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APPEL AUX DIRECTEURS, ENSEIGNANTS, CONSEILS DES MAÎTRES ...

Appel aux directeurs, enseignants, conseils des maîtres: rejoignez le CNRBE

Posté par retraitbaseeleves le 16 février 2010

Fichage des enfants : les raisons de poursuivre la lutte avec le CNRBE sont de plus en plus lisibles !
A l’attention des directrices et directeurs des écoles publiques, des enseignants des écoles et des conseils des maîtres.

Vous êtes aujourd’hui, de par votre fonction, concerné(e) au premier chef dans votre école par le fichier Base-Elèves. Que ce soit parce que vous l’utilisez, parce que vous serez appelé(e) à le faire, ou parce que vous avez jusqu’ici refusé de l’utiliser. Vous connaissez sans doute le CNRBE, Collectif National de Résistance à Base-Elèves, constitué de citoyens, de collectifs départementaux, de parents et d’associations de parents, d’associations de  défense des droits de l’homme, d’enseignants et de syndicats d’enseignants, d’avocats et d’associations d’avocats.

Le CNRBE, qui a plus d’un an d’existence, s’est réuni à Bobigny les 23 et 24 janvier 2010, et a choisi de s’adresser une nouvelle fois à vous au travers de ce courrier que vous aurez peut-être la gentillesse de lire jusqu’au bout.

Malgré un arrêté « rassurant » sur Base Elèves, des champs « limités » et des finalités « anodines » …

Base élèves a  la particularité de ficher les enfants, personnes que d’ordinaire on se préoccupe plutôt de protéger.

Base-Elèves a des objectifs affichés dans l’arrêté du 20 octobre 2008, comme la gestion, le pilotage et l’alimentation de statistiques anonymes.

Sur ces trois points, nous remarquons que :

  • l’aide logistique pour les écoles n’est pas un succès : de nombreux utilisateurs font appel à un deuxième logiciel de gestion. En matière de carte scolaire, Base Elèves ne permet toujours pas de prévoir les départs et les arrivées d’élèves liés à des déménagements.
  • le « pilotage » est un terme flou mais qui est très en phase avec la gestion managériale, en vogue, dans le cadre de la LOLF, Loi Organique des Lois de Finance, déclinée sur le terrain par les IA et les IEN, qui vise à supprimer des postes et à mettre en œuvre une politique du chiffre, de la performance et de la compétition, incompatible avec les missions éducatives.
  • récolter des données nominatives pour établir des statistiques anonymes est un non-sens qui fait en outre courir le risque de perte ou de fuite de données nominatives pour rien. La statistique, pour fonctionner, n’a pas besoin de données exhaustives, elle peut se contenter d’échantillons. Un fichier de 6,5 millions d’enfants, et davantage d’adultes (parents, personnes qui viennent chercher les enfants à l’école) est d’un volume trop important, impossible à sécuriser (les exemples sur ce point ne manquent pas, en Angleterre et aux USA avec le piratage du site Monster).

En revanche, BE, malgré l’arrêté, a des côtés cachés, et non des moindres, de par son interconnexion avec un autre fichier, la BNIE (Base Nationale des Identifiants Elèves) qui ne s’appuie sur aucun texte de loi et qui, elle, conserve les données nominatives pendant 35 ans et attribue un numéro à chaque  élève, l’INE.

… une contestation forte et durable, pourquoi ?

Les contestations passées ont permis de supprimer des données qui n’avaient rien d’anodin, liées à la nationalité, la langue parlée à la maison (BE est née la même année que le rapport du député Benisti accusant le bilinguisme d’accentuer la délinquance) et aux besoins éducatifs particuliers.

Mais le problème de cette base va plus loin, puisque parmi les opposants au fichier on trouve, en vrac :

  • les DDEN qui refusent que BE « puisse se transformer en outil de repérage des sans-papiers » (95ème Congrès);
  • des syndicats nationaux de l’éducation comme le SNUipp, la CGT-Education, SUD Education, l’UDAS, le Syndicat des Avocats de France et le Syndicat de la Magistrature;
  • des associations d’envergure nationale comme Défense des Enfants International (DEI-France) et la Ligue des Droits de l’Homme(LDH);
  • Un regroupement d’associations et de syndicats a demandé (en vain) des éclaircissements sur six points au ministre (lettre du 20-03-09 de la FCPE, de la LDH, de la Ligue de l’Enseignement, de la FSU, du SGEN-CFDT et du SE-UNSA).

