle poursuit : « L’État est un organisme social. » [33]

    Ici, ce sont les gardiens « employés par un organisme social » qui doivent obtenir réparation dans un entre-soi tout à fait confortable – entre gardiens du statu quo en général [34] : gendarmes des plus prévenants avec les parties civiles [35], éclats de rire entre leurs avocates et le procureur pendant les suspensions d’audience, réquisitoire et jugement leur étant largement favorable.

    Réquisitoire et jugement qui s’appuient notamment sur ce relevé des blessures des flics, énoncé par leur avocate lors de sa plaidoirie :

    - « fracture du gros orteil – 5 jours d’ITT »
    - « entorse bénigne du genou gauche et inhalations de fumées »
    - « [une plaignante] tirée par les cheveux – trois semaines d’arrêt de travail, mais elle est allée travailler quand même »
    - «  entorse de la cheville gauche – 3 semaines d’attelle »
    - « inhalations de fumées toxiques, elle [la plaignante mentionnée dans la note n° 35] a eu la peur de sa vie, ses jambes ne répondaient plus »
    - « inhalations de fumées toxiques, il [un flic] a senti le vent venir – selon le certificat d’un ORL, il est sourd d’une oreille suite à l’exposition à des fumées toxiques »
    - « inflammation nasale diffuse »

    Réquisitoire et jugement qui s’appuient également sur la parole des flics. Parole qui évidemment n’a pas tout à fait la même valeur que celle des prévenus. L’une des plaignantes (mentionnée dans le croquignole épisode relaté dans la note n° 35) déclarait ce qui suit lors de son audition par le tribunal :

    Les détenus au CRA «  [font] [leur] vie, [leur] train-train, ils n’en font qu’à leur tête. […] On essaie d’avoir - comment ça s’appelle ? – de dialoguer (sic) […] [les détenus] étaient porteurs de briquets, ils les cachaient. Ils ont le don de pouvoir cacher des choses […] Ces gens-là [les détenus], ils ont des responsabilités, qu’ils les assument ».

    Et « ces gens-là » devront payer aux flics des dommages et intérêts au titre du pretium doloris et du préjudice moral. Combien ? De 500 et 2000 € pour le pretium [36] et 500 € pour le préjudice moral (ces sommes étant versées à chaque plaignant). [37]

    Si le maintien d’un certain ordre procède par le « renversement du monde » matérialisé dans le genre de discours décrit plus haut, il procède également, pour les gardiens du statu quo, dans la production d’un discours qui tente d’annuler toute correspondance (voire continuité) entre certaines pratiques policières présentes et passées qui ont permis à l’État français d’acquérir ses lettres de noblesse. Voici ce que dit le procureur en préambule de son réquisitoire au sujet du parallèle dressé par la défense entre les glorieuses années quarante et aujourd’hui :

    « La défense avait de façon honteuse comparé les CRA à l’univers concentrationnaire de 1942, c’est une curieuse conception de l’Histoire. […] Comparer les CRA et la justice d’aujourd’hui à ce qui pouvait exister en 1942, c’est de la manipulation, une vision de l’esprit (sic). » Ce discours de la défense est « difficile à entendre dans cette enceinte ou même ailleurs. »

    Ce discours avait été précédé par celui de l’avocate du Trésor Public qui avait insisté sur «  les excès du 22 juin et les excès de langage » : « On ne peut pas comparer certaines situations à d’autres situations. » (en d’autres termes comparer les CRA à des camps d’internement) [38].

    Il n’y a pas d’erreur judiciaire

    Lors du visionnage des bandes de vidéosurveillance – pièces présentées comme « à charge » dans le dossier, les rares personnes qui étaient présentes dans le public se sont dit : « On ne voit rien sur les vidéos, on ne reconnaît aucun des prévenus ». Il n’y a en effet aucune image de mise à feu, mais seulement des allées et venues de détenus, marchant, courant, transportant parfois des matelas, des images de fumée sortant de certaines cellules, des images de matelas en feu dans la cour extérieure. On ne voit à aucun moment un détenu allumer un feu. Et donc, spontanément, le discours des personnes présentes dans le public reprenait – volontairement ou involontairement – la logique propre à l’institution judiciaire et à l’ordre, dont elle participe. Puisque, de fait, aucune image ne permet de dire si tel ou tel prévenu est coupable, s’il y a condamnation, il s’agit d’une erreur judiciaire.

    Dans le cadre de « débats » posés par les gardiens du statu quo, ce qui se joue – au-delà de la mise en place du châtiment pour les prévenus, c’est l’intériorisation par l’observateur d’une terminologie juridique, d’une catégorisation qui est le fait du pouvoir. Penser les inculpés de Vincennes sur la partition du coupable/innocent, c’est accepter déjà ce contre quoi on croit lutter. Ce n’est pas tant la question de la présence à de telles audiences qui est problématique [39], mais bien plus l’intériorisation d’une grille de lecture fondée sur la dissociation coupable/innocent.

    Pour dire les choses autrement, quand bien même les vidéos auraient enregistré les prévenus allumant un bûcher d’enfants diabétiques et/ou jetant des barres de plutonium siglées « nique tout », la question n’est pas tant de savoir « s’ils l’ont fait ou pas », mais plutôt celle de l’existence de prisons pour étrangers en France [40].

    Le dispositif de visionnage des bandes de vidéosurveillance – huit vidéos projetées simultanément à l’écran pendant trois heures en moyenne lors des audiences – n’est en réalité qu’un épiphénomène. Disons que ce dispositif participe de l’institution judiciaire qui ne prend plus la peine d’être vraisemblable : «  Il ne suffit pas que la justice soit juste, encore faut-il qu’elle en ait l’apparence. » [41]

    La question d’un procès politique a été évoquée. Certains des avocats de la défense, lors des premières audiences, l’ont souligné dans leurs interventions. Certes, le procès est politique, mais à qui les avocats adressent-ils leur discours ? Au tribunal ? Le motif politique, si juste soit-il, est irrecevable par l’institution judiciaire. Plus probablement, le discours des avocats de la défense est adressé à leurs clients, ou plus précisément aux associations qui versent les honoraires [42], et aux journalistes présents les premiers jours (et qui ont très modestement relayé ce discours). Le voile esthétisant de la fonction d’avocat confère à ses détenteurs un droit au micro et une probité nécessairement exemplaires.

    Il suffit de se promener dans les tribunaux pour comprendre que parler de procès politiques revient à énoncer un pléonasme. Certes, le procès du CRA est inédit par la nature de l’objet jugé, symbolique dans son déroulement et dans le jugement qui le conclut. Mais un passage par les comparutions immédiates et les comparutions sur reconnaissance préalable de culpabilité – jugées à quelques pas de la chambre où se déroulait le procès du CRA – amène à penser que la notion de procès politique est très extensive. Sont jugées dans ce cadre – sorte de sous-produit ou de quintessence de l’institution judiciaire – les classes populaires qui ramassent cher en quelques minutes.

    Alors ? Alors il faut raconter, autrement. Autrement que les traditionnelles : « De nombreuses suspensions ont à nouveau émaillé cette audience, dues à l’agitation du public. » [43]

    Ce qu’il reste, c’est le Réel, le Réel qui est «  ou la totalité, ou l’instant évanoui… » [44]

    Notes

    [1] Extrait de la section « Rectificatifs et précisions » disponible sur le site Internet du Monde, daté du 19 février 2010. Le terme « présumés » est souligné par moi.

     

     

    [2] Par l’ami Thibautcho, daté du 06/05/08.

    [3] Guy Debord, La Société du Spectacle, 1967.

    [4] Selon la terminologie empruntée à Lacan. Voir ICI.

    [5] Notamment la place des forces de l’ordre au moment du procès et l’application par elles de dispositifs d’intimidation et de vexation sous la forme de contrôles du public venu assister aux audiences. Ce point sera développé un peu plus loin dans le texte.

    [6] Michel Foucault, L’ordre du discours, Gallimard, Paris, 2005, pp.10-11.

    [7] Rapport 2007, Centres et locaux de rétention administrative, p.153, La Cimade. Rapport téléchargeable sur le site de la Cimade, ICI.

    [8] Rapport 2007, Centres et locaux de rétention administrative, p.153, La Cimade. Rapport téléchargeable sur le site de la Cimade, ICI.

    [9] Extrait de la présentation des faits réalisée par Migreurop, réseau qui regroupe 41 associations travaillant autour des questions de la migration et des droits humains. Voir ICI leur site, extrêmement bien documenté.

    [10] Source, ICI, page 2.

    [11] Source ICI.

    [12] Source ICI.

    [13] Extrait de la présentation des faits réalisée par Migreurop, à consulter LA.

    [14] A lire iCI.

    [15] Les témoignages sont consultables LA, page 3.

    [16] A lire ICI, page 4.

    [17] Pour le détail des audiences, on peut se référer aux comptes-rendus de Migreurop et/ou à ceux que j’ai réalisés sur mon blog.

    [18] Selon Irène Terrel, l’une des avocates de la défense, conformément à l’article 461 du Code de procédure pénale (CPP), si le tribunal souhaitait poursuivre les débats, il aurait dû, au préalable, rendre un jugement à cet effet. Or, le tribunal a fixé un nouveau calendrier par notes d’audience. Ainsi, selon Irène Terrel, il y a eu violation de l’art. 461 du CPP. Pour lire l’intégralité de la quatrième journée d’audience, ça se passe ICI.

    [19] Rejet qui lui a valu une amende de 750 €.

    [20] Tel que mentionné par les avocats de la défense lors de la troisième journée d’audience, toutes les demandes d’actes ont été refusées lors de l’instruction. En d’autres termes, il s’agit de l’accès à tous les éléments susceptibles de garantir aux prévenus un « procès équitable », tel que défini par l’article préliminaire du Code de procédure pénale (CPP - article 81) et de l’article 6 de la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH), qui prévoit les conditions d’un « procès équitable », c’est-à-dire l’accès à une « instruction à décharge ». Il s’agissait notamment de la jonction entre les dossiers Souli et l’incendie du CRA, de l’enquête de personnalité, de l’accès à l’intégralité des bandes de vidéosurveillance du CRA (une trentaine d’heures au total), des décrets, des rapports de la Cimade alertant les pouvoirs publics sur les mauvaises conditions de rétention et les risques afférents, de l’autopsie réalisée après la mort de Salem Souli, d’une expertise technique relative aux normes de sécurité dans le CRA. Selon l’un des avocats de la défense : «  Le tribunal ne peut pas statuer sur une instruction qui n’existe pas ».

    [21] Il s’agit en l’occurrence des auditions de Jean-Pierre Brard, ex-maire de Montreuil (93), actuel sénateur apparenté communiste de la Seine-Saint-Denis, et de Jean Desessard, sénateur Verts. Voici les témoignages qu’ils ont livré lors de l’instruction : Brard est entendu le 29 janvier 2009 par le juge d’instruction. Le 21 juin 2008, « [il] [se] ren[d] au CRA de Vincennes suite au décès du retenu tunisien et rencontre le substitut du procureur. Un Malien [lui] donne [alors] des documents. » Le 22 juin, « [il] reçoi[t] un appel de RESF [l]’ informant que le CRA est en flammes. [Il] [s]’y [est] rendu, [a] pénétré dans le centre. [il voulait passer un appel depuis son téléphone] mais [son] portable [lui] a fait défaut. Un retenu [l’un des prévenus pour lequel Brard témoigne] était en ligne avec sa femme. Elle a voulu qu’[il] intervienne. […] » En gros, Brard explique que le retenu était calme malgré l’incendie et qu’il imagine mal comment quelqu’un qui aurait été l’auteur d’un tel acte aurait pu être aussi détendu à ce moment-là. Brard précise dans son témoignage que ce n’est pas la première fois qu’il visite le CRA.
    S’agissant de Jean Desessard : « Dans le cadre de [son] mandat », le sénateur Desessard a visité la zone d’attente de Roissy, les CRA du Mesnil-Amelot et de Satolas. Quinze jours avant l’incendie du CRA de Vincennes, il s’est rendu sur les lieux. Il a ressenti une «  tension importante, une violence palpable ». « De retour à [son] domicile, [il] [a] été anéanti pendant deux heures » par ce qu’il avait vu à Vincennes. Il a noté de « l’agressivité [existant] entre les retenus eux-mêmes » et précise dans son témoignage que la question de l’éventuelle responsabilité individuelle des prévenus « doit être appréciée au regard de ces conditions explosives ».

    [22] Notons que l’État s’est constitué partie civile la veille du week-end précédant le début du procès. L’avocate représente lors des audiences le Trésor Public.

    [23] Article intitulé Le chemin de croix de Moïse Diakité, daté du 22 juin 2009. Il est à consulter ICI.

    [24] Voir note n°21.

    [25] Objets de l’institution judiciaire et des mass médias présents lors des premières audiences. Si les caméras se sont braquées sur eux, ce n’était évidemment pas tant pour recueillir leur récit de vie que pour en faire une image, une chose à montrer. Les prévenus sont montrables, de jolies publicités planquées pour vendre de l’info. À ce propos, une des personnes du public présente près de la salle d’audience a demandé un jour à une journaliste d’ « arrêter de filmer » les prévenus, ce à quoi la gardienne de l’éthique lui a répondu : « Oh, c’est bon, je connais mon métier. » Très bien même, en effet.

    [26] À ce sujet, notons que l’institution judiciaire convoque des « experts » quand ça l’arrange ; ou fait d’un procureur le spécialiste en tout : chimie du cerveau, sémiologie des captures d’écran vidéo servant de photos…

    [27] Ou, pour paraphraser Desproges, « au lieu de vous emmerder à lire tout Sartre, [allez au tribunal], vous avez en même temps la nausée et les mains sales ».

    [28] Ah, les joies de la parole performative… Voir l’ouvrage de J.L. Austin, Quand dire, c’est faire.

    [29] 300 kilos de muscles dans des combis bleues pour une septuagénaire, voilà une belle leçon de courage et de gestion ad hoc du risque.

    [30] Pour la petite histoire : entre un tutoiement à l’une des plaignantes et un profil aussi bas que le niveau de leurs réflexions, nos vaillants infiltrés ont réussi l’exploit de s’échanger depuis leur banc dans le public un merveilleux « Soyons T’actifs ». Ah, la subtilité des agents de liaison…

    [31] Entrevue fort éclairante, à voir ICI.

    [32] Eric Hazan, LQR (Lingua Quintae Respublicae) : la propagande du quotidien, Éditions Liber, Raisons d’agir, 2006.

    [33] Preuve que la formule de Debord au sujet du « vrai » qui est « un moment du faux » dans « le monde réellement renversé » trouve une application très directe ici : l’avocate du Trésor Public livre peut-être ici la nature même de l’État et les implications de celle-ci. La détention monopolistique du pouvoir de coercition par l’État (euphémisé et rendu « organisme social ») se maintient grâce à la rémunération des gardiens (du statu quo). Pour faire du sous-Weber, l’État, c’est l’entreprise… qui emploie les flics (et qui le revendique avec succès !).

    [34] « Né entre ces animaux féroces qu’ont pu être les hommes primitifs (à en juger d’après les hommes modernes, ce n’est pas invraisemblable), le mot de passe est justement ce à quoi non pas ‘se reconnaissent les hommes de groupe’, mais ‘se constitue le groupe’. » Extrait du Séminaire Le Symbolique, l’Imaginaire et le Réel, 8 juillet 1953, par Jacques Lacan. Ici, le mot se fait «  de passe ». La Justice en bordel dont certains seulement auraient les clés, pourquoi pas ?

    [35] L’avantage d’assister en direct live aux audiences réside par exemple dans le fait d’avoir pu s’émouvoir d’un haut fait de coopération gendarmes/police. Ça pourrait être du sous-Barbara Cartland ou un épisode de la Croisière s’amuse (avec un Famas) : l’une des plaignantes, très en verve lors de son audition pour charger les prévenus, s’est autorisée en pleine séance un baiser fougueux avec un gendarme – l’un de ceux qui procédaient aux contrôles d’identité à l’entrée de la salle d’audience. Qui a dit qu’il y avait des tensions entre la Défense et l’Intérieur ?

    [36] De quoi payer aux collègues en civil trois mille bombers avec le husky qui hurle dans le dos, seul sous la lune.

    [37] Pour l’un des plaignants, le tribunal ordonne une expertise médicale. Le rapport devra être rendu au greffe avant le 17 septembre 2010. 680 € devront être versés par le plaignant qui reçoit 500 € au titre de l’indemnité provisionnelle (non définitive donc). Dans le cas de ce plaignant, le jugement sera rendu le 18 octobre 2010 à 9 h à la 19ème chambre du tribunal correctionnel de Paris.

    [38] Je conseille au sujet de l’instrumentalisation de l’histoire par le politique l’excellent ouvrage de Nicolas Offenstadt : L’histoire bling-bling, le retour du roman national, Stock, Paris, 2009. Et plus particulièrement le chapitre intitulé « Ras le bol de Vichy ! ».

    [39] Selon moi. Néanmoins, la question s’est posée dans le public quand les avocats de la défense ont décidé de ne plus participer aux audiences.

    [40] Et de prisons tout court.

    [41] Déclaration du vice-bâtonnier sollicité par les avocats de la défense lors de la cinquième journée d’audience le 2 février 2010, consultable ICI. Illustration : lors d’une audience où étaient visionnées les bandes de vidéosurveillance, le procureur s’est installé à la place des assesseurs – la magistrature du siège ; symboliquement, le ministère public s’assied sur l’indépendance (imaginaire) du siège. Le parquet est sur le siège. Mais «  dans le monde réellement renversé »…

    [42] Après les excellents Comment draguer la catholique sur les chemins de Compostelle et Comment draguer la militante dans les réunions politiques d’Etienne Liebig, on pourrait imaginer un Comment draguer les militants sur les chemins du tribunal rédigé par l’Association des avocats spécialisés dans la niche politique.

    [43] Extrait d’un article du journal 20 Minutes intitulé « Entre huit mois et trois ans de prison ferme pour les insurgés du centre de rétention de Vincennes », daté du 17 mars 2010. Voir ICI.

    [44] Extrait du Séminaire Le Symbolique, l’Imaginaire et le Réel, 8 juillet 1953, par Jacques Lacan.


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    Les "déboulonneurs" poursuivis pour avoir "barbouillé" des panneaux publicitaires ont été relaxés vendredi par le tribunal correctionnel de Paris au nom de la "liberté d'expression".

    Les "déboulonneurs", qui prônent la "désobéissance civile" contre la publicité envahissante, considèrent que plus d'un tiers du million de panneaux publicitaires implantés sur le territoire français ne respectent pas la loi de 1979 sur la publicité extérieure et les enseignes, dont ils demandent aussi le durcissement.

    Lors de ses précédents procès - celui-ci était le 12e en quatre ans - ce collectif n'avait jamais obtenu mieux qu'une condamnation à un euro symbolique.

    La 13e chambre du tribunal correctionnel avait cette fois à juger du barbouillage de cinq panneaux publicitaires sur les Champs-Elysées le 26 janvier 2008, sur lesquels les militants avaient écrit à la peinture rouge et noire des slogans tels que "stop à la propagande" ou "trop de pub".

    En apposant leurs "messages" sur les panneaux commerciaux, les militants n'ont pas commis de "dégradation", mais ont exercé leur "liberté d'expression" qui "ne saurait constituer une infraction", a estimé dans son jugement le président du tribunal, Olivier Géron.

    A l'audience, qui s'était tenue le 19 mars, des amendes avaient été requises: 3.000 euros contre Yvan Gradis, et 300 euros contre Athur Lutz, 29 ans. Six autres militants du collectif, qui n'étaient pas poursuivis au départ, s'étaient présentés au tribunal comme "comparants volontaires", mais le ministère public avaient requis pour eux la relaxe.

    Le parquet n'a pas fait savoir immédiatement s'il comptait faire appel.


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  • Le Hindenburg du système de santé a atterri

    Chris Hedges   
    La décision de l'élu Dennis Kucinich de voter "oui" à la Chambre des Représentants dimanche dernier au projet de loi sur la réforme de santé, alors qu'il avait juré de voter contre tout projet de loi qui ne comportait pas d'option publique, est l'exemple parfait de la raison pour laquelle je ne pourrai jamais faire de politique.


    Je respecte Kucinich. Pour un homme politique, il est même ce qu'on peut trouver de mieux, mais c'est quand même un homme politique. Il faut qu'il fasse campagne pour être élu. Il lui faut trouver de l'argent. Il lui faut apaiser la machine du parti démocrate ou risquer les représailles et la défaite. Et donc, il a approuvé un projet de loi qui ne fera rien pour améliorer les souffrances de nombreux Américains, qui obligera des dizaines de millions de personnes à débourser beaucoup d'argent pour un produit défectueux et, qui finiront par rejoindre les rangs de ceux qui ne sont pas assurés.


    Les affirmations des partisans de ce projet de loi relèvent de la publicité mensongère habituelle diffusée par le secteur privé. Le projet de loi ne va pas étendre la couverture maladie à 30 millions de personnes qui n'en avaient pas, surtout que les subventions accordées par l'Etat ne seront pas versées avant 2014. Les familles qui n'ont pas les moyens de payer les cotisations élevées, les franchises et tout ce qui n'est pas remboursé, qui représentent, en général, selon les estimations, entre 15 et 18% des revenus des familles, devront se passer de couverture maladie, ce qui augmentera le nombre des personnes non assurées. Les compagnies d'assurance privées peuvent unilatéralement augmenter les prix sans plafonnement et monopoliser les marchés locaux pour écraser la concurrence. Les 1055 trillons de dollars (trillion=mille milliards) qui seront dépensés au cours des dix prochaines années impliqueront l'ajout de services de gestion administrative supplémentaires à un système déjà ingérable et finalement indéfendable.


    La malhonnêteté des leaders démocrates face à cette réalité est stupéfiante. Howard Dean, qui est médecin, déclarait récemment: "On vote sur une seule question: êtes-vous pour les compagnies d'assurance privées ou être-vous pour la population?".


    Voilà un homme (Kucinich, NDLT) qui était partisan de l'option publique et qui a aujourd'hui vendu son âme au diable.A quoi bon le soutenir, lui, ou tout autre Démocrate? Quel degré de lâcheté peuvent-ils atteindre?
    Regardez le désastre de l'assurance maladie au Massachusetts, le modèle qui va servir pour l'ensemble du pays. Une personne sur six à qui on a imposé de contracter une assurance maladie n'a pas les moyens de se soigner parce que les factures sont trop élevées, et des dizaines de milliers de personnes ont été rayées des listes des bénéficiaires des aides publiques à cause des réductions budgétaires.


    Les 45000 Américains qui meurent chaque année parce qu'ils n'ont pas les moyens de s'assurer ne seront pas sauvés par la loi fédérale. La moitié de toutes les faillites personnelles seront toujours dues à l'impossibilité d'acquitter des factures de soins de santé astronomiques. La seule bonne nouvelle, c'est que les actions et les bonus pour les dirigeants des compagnies d'assurance sont en train de grimper en flèche. Notez bien cela: il s'agit une nouvelle fois d'une victoire des seigneurs féodaux et d'une défaite des serfs.


    Les Etats-Unis dépensent deux fois plus que les autres pays industrialisés pour les soins de santé - 7129 dollars par personne – alors que 45,7 millions n'ont pas de couverture maladie et des millions d'autres ont une couverture insuffisante, ce qui veut dire que s'ils tombent gravement malades, leur traitement ne sera pas remboursé.


    14000 personnes par jour perdent aujourd'hui leur assurance maladie. Un article dans Health Affairs (magazine mensuel sur la santé, NDT) explique que si le système reste inchangé, un dollar sur les cinq dépensés par les Américains en 2017 ira à l'assurance maladie. Les frais de gestion des assurances privées s'élèvent à 31 cents pour chaque dollar consacré aux dépenses de santé. Réorganiser les prestations avec une caisse publique unique permettrait d'économiser plus de 400 millions de dollars par an, suffisamment, comme le fait remarquer l'association "Physicians for a National Health Plan" (Médecins pour un régime de santé public), pour fournir une assurance-maladie de qualité et qui couvre tout pour l'ensemble de la population.


    Ce projet de loi ne concerne donc ni le souci de réduire les dépenses publiques ni celui du bien-être de toute la population. Il vise à augmenter les profits des sociétés d'assurance aux dépens des contribuables. C'est la version industrie de la santé au renflouement de Wall St. Ce projet de loi sert à distribuer des centaines de millions d'argent public à l'industrie pharmaceutique et au secteur des assurances privées. Les quelque 3000 lobbyistes du secteur de la santé à Washington, dont les mains sales sont toutes posées sur le projet, ont une fois de plus trahi la population pour de l'argent.


    Ce projet montre une fois de plus que le changement ne viendra jamais des démocrates. Le parti est dirigé par les grands groupes privés et leur appartient. Les cinq plus grandes compagnies privées d'assurance maladie et leur association, America's Health Insurance Plans, ont dépensé en 2009 plus de 6 millions de dollars pour faire du lobbying. Pfizer, le géant mondial de l'industrie pharmaceutique, a dépensé plus de 9 millions de dollars au cours du dernier trimestre de 2008 et des trois premiers mois de 2009. Le Washington Post a révélé qu'une trentaine d'élus du Congrès des deux partis occupant des postes-clés dans les comités détiennent des parts importantes dans les compagnies privées du secteur de la santé pour un total entre 11 millions et 27 millions de dollars.


    Le directeur du président Barack Obama chargé de la santé, qui refuse d'entendre parler d'option publique, a siégé aux conseils d'administration de plusieurs groupes de services de santé privés. Et pendant que les salaires de la plupart des Américains stagnaient ou baissaient au cours de ces dix dernières années, les profits des compagnies d'assurance augmentaient de 480 %.


    Obama et les leaders du congrès ont sciemment écarté des débats les défenseurs d'une caisse unique d'assurance publique. La presse, y compris des journaux comme le New York Times, traite le mouvement pour l'assurance-maladie publique comme s'il s'agissait d'un phénomène marginal. Et les chaînes de télévision n'en parlent presque jamais. Et pourtant, entre 45 et 60 % des médecins sont favorables à une caisse d'assurance maladie unique. Entre 40 et 62 % des Américains, parmi lesquels 80% des démocrates encartés, souhaitent un système de santé universel avec une caisse d'assurance maladie unique à but non lucratif pour tous les Américains. La capacité des groupes privés à discréditer et à faire taire les revendications d'au moins la moitié de la population prouve hélas une fois de plus la capacité de notre Etat à la solde du secteur privé à verrouiller tous les débats de fond.


    Nous ne pourrons changer les choses que si nous construisons des mouvements qui s'opposeront de façon énergique et intransigeante aux démocrates et aux républicains. S'ils peuvent amener Kucinich et John Conyers, qui étaient à l'initiative de la Résolution 676 de la Chambre des représentants, un projet de loi qui visait à créer un système de sante universel public et qui aurait éliminé les compagnies privées, à voter pour cette arnaque orchestrée par les groupes privés, à quoi bon prétendre qu'il y a de la place pour nous dans ce parti?


    Et pourquoi donc devrions-nous perdre notre temps avec des groupes de libéraux dégonflés comme Moveon.org, qui a imaginé de récolter 1 million de dollars pour faire pression sur les élus démocrates de la chambre des Représentants qui avaient voté "non" au projet de loi initial, tout ça pour se rétracter au final? Que faisait, de toute façon, ce groupe soi-disant pacifiste à servir d'agent recruteur pour Obama pendant la campagne des présidentielles? Plus nous restons pieds et poings liés aux démocrates et à ces organisations progressistes en déconfiture et plus nous paraissons ridicules et impuissants.

        "Je suis prêt à écouter ce qu'a à dire la Maison Blanche, si la Maison Blanche est prête à écouter l'intérêt qu'il y a à inclure une option publique dans ce projet de loi", avait déclaré, avant de basculer, le vieux Kucinich aux émissions de radio et de télévision de Democracy Now!". "Ils peuvent le faire. Vous savez, ils sont encore en train de conclure des accords de dernière minute. Remettez l'option publique dans le projet. Et que ce soit une option solide. Donnez aux gens la possibilité de négocier vraiment leurs contrats avec les compagnies privées … en s'appuyant sur l'option publique. Mais ne dites pas aux gens que vous procédez à la réforme du système de santé si vous offrez aux compagnies d'assurance privées une place dans notre économie encore plus importante ".

    Note:
    Le dirigeable Zeppelin LZ 129 "Hindenburg" était le plus grand aéronef jamais construit. Son vol inaugural a été effectué en 1936]. Après 14 mois de service actif dédié au transport commercial de passagers, il a été détruit par un incendie le 6 mai 1937 lors de son atterrissage à Lakehurst.

    Chris Hedges écrit régulièrement pour le site: Truthdig.com. Diplômé de Harvard Divinity School, Hedges a été pendant près de vingt ans correspondant à l'étranger pour le New York Times. Il a écrit de nombreux livres, dont le dernier s'intitule: : Empire of Illusion: The End of Literacy and the Triumph of Spectacle (l'empire de l'illusion: le fin de la culture et le triomphe du spectacle) . 


    Source: www.truthdig.com ... et

    Traduction: http://blog.emceebeulogue.fr/

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  • Rapport sur les violations israéliennes des droits humains

    PCHR du 25 au 31 mars 2010


    Les Forces d’occupation israéliennes (FOI) continuent leurs agressions contre les civils palestiniens et leurs biens dans les Territoires palestiniens occupés (TPO).
     
     

    Durant cette semaine du 25 au 31 mars :

     

     

     

    • 2 frères palestiniens ont été tués par les FOI dans la bande de Gaza ;
    • 18 Palestiniens, dont 3 mineurs et un journaliste, ont été blessés par des tirs israéliens en Cisjordanie et dans la bande de Gaza ;

    * les FOI ont usé de la force pour disperser les manifestations non violentes organisées par les civils palestiniens ;

    • les FOI continuent de tirer sur les agriculteurs et les salariés dans les zones frontalières à l’intérieur de la bande de Gaza ;
    • les FOI ont mené 8 incursions dans les communautés palestiniennes en Cisjordanie, et 4 dans la bande de Gaza ;
    • elles ont arrêté 18 civils palestiniens, dont un mineur, en Cisjordanie ;
      • parmi les détenus, se trouve Abbas Zaki, membre du comité central du mouvement Fatah ;
    • Israël maintient son siège total sur les TPO et l’isolement de la bande de Gaza du monde extérieur ;
    • les troupes israéliennes stationnées sur les check-points militaires en Cisjordanie ont arrêté au moins 8 civils palestiniens, dont un mineur et une femme ;
    • Israël poursuit ses activités de colonisation en Cisjordanie et les colons israéliens leurs agressions contre les civils palestiniens et leurs biens ;
      • les FOI ont confisqué 3,5 dunums (3 500 m2) de terre à Naplouse.

    (JPG)

    La maison de Hisham al-Dgahma, qui fut démolie par les bulldozers de l’armée israélienne pendant une incursion dans le village d’‘Abassan, à l’est de Khan Younis, Bande de Gaza, le 26 mars 2010.


    Violations israéliennes recensées durant la période du 25 au 31 mars 2010

    1 - Incursions dans les zones palestiniennes et agressions contre les civils palestiniens et leurs biens en Cisjordanie et dans la bande de Gaza

    Jeudi 25 mars

    -  Incursion dans la région d’Hébron : vers minuit, les FOI pénètrent dans Dura, un village au sud-ouest d’Hébron. Elles fouillent un certain nombre de maisons et arrêtent 4 civils palestiniens, dont 3 frères :

    -   Hassan Mohammed Nasser, 30 ans,
    -   Mohammed Mohammed Nasser, 28 ans,
    -   Ussama Mohammed Nasser, 25 ans, et
    -   Sami Yousef Abu ‘Arquoub, 23 ans.

    -  Rafah : 8 h, stationnées au poste-frontière de Sofa au sud-est de Rafah, les FOI tirent sur des civils en train de récupérer des matériaux de construction à environ 150 mètres de la frontière. Naji Suleiman Abu Raida, 34 ans, est blessé par une balle à la hanche.

    -  Beit Hanoun : 13 h, du haut de leurs miradors au poste-frontière de Beit Hanoun-Erez, les FOI tirent sur Sa’id ’Abdul ’Aziz Hamdan, 15 ans, de Beit Hanoun. Alors qu’il était dans la zone tampon à plus de 100 mètres de la frontière. Il allait rejoindre ses frères en train de récupérer des matériaux de construction. Ayant pris une balle dans le pied, il est parvenu à les rejoindre. On l’a évacué en carriole tirée par un âne sur l’hôpital de Beit Lahiya.

    -  Beit Lahiya : 21 h 30, les vedettes gardes-côte font feu sur des bateaux de pêche au travail à environ 800 mètres du rivage au large de Beit Lahiya ; Hazem Ahmed al-Qar’an, 27 ans, de Deir al-Balah est sérieusement blessé par un éclat de projectile dans la tête. Son bateau est endommagé.

    Vendredi 26 mars

    -  Région de Jénine : vers 2 h du matin, l’armée entre dans la ville et dans le camp de réfugiés de Jénine, fouille des maisons et arrête 2 Palestiniens :

    -   ‘Alaa’ Ibrahim Abu Jamhour, 22 ans, et
    -   Bayan Mohammed Salah, 22 ans.

    Vers 2 h également, incursion dans le village de Bourqin, à l’ouest de Jénine, où l’armée arrête un Palestinien, Qussai Saleem Mahamid, 24 ans.

    -  Khan Yunis : 14 h 30, une unité d’infanterie pénètre à 500 mètres dans la localité de ’Abasan, à l’est de Khan Younis. Elle se heurte à un groupe de la résistance. Un peu plus tard des tanks couverts par l’aviation envahissent les lieux. Des tirs sont ciblés sur des maisons et sur certains emplacements agricoles alors que des civils et des journalistes sont là pour observer le déroulement des évènements. A 16 h 45 les FOI se replient de l’autre côté de la frontière en continuant de tirer.

    Vers 17 h, alors que des communiqués annonçaient que des gens étaient blessés, Haitham ’Abdul Hakim ’Aaref ’Arafat, 21 ans et 3 de ses amis se rendent sur les lieux pour secourir les blessés et parmi eux un de ses frères, Suliman, 20 ans. Les FOI tirent. ’Arafat et ’Abed Rabbu ’Abdullah Abu ’Anza, 18 ans sont touchés par des balles. Blessé à l’épaule ‘Anza parvient à s’enfuir. Arafat reste sur place perdant son sang. Plusieurs personnes essayent de lui porter secours mais les FOI leur tirent dessus. Fadi Mohammed Abu Hajras, 20 ans, est touché au pied. Un peu plus tard, les gens du secteur évacuent ‘Arafat à l’hôpital mais malgré tous les efforts déployés il décède à 22 h.

    4 autres civils sont blessés : Nassim Jawad Abu Daqqa, 13 ans, d’une balle dans le dos ayant touché la colonne vertébrale. Son état est sérieux ; Ra’ed Mohammed Abu Tu’aima, 35 ans, légèrement blessé par des éclats, Hassam Mohammed Abu Raida, 21 ans, et Bassam Burhom al-Daghma, 22 ans, également blessés par éclats de projectiles mais sans gravité.

    A 21 h 30, les Foi reviennent sur le secteur. Elles n’en repartiront qu’au petit jour le samedi matin après avoir détruit la maison évacuée de Hashem Ibrahim al-Daghma, un atelier de conditionnement d’œufs appartenant à Majed Abu Samra et un demi-hectare de cultures (légumes, blé, sègle,) appartenant aux familles Salem ’Atiya Abu Daqqa ; Ibrahim Salman Qudaih ; Nidal Isma’il Abu Daqqa ; et ’Obaida Mohammed Qaudaih.

    Dimanche 28 mars

    -  Région de Naplouse : vers 2 h 30, les FOI entrent dans Naplouse, fouillent des maisons et arrêtent un Palestinien, Fadi Mohammed Qanaze’, 21 ans.

    -  ’Abasan, bande de Gaza : 8 h, les FOI pénètrent à 800 mètres dans ‘Abasan. Les bulldozers nivèlent les terres précédemment défoncées et s’en vont vers 14h00.

    -  18 h, une équipe médicale trouve le corps de Suleiman ‘Abdul Hakim’Aeafat, 20 ans, résistant, membre des brigades Al-Quds - le bras armé du Jihad. L’équipe médicale avait été autorisée à se rendre sur les lieux où une confrontation avait eu lieu entre les FOI et la résistance palestinienne vendredi. Suleiman était le frère de Haitham ’Arafat tué alors qu’il recherchait son frère.

    Lundi 29 mars

    -  Khan Yunis : 10 h 30, les FOI pénètrent à 400 mètres dans l’est de Al Qarara qui jouxte la frontière à la hauteur de Khan Younis. Elles nivèlent toute la bande de terre mitoyenne qui avait été précédemment défoncée.

    Mardi 30 mars

    -  Région de Jéricho : vers 3 h du matin, incursion dans le camp de réfugiés d’‘Aqabet Jaber, au sud de Jéricho. L’armée fouille certaines maisons et convoquent deux civils palestiniens pour interrogatoire : Sobhi ‘Abdul Maqsoud, 25 ans, et Shaker Hassan ‘Amara, 50 ans.

    -  Al-Maghazi, bande de Gaza : 11 h 30, stationnées à la frontière à la hauteur du camp de réfugiés de Al Mughazi, les FOI ouvrent le feu sur une manifestation pacifique organisée par le « Comité public contre la zone tampon » quand quelques jeunes s’approchent à deux mètres de la ligne frontalière. Mohammed Hani al-Atayi, 21ans, prend une balle dans la jambe.

    -  ’Abasan : 12 h, stationnées à la frontière à la hauteur de Al Qarara et de ‘Abasan, les FOI tirent sur une manifestation pacifique regroupant des centaines de civils ; Jom’a Ramadan al-Najjar, 22 ans, prend une balle dans la tête. Walaa’ Farid al-Najjar, 19, ans une balle dans la hanche et Hani Riad al-Najjar, 17 ans, des éclats dans les deux jambes.

    -  Région de Salfit : incursion vers 18 h dans le village de Deir Estia, au nord-ouest de Salfit. L’armée arrête deux civils palestiniens, dont un mineur, à leur domicile, près de la route principale :

    -   ‘Abdul Rahim Mohammed Zaidan, 16 ans, et
    -   Mohammed ‘Abdul Qader Zaidan, 38 ans.

    Mercredi 31 mars

    -  Région de Bethléhem : vers 1 h du matin, incursion dans le camp de réfugiés d’al-‘Azza, au nord de Bethléhem. L’armée fouille des maisons et convoque 2 Palestiniens pour interrogatoire : Sami ‘Abdul Hamid al-‘Azza, 50 ans, et Majed ‘Abdul Hadi al-‘Azza, 34 ans.

    Vers 1 h 30, dans le camp de réfugiés de Deishé, au sud de Bethléhem. Raid et fouilles de maisons.

    -  Beit Hanoun : 8 h 45, du haut de leurs miradors à Beit Hanoun Erez, les FOI tirent sur des ouvriers en train de récupérer des matériaux de construction sur l’ancienne zone industrielle. Tout le monde parvient à se dégager. Pas de victime ;

    -  Khan Younis : 9 h 30, les FOI reviennent sur la partie est d’Al Qarara et poursuivent sur une largeur de 300 mètres le nivelage des terres préalablement défoncées. Elles se retirent à 13h00.


    (JPG)

    Manifestation à Betlhéhem, 28 mars, où Abbas Zaki, membre du comité central du Fatah, fut arrêté par l’occupant
    (AP)


    2 - Usage d’une force démesurée contre les manifestations non violentes

    Israël poursuit la construction du mur d’annexion à l’intérieur du territoire de la Cisjordanie. Pendant la semaine, les FOI ont continué d’utiliser la force contre les manifestations non violentes organisées par les civils palestiniens, des internationaux et des Israéliens militant pour les droits de l’homme, pour protester contre la construction du mur et la colonisation en cours. Au moins 5 civils palestiniens, dont un mineur, ont été blessés par des balles d’acier enrobées de caoutchouc, et plusieurs autres souffrent de contusions, ou de l’inhalation des gaz.

    Bil’in, à l’ouest de Ramallah : vendredi 26 mars, après la prière et comme chaque semaine, les Palestiniens, militants internationaux et israéliens organisent une manifestation non violente pour protester contre la construction du mur à Bil’in. Les manifestants se mettent en mouvement et tentent d’arriver jusqu’aux terres annexées derrière le mur. Aussitôt, les troupes d’occupation tirent à balles caoutchouc et lancent des bombes sonores et des lacrymogènes sur les manifestants. Des dizaines d’entre eux souffrent des gaz respirés, et certains d’ecchymoses suite aux coups donnés par les soldats. Les FOI arrêtent Gur Mintser, 54 ans, militant israélien.

    Ni’lin, à l’ouest de Ramallah : ce même vendredi, des civils palestiniens et des internationaux organisent la même manifestation contre le mur qui passe sur le village. Un affrontement a lieu avec les FOI positionnées à proximité du mur. Les FOI tirent à balles caoutchouc, lancent des bombes sonores et des lacrymogènes. De nombreux manifestants sont indisposés par l’inhalation des gaz. Nabi Saleh, au nord-ouest de Ramallah : ce vendredi 26 mars après la prière, même manifestation non violente contre la confiscation de terres dans le secteur de Wad al-Raya, entre Nabi Saleh et Deir Nizam. Quand les manifestants tentent de se rendre sur les terres saisies par les colons israéliens, près de la colonie Halmish, l’armée tire et lance ses grenades. 2 Palestiniens sont blessés par des balles caoutchouc :

    -   Ahmed Hussein al-Tamimi, 16 ans, blessé au visage, et
    -   ‘Ali Yousef al-Tamimi, 32 ans, blessé à la jambe droite.

    Et des dizaines d’autres manifestants souffrent de l’inhalation de gaz et de contusions.

    Bethléhem : dimanche matin, 28 mars, des civils palestiniens, des ecclésiastiques chrétiens et des militants internationaux et israéliens participent à une manifestation non violente à Bethléhem, protestant contre l’interdiction faite aux chrétiens d’entrer dans Jérusalem pour célébrer le dimanche des Rameaux. La manifestation est organisée par Holy Land Trust. Les manifestants marchent depuis l’esplanade de l’église de la Nativité en direction du passage sud vers Jérusalem. Ils se rassemblent auprès de la porte principale du passage et traversent. Ils passent également la seconde porte. Les FOI interviennent alors et agressent les manifestants, les chassant loin du passage. Elles arrêtent également 14 manifestants (10 Palestiniens et 4 internationaux et Israéliens). Les FOI libéreront ces 4 derniers quelques heures plus tard, mais gardent les Palestiniens en détention :

    -   Shareef ‘Ali Mash’al (‘Abbas Zaki), 68 ans, membre du comité central du Fatah, et du conseil central de l’OLP (Organisation de libération de la Palestine),
    -   Marwan Sha’ban Farafja, 42 ans, cadre du mouvement Fatah à Bethléhem,
    -   Ahmed Khalil al-‘Azza, 30 ans, de Holy Land Trust,
    -   Mahmoud Hussein Zawahra, 45 ans,
    -   Mohammed Jaber al-Houbani, 29 ans,
    -   Antoine Bishara Shahwan, 15 ans,
    -   FAdi Eyad Hamad, 28 ans, cameraman d’Associated Press,
    -   Shadi Fawaghra, 25 ans,
    -   Ibrahim Mohammed Salah, 50 ans, et
    -   Hassan Mohammed Braijiya, 35 ans.

    Budrus, à l’ouest de Ramallah : le mardi 30 mars, des dizaines de civils palestiniens, d’internationaux et de militants israéliens et d’autres militants pour la paix font une manifestation non violente dans le centre du village de Budrus, pour commémorer la Journée de la Terre palestinienne. Ils se dirigent vers le mur d’annexion. Aussitôt, les troupes d’occupation tirent à balles caoutchouc, et lancent leurs grenades. 3 Palestiniens, dont un journaliste, sont blessés par les balles caoutchouc :

    -   Haroun Yousef ‘Amaira, 26 ans, journaliste pour Palestine Télévision, blessé à une jambe ;
    -   ‘Adnan Ahmed Shalash, 35 ans, blessé au ventre, et
    -   Mohammed ‘Ali Marar, 45 ans, blessé dans le dos.

    De plus, de nombreux manifestants souffrent de contusions et d’avoir respiré les lacrymogènes.


    (JPG)

    Journée de la Terre dans la bande de Gaza, où un jeune Palestinien
    de 15 ans fut abattu par les Israéliens
    (AP)


    3 - Maintien du siège sur les TPO

    Israël continue son siège serré sur les TPO et les restrictions aux déplacements des Palestiniens dans la bande de Gaza et en Cisjordanie, dont Jérusalem-Est occupée.

    Bande de Gaza

    Mouvements des personnes et des biens aux postes frontière

    Rafah International

    Date  : Détails
    24 mars  : 2 Palestiniens sortent ;
    282 autres rentrent.
    25 mars  : 29 Palestiniens sortent ;
    239 autres rentrent.
    26 mars  : 1 Palestinien et le corps d’un patient décédé rentrent.
    27 mars  : 1 Palestinien sort.
    28 mars  : 1 Palestinien sort.
    29 mars  : fermé
    30 mars  : fermé

    Karm Abu Salem (Kerem Shalom)

    Date  : Importations Qté  : Exportations Qté
    24 mars  : denrées alimentaires 502 tonnes  :


     : matériel agricole 282 tonnes  :


     : denrées diverses 359 tonnes  :


     : gaz domestique 205 tonnes  :


     : fioul industriel 406 000 litres  :


     : aide humanitaire 596 tonnes  :


     :

     :

    25 mars  : denrées alimentaires 750 tonnes  : fleurs 315 000

     : matériel agricole 259 tonnes  :


     : denrées diverses 284 tonnes  :


     : gaz domestique 203 tonnes  :


     : fioul industriel 393 000 litres  :


     : aide humanitaire 796 tonnes  :


     :

     :

    28 mars  : denrées alimentaires 639 tonnes  : fleurs 228 000

     : matériel agricole 363 tonnes  :


     : denrées diverses 344 tonnes  :


     : gaz domestique 198 tonnes  :


     : fioul industriel 393 000 litres  :


     : aide humanitaire 522 tonnes  :

    Al-Mentar (Karni)

    Ouvert le 25 mars pour l’entrée de 1 560 tonnes de céréales et 1 677 tonnes d’aliments pour le bétail.

    Beit Hanoun (Erez)

    Date  :
     :
    Patients  :
     :
    Accompagn.  :
     :
    Arabes
    d’Israël
     :
     :
    Diplomates  :
     :
    Presse  :
     :
    Internat.  :
     :
    Gazaouis  :
     :
    Commerç.

     : 32  : 27  : 6  : 2  : 2  : 21  : 2  : 5

     : 42  : 42  : 6  : 7  : 7  : 58  : 0  : 1

     : 12  : 11  : 11  : 3  : 2  : 15  : 4  : 0

     : 0  : 0  : 0  : 0  : 0  : 0  : 0  : 0

     : 10  : 12  : 6  : 4  : 5  : 0  : 8  : 0

     : 0  : 0  : 0  : 0  : 0  : 0  : 0  : 0

     : 0  : 0  : 0  : 0  : 0  : 0  : 0  : 0

    Cisjordanie

    Toute la Cisjordanie est assiégée par les troupes d’occupation israéliennes. Des restrictions supplémentaires ont même été imposées cette semaine sur le territoire.

    Jérusalem : des milliers de Palestiniens de Cisjordanie et de la bande de Gaza ne peuvent toujours accéder à la cité. De nombreux check-points ont été posés dans et autour de la ville. Les restrictions sont plus serrées encore les vendredis, jours de prière pour les Palestiniens, afin de les empêcher de venir prier à la mosquée al-Aqsa, dans la vieille ville de Jérusalem-Est. Le jeudi 25 mars, le soir, les FOI renforcent leurs restrictions pour la vieille ville. Selon des témoins, des centaines d’agents de la police des frontières ont posé des check-points aux entrées de la vieille ville, sur les rues à l’intérieur et dans les environs immédiats. Le vendredi matin, 26 mars, nouvelles restrictions pour l’accès à la vieille ville et à la mosquée. Le lundi matin 29, les FOI ferment carrément Jérusalem et empêchent tous les Palestiniens de Cisjordanie d’entrer dans la ville.

    Ramallah : les troupes d’occupation positionnées aux check-points de Jaba’ et Qalandya, au sud-est de Ramallah, imposent des restrictions supplémentaires aux déplacements des Palestiniens et procèdent à des contrôles approfondis. Des check-points flottants sont aussi posés sur les routes, pour bloquer les véhicules palestiniens et permettre de les contrôler.

    Naplouse : le jeudi 25 mars, dans l’après-midi, les troupes israéliennes sur le check-point de Za’tara, au sud de Naplouse, imposent des restrictions supplémentaires sur les déplacements.

    Hébron : le jeudi 25 mars également, les FOI ferment 3 ruelles dans le quartier Jaber, dans la partie sud-est de la vieille ville d’Hébron, avec des blocs de béton, au motif de sécuriser le déplacement de colons israéliens sur la route qui relie la mosquée Ibrahimi à la colonie Kiryat Arba.

    Arrestations sur les check-points militaires

    -  Jeudi 25 mars, à midi, les soldats israéliennes positionnées près de la mosquée Ibrahimi à Hébron arrêtent 2 civils palestiniens, dont un mineur, prétendant qu’ils étaient en possession d’un couteau ; il s’agit de Saif Mohammed al-Qasrawi, 18 ans, et de Mohammed Fares al-Qasrawi, 17 ans.

    -  Même jour, dans l’après-midi, les soldats sur le check-point de Za’tara, au sud de Naplouse, arrêtent Nazem Mohammed ‘Obaid, 45 ans, du village de Yasouf, au nord-est de Salfit.

    -   Vendredi matin, 26 mars, les troupes sur le check-point d’al-Hamra, au sud de Tubas, arrêtent Salah ‘Abdul ‘Aziz Abu Rwais, 25 ans, et Ahmed Ibrahim Abu Rwais, 20 ans, du village d’al-Nassariya, au sud de la ville.

    -   Samedi matin, 27 mars, sur le check-point de Qalandya, au sud de Ramallah, l’armée arrête Salam Yousef Safi, 19 ans, une palestinienne du camp de réfugiés d’al-Am’ari, près de Ramallah, prétendant qu’elle avait tenté de donné un coup de couteau à un soldat israélien.

    -   Ce même samedi, le soir, l’armée sur le check-point d’Ennab, à l’est de Tulkarem, arrête ‘Ali Yousef Jeetawi, 33 ans, du village de Bal’a, à l’est de la ville.

    -   Dimanche soir, 28 mars, les troupes postées au passage international d’al-Karama, sur la frontière avec la Jordanie, arrêtent Ma’ath Ameen al-Ghoul, 22 ans, du camp de réfugiés d’al-Far’a, au sud de Tubas.


    4 - Activités de colonisation et agressions des colons israéliens

    La colonisation se poursuit dans les TPO en violation du droit international humanitaire, de même que les agressions des colons contre les Palestiniens et leurs biens.

    Durant cette semaine, les FOI ont publié une ordonnance militaire pour la saisie de 2,5 dunums (2 500 m2) de terres dans le village d’‘Awarta, au sud de Naplouse, pour monter un site militaire, et de 900 m2 de terre à Yanoun, au sud-est de Naplouse.

    (JPG)

    Le mur à Jérusalem-Est, ici qui traverse le quartier de Chouafat, à droite.
    (Reuters)


    (JPG) Document public

    Pour plus d’informations, veuillez consulter notre site : http://www.pchrgaza.org ou contacter le bureau du PCHR à Gaza ville par courriel : pchr@pchrgaza.org ou par téléphone, au : +972 (0)8 282 4776 - 282 5893.


     
     

    Rapport hebdomadaire pour la période du 25 au 31 mars 2010 : PCHR
    traduction pour ce qui concerne Gaza : Jacques Salles, et la Cisjordanie, JPP.

     

     


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  • Paul et moi, c’est parti pour durer

    [D’habitude, le premier avril, je ponds une grosse connerie. Et contrairement à ce que le titre pourrait suggérer, je ne vais pas faire un improbable coming-out. Désolé,  je vais seulement parler de Pôle-Emploi. C’est aussi gros que les conneries que je ponds habituellement, sauf que là tout est vrai…]

    Jamais je n’aurais pensé avoir affaire à Paul Lempois. Plus de 20 ans de travail en continu. Et puis paf, “la crise”. Dégage ! Mais, m’sieur le patron, j’ai fait le calcul, en 7 ans, je vous ai rapporté en facturation 500 000 euros de plus que vous m’avez payé !

    Ben oui, je sais (hé hé ! patron, c’est un métier !) mais j’ai pu d’sous, ouste ! Et je préfère garder les minables fielleux qui n’arrêtent pas de moucharder dans ton dos que tu as un blog politiquement incorrect et que tu l’écris même pendant les heures de boulot… Surtout qu’ils me coûtent moins cher… Allez, bonnes vacances !

    Ben oui, c’était la veille des vacances… La délicatesse est facultative, dans ce métier. Mais avec 5 mois pour retrouver du boulot, pas d’inquiétude. Car contrairement aux légendes, la législation luxembourgeoise est généreuse.

    Mais au bout des 5 mois, peau de zobi ! Makache ! Que dalle ! Des entretiens plus ou moins désespérants, une attente fiévreuse, parfois un espoir, et toujours une déception. Ben oui, on comprend vite que moins il y a de postes à pourvoir, plus il y a de chômeurs qui souhaiteraient les pourvoir. Et pour un seul poste il y a 10 candidats reçus en entretien, parmi lesquels plusieurs sont affamés et donc compréhensifs : les chances sont faibles.

    Un beau matin de janvier, je me suis donc dit : tiens, si j’allais voir Paul ? Oui, Paul Lempois, le Saint-Bernard des chômeurs ! Celui qui te permet de rester digne, propre et le cœur léger en attendant de retrouver un autre boulot. Enfin, digne et le cœur léger, j’exagère. Propre, oui, le savon n’est pas trop cher…

    Mes relations avec Paul ont plutôt bien commencé. C’est même pour cela que je n’en ai pas parlé avant.

    Inscription sur internet. Pas trop de souci pour un informaticien forcément un peu geek. Pour d’autres, c’est sûrement plus difficile. Surtout que l’accès au site relève de l’acrobatie, puisque le champ “code postal”, facétieux, disparaît avant que tu n’aies pu le saisir. Du coup j’utilise le navigateur “Konqueror” sur Linux, qui n’est certes pas mon préféré, mais qui au moins gère bien le truc. Comment font les autres ?

    Bon, l’inscription sur internet, ça consiste à générer un PDF pré-rempli, que tu dois imprimer. Enfin, si tu as une imprimante. Et de toute façon ça ne sert à rien, puisqu’en retour tu reçois par la poste un formulaire papier… vierge ! Avec une convocation, tel jour, telle heure, tel endroit. T’avais autre chose de prévu ? Oublie ! Paul est prioritaire. Et susceptible ! Si tu ne viens pas, il te vire !

    Bon, le jour dit, me voilà, costard avec les boutons neufs. Tu te rends vite compte que ça ne sert à rien, Paul est habitué aux gueux, il y en a plein la salle d’attente, il ne se formalisera pas. Entretien à l’heure dite avec la secrétaire de Paul, très administrative. Vérifie que tu as bien amené tous les papiers. Dont, très important, tes 12 derniers bulletins de salaire, qui serviront à t’indemniser (c’est le terme). Bon, tu comprendras bien vite que ton indemnisation, c’est en gros la moitié de ton salaire d’avant. Ah oui… Et puis si tu avais une voiture de société, des tickets resto, des allocs au Luxembourg, ben tu oublies. Donc valait mieux avoir un salaire confortable avant. Sinon, ben t’es dans la merde. Et si ce n’était déjà fait, c’est là que tu réalises…

    Deuxième entretien avec cette fois un monsieur qui va te demander ce que tu sais faire, rentrer tout ça dans sa machine (un PC sous Windows avec Internet Explorer, comment veux-tu que ça fonctionne correctement ?) et t’expliquer comment chercher du boulot. Si tu sais déjà, ça ne sert à rien. Si tu ne sais pas et que tu comptes sur lui pour te dégoter quelque chose, t’es encore plus dans la merde.

    Ah, ultime précision, comme tu es cadre, tu dépends désormais de l’agence “cadres”, c’est pas à Metz, c’est à Montigny…

    Bien m’sieur, merci m’sieur, au r’voir m’sieur… Il est déjà passé au suivant. Et il y a encore beaucoup de suivants derrière.

    45 minutes chrono, que ça a duré. 3 mois plus tard, je n’ai eu aucun autre contact avec un “conseiller”. J’ai un rendez-vous la semaine prochaine…

    Car ensuite, les contacts avec Paul deviennent virtuels. Il t’envoie par mail des offres d’emploi. Enfin, en ce qui me concerne il m’en a envoyé deux : l’une pour vendre des panneaux solaires au porte à porte. L’autre pour vendre des abonnements pour le compte d’un opérateur privé de gaz. Au porte à porte, aussi. Et au SMIC dans les deux cas. Je ne me souvenais pas d’avoir fait état d’un intérêt particulier pour le porte à porte. Ni pour le SMIC. Par contre je suis à peu près sûr de lui avoir fait savoir que j’étais informaticien… Paul est un farceur, voilà tout…

    Oh, tu peux aussi aller chercher sur le site de recherche d’emploi de Paul. Tu connais un site encore plus mal foutu que celui de la SNCF ? Ben y’a celui de Paul, justement. Un cauchemar. Tous les sites privés sont 1000 fois mieux faits et mieux pourvus. En plus, faut pas rêver, les salaires proposés sont généralement minables, les employeurs qui mettent une annonce par ce moyen cherchent le crevard…

    Ensuite, tu te transformes en assisté. Par exemple, tu attends fiévreusement ton premier virement. Il faut t’armer de patience… J’ai attendu un mois et demi. C’est long ! Par chance, je n’ai pas de problème d’argent. Du moins pour l’instant. Parce que j’avais un bon salaire, que je n’ai jamais cédé aux sirènes de Cetelem et que j’ai donc pu mettre un peu de pognon de côté. Et qu’en cas de besoin, SuperNonotte est là. Merci SuperNonotte.

    Mais j’ose imaginer dans quelle situation peut se retrouver un smicard chargé de famille, qui déjà en temps normal compte le moindre centime et se trouve à découvert dès le 2 du mois. La dèche totale. Car au bout d’un mois et demi, c’est le coup de massue… Évidemment il te restait quelques jours de congés payés… Ça compte pas. Mais Paul Lampois, dont tu comprends peu à peu qu’il est passablement pingre, te sucre 7 jours “de carence”. Pourquoi ? “Parce que !” Donc, après un mois et demi d’attente, tu reçois un mail de Paul qui est heureux de te faire savoir qu’il vient d’effectuer un virement de… 360 euros ! Tu ne sais plus trop si tu dois rire ou pleurer. Car tu devras encore attendre un mois le versement suivant, qui sera donc de la moitié de ton salaire… Et encore après celui de février, qui n’avait que 28 jours (ah, oui, chez Paul, l’unité, c’est le jour), je viens d’avoir celui de mars : 27 jours. Quid ?

    Paul t’écrit souvent par internet. Il est trop bon, ce Paul, si prévenant. Mais avec l’habitude, tu apprends à te méfier. Sur le mode “qu’est-ce qui va encore me tomber sur la gueule ?”. Tiens, cette fois il réclame… mes 12 derniers bulletins de salaire ! Ben oui, ceux-là même que j’ai fournis le jour de mon inscription. Paul est atteint de la maladie d’Alzheimer.

    Qu’à cela ne tienne. Toi, le nanti, tu as une photocopieuse à la maison. Le gueux, lui, va encore être emmerdé, en plus de devoir payer alors qu’il n’a plus un fifrelin. (Et que peut-être sa bagnole est en panne.) Tu envoies donc tes photocopies à l’agence des cadres. Satisfait du devoir accompli. Même si tu ne peux pas t’empêcher de penser qu’il est un peu con, ce Paul.

    Mais ce n’est évidemment pas fini. Non seulement il est frappé d’Alzheimer, mais en plus il est sérieusement bordélique. Une semaine plus tard, nouveau mail. “Je n’ai toujours pas reçu tes bulletins de salaire !”. Assorti de cette sourde menace :

    Non seulement il égare tes courriers, mais en plus il te menace ! À ce stade, il faut agir. Bon, toi qui as peut-être la chance de ne pas (encore) connaître Paul, tu te dis : “c’est pas grave ! Je vais lui expliquer son erreur et tout va rentrer dans l’ordre…”

    Ah oui, on voit bien que tu ne connais pas Paul ! Ce serait trop facile ! Car il est très occupé, Paul. Pas du genre à se laisser emmerder par une horde pleunicharde de grosses feignasses qui sont de surcroît autant de fraudeurs potentiels ! C’est pas parce qu’il a internet qu’il va te filer son mail perso ! Hors de question, tu peux pas lui écrire. Lui téléphoner, alors ? Tu rêves ! “Allez, Paul, “fais pas ta pute, file moi ton 06®”. Tss tsss… Tout juste te donnera-t-il le numéro d’un robot qui répond à sa place. Non non, pas un humain. Un inhumain, même.

    Enfin, quand il daigne répondre, car il est très souvent occupé ! En fait c’est une femme, sans doute Madame Lempois. Paulette. Paulette est très polie, mais particulièrement casse-bonbons, dure de la feuille et, il faut bien le dire, un peu stupide et soupe au lait : elle ne comprend pas bien ce que tu lui dis et te raccroche au nez. Plaf ! Va te faire foutre, sale chômeur ! Tenez, si vous voulez en savoir plus sur Paulette, allez lire ici

    Dans ces conditions, l’énervement d’avoir affaire à un robot stupide s’ajoutant à celui de devoir faire une démarche inutile et idiote (car putain, c’est vrai, tu les as déjà envoyés 2 fois, tes bulletins de salaire !), je suppose que bon nombre de téléphones finissent fracassés contre le mur. Apple, Nokia ou Samsung ne savent peut-être même pas ce qu’ils doivent à Paulette…

    Du coup, la seule solution, c’est de prendre ton courage à deux mains, ton dossier dans la troisième, de faire les 12 photocopies une fois de plus, et d’y aller. Ça tombe bien, tu es chômeur, tu n’as que ça à foutre.

    Agence de Montigny. Bien organisée, ma foi. Petite file d’attente raisonnable. Seul un vigile à l’entrée te rappelle que tu n’es pas là pour rigoler. Une dame à l’accueil t’oriente, te fait attendre qu’un “conseiller” se libère. Bien huilée, l’organisation. Mon tour vient vite, et on m’apprend que, pauv’ pomme, c’est pas ici qu’il faut que tu viennes, ça a changé, c’est à Metz ! Pas à Metz où je suis allé m’inscrire, hein, non, un autre Pôle Emploi. Ben oui, y’en a partout. Il faut dire qu’avec le succès de la formule, comparable à celui des Restos du Coeur ou d’Emmaüs, Paul pourrait même proliférer, comme une vulgaire franchise de fringues à la mode fabriquées en Chine et payées par des salaires chinois mais vendues à des prix bien européens. Mais non, il ne prolifère pas. Pire, ils n’embauche pas. Un comble, ça ferait toujours ça de chômeurs en moins, et ça aiderait les autres ! Mais vous n’y pensez pas… Nous vivons une ère libérale, cher monsieur… Tout juste Paul consent-il à sous-traiter certains dossiers… à des sociétés privées… Peu importe si ça coûte une fortune et si c’est inefficace, puisque ces boîtes, même privées, ne peuvent pas inventer des offres d’emploi qui n’existent pas…

    Bon, direction Metz. Un quartier où il est impossible de se garer gratuitement, faut bien que les chômeurs fassent vivre Monsieur Vinci et ses actionnaires gloutons… Changement de décor. La file d’attente fait plus de 20 mètres. Pas de vigile, le dernier doit être en arrêt pour surmenage. J’hallucine : il y a une seule personne à l’accueil. Et personne d’autre. Pas de “conseiller” pour traiter les dossiers, c’est le type à l’accueil qui fait tout. Et pendant ce temps, tu attends. Tu n’as pas le choix de toute façon. Et puis je te rappelle que tu n’as que ça à foutre, puisque tu es chômeur, hein ?

    Le problème, c’est qu’il y des situations compliquées. Et/ou douloureuses. Ça n’a pas raté, après quelques “clients” sans trop d’histoires, arrive une dame passablement énervée, qui commence à expliquer sa situation. Une sombre histoire de saisie sur compte bancaire. L’employé de Paul essaie tant bien que mal de garder son calme. Apparemment il ne peut rien. Elle veut voir Monsieur Untel. Il lui répète que ce n’est pas possible. Elle s’énerve. Il lui dit de se calmer. Elle l’insulte. Il lui dit de se calmer. On n’est pas censé écouter, c’est gênant, on se croirait sur TF1… Mais on est obligé d’entendre. Manifestement, elle joue sa vie. Lui, il travaille. Ça a duré une demi-heure. Il n’a rien lâché. Elle a fini par repartir, moitié sanglotant, moitié vociférant. C’était une faible femme. Si à la place il y a avait eu un mec de 120 kg aussi remonté, ça aurait fort bien pu tourner au carnage. Ne jamais oublier qu’une partie des gens qui font la queue sont des désespérés, harcelés par leur proprio, par EDF, et dans l’impossibilité de nourrir leurs gamins.

    Du coup, la file d’attente a doublé, elle s’étend désormais dans la rue. Et l’employé de Paul est déjà passé au suivant, comme si de rien n’était. Il devait travailler au SAV de Darty avant… Mon tour vient, je ne peux pas m’empêcher de lui demander si c’est tout le temps comme ça… Il confirme. Bon, et mes bulletins de salaire ? Il se gratte la tête… Cherche dans son ordi… Rien. Heu… Vous les avez sur vous ? Ben oui ! (soulagé). Bon, ben donnez-les moi, ils seront traités dans heu… quelques semaines… Je dis merci… N’ose même pas lui demander un reçu… Pas de nouvelles depuis…

    Mais le pompon, c’est “l’actualisation”. À chaque fin de mois, le chômeur est censé dire à Paul Lempois quelle est sa situation. Dire s’il a retrouvé un boulot, auquel cas Paul s’empresse de le rayer des listes, ce qui est, on l’a bien compris, sa préoccupation majeure. Ou plus souvent, dire qu’il est toujours chômeur et qu’il attend donc son obole. Car sans actualisation, pas de paiment. Du coup c’est la ruée.

    Car le problème, c’est que ces jours-là, des millions de personnes sont dans le même cas… Et comme manifestement, ceux qui ont conçu le système n’ont pas imaginé que les gens allaient s’en servir, c’est la bérézina. Voici un florilège de ce qu’on peut obtenir. Et encore, je vous épargne les écrans blancs où les sabliers qui tournent à l’infini.




    Des fois, Paul, que tu croyais ton ami, t’oublie…

    Ce dernier message d’erreur montre que Pole-Emploi utilise une plateforme Open Source. Très bien. Mais utiliser de l’Open Source ne dispense pas de savoir programmer, ni de dimensionner correctement ses serveurs…


    Pôle Emploi devrait rémunérer correctement le chômeur pendant qu’il cherche un emploi. Ce n’est pas le cas. Pôle Emploi devrait aider le chômeur à trouver un emploi. Ce n’est pas le cas. Pôle Emploi devrait soutenir le chômeur quand il doute : au contraire, il le considère a priori comme un fraudeur potentiel, lui fait perdre son temps et son calme par des démarches ridicules, et menace en permanence de le radier.

    Ah, la radiation ! Une obsession. C’est le seul moyen que nos gouvernants (ceux de maintenant, bien sûr, mais tous les autres avant, “socialistes” compris, ont fait la même chose) ont trouvé pour “faire baisser les chiffres du chômage”. L’expression est bien troussée : car ce sont bien les chiffres qui baissent, pas le chômage.

    Et puis, si au bout de votre période d’indemnisation (2 ans si vous n’avez pas connu le chômage depuis longtemps) vous n’avez toujours rien trouvé, eh bien vous êtes en “fin de droit”. Quelle belle expression, quand on y pense ! Vous êtes sorti des statistiques, pour le plus grand plaisir des Lagarde ou Wauquiez, qui iront s’en vanter à la télé. Et après ? Vous vous démerdez ! L’État ne veut plus le savoir, et ne peut plus rien pour vous. Vous n’existez plus.

    Même en période de “crise”, quand un million de personnes vont se retrouver dans ce cas. Sarkozy a semble-t-il été un peu emmerdé de l’apprendre. Non pas que le sort des chômeurs lui importe, il s’en tape comme de sa première Rolex, mais l’idée que cette situation pourrait causer dans l’opinion un émoi qui pourrait lui nuire électoralement lui est insupportable. Il a refilé le bébé à Laurent Wauquiez, qui a promis une solution pour fin mars. Or, vous avez vu comme moi que nous sommes le premier Avril. Et ni Wauquiez ni Sarkozy n’ont fait quoi que ce soit

    Ah si, Sarkozy s’accroche à son bouclier fiscal comme un morpion s’accroche à ce à quoi il s’accroche généralement… Le bouclier fiscal coûte à l’État un peu plus de 585 millions d’euros par an. Ce n’est certes pas la mesure sarkozyste la plus coûteuse, mais c’est la plus scandaleuse, puisque deux tiers de cette somme sont partagés entre 1000 personnes. Les plus riches.

    585 millions, c’est pourtant davantage que les économies réalisées en ne remplaçant pas un fonctionnaire sur deux. Un fonctionnaire que l’on pourrait affecter au Pôle Emploi (ou à l’hôpital, ou à l’école, voire même à la police) , où il serait utile à aider ce grand troupeau de gueux à se sentir un peu moins mal.

    Mais on est en Sarkozye, que diable ! Ce ne sont pas quelques millions de pauvres gens qui vont pourrir la vie et les privilèges de quelques milliers de riches !


    [Ah, si ce n’est déjà fait, écoutez donc l’émission “L’avenir radié” chez Mermet , consacrée au livre sous X d’un “conseiller” : “Confessions d’une taupe au Pôle-Emploi”. Édifiant est un euphémisme.]


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