Actions juridiques en cours :

  • un recours devant le Conseil d’Etat, juge administratif suprême qui doit rendre son avis sur la légalité de Base Elèves,
  • près de 2000 plaintes contre X de parents d’élèves au sujet de Base Elèves, qui font l’objet d’enquêtes et sont rassemblées par le Procureur de Paris;
  • Un organisme international est intervenu : le Comité des Droits de l’Enfant de l’ONU, chargé de veiller au respect de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant, a constaté que Base Elèves ne respectait pas certains droits et a demandé des rectifications à la France au nom du respect de la Convention.
Une traçabilité complète des enfants se met en place …

Le problème central de BE est l’identification au-delà de l’échelon local, qui n’a pas lieu d’être en matière d’éducation. Par-dessus se greffe la possibilité d’inscription de nouvelles données (dès le 03/12/08, la possibilité de relier le nom de l’élève à celui de son professeur, qui est évalué aussi sur les résultats de ses élèves). Tout fichier est fondamentalement évolutif !

Ce n’est pas fini : les données sensibles retirées de Base Elèves rentrent par la grande porte, avec les compétences collectées dans le livret électronique de compétences, longue liste de résultats d’évaluations, d’expériences scolaires et extrascolaires, introduit à titre expérimental (BO n° 1 du 07-01-10). La transmission des résultats aux évaluations nationales ne demeurera pas longtemps anonyme ! Sous une apparente modernité (nous n’avons rien contre l’outil informatique, si aucune donnée nominative ne sort de l’école), c’est un pas de plus vers le déni de la personne, dont la vie se résume à une longue liste d’évaluations et de compétences sans place pour sa part d’humanité, tout ceci étant censé faciliter l’appréciation de sa valeur par un employeur, sur le marché du travail.

Le très intrusif livret ouvrier (de 1803 à 1890) serait-il en train de renaître de ses cendres, dans une nouvelle jeunesse, 100 fois plus puissant sous sa forme électronique, pour donner un aperçu de « l’employabilité » future des écoliers ?

Ce sont ainsi les directrices et directeurs, en permettant la création grâce à Base Elèves du numéro INE, qui forment les premiers maillons de cette longue chaîne de données qui ramènent l’enfant à un simple numéro, l’enfermant dans son passé à la merci du regard du monde des adultes, ce qui est aussi une formidable intrusion dans la vie privée, toujours sous couvert de modernité.

… et l’éducateur devient agent de transmission !

C’est à une véritable mutation du métier que nous assistons : à l’éducation visant l’épanouissement et l’émancipation des enfants futurs citoyens, succède l’instruction, centrée sur la seule transmission de techniques scolaires, avec une inflation d’évaluations nationales obligatoires, au codage binaire facilitant le fichage et la sélection précoce. Les vertus du temps et de la capacité d’évolution des enfants sont rejetées, au profit d’un déterminisme malsain. Les enseignants deviennent de fait des agents de transmission de données sensibles, est-ce admissible ?

En outre, des interconnexions non déclarées existent et vont se développer : la proposition de loi Warssmann, votée en première lecture à l‘Assemblée Nationale, examinée au Sénat, prévoit d’ailleurs l’accès à tout fichier administratif (dont Base Elèves) pour toutes les autres administrations. Sans attendre le vote définitif de cette loi, le Pôle Emploi, via les Missions Locales, a accès aux données de Sconet, pour le suivi des « décrocheurs », dans le cadre d’une autre loi. Or Sconet, grand frère de Base Elèves, est alimenté par les données de Base Elèves comme le prévoit l’arrêté du ministre Darcos du 20 octobre 2008.

Un récent dossier d’arrestation d’un « sans papier » en Ille et Vilaine laisse entièrement planer le doute sur le lien possible, dénoncé d’une manière générale par le Comité des Droits de l’enfant de l’ONU, entre le fichage d’un enfant dans Base Elèves et l’arrestation de son père.

Tout enfant, quelle que soit son origine, a le droit d’être inscrit dans une école en toute sérénité !

Fort des recommandations du Comité des Droits de l’Enfant de l’ONU, du recours devant le Conseil d’Etat, en prenant en compte les 2000 plaintes contre X formulées par les parents d’élèves contre BE, et pour garder la confiance des familles, le CNRBE exige :

  • que l’anonymat redevienne la norme en matière d’éducation, que chaque élève ait un dossier au niveau local, ni centralisé ni partageable, ni consultable à distance.
  • que les écoles transmettent des données chiffrées, suffisantes dans le cadre de nos missions.
  • l’abandon de la BNIE, de BE, et la destruction des données collectées irrégulièrement.

La tentation du fichage était trop grande, le Ministère l’a mis en place, mais peut-être n’est-ce pas irréversible : il vous est possible de refuser les stages de formation, de refuser d’alimenter la Base Elèves (que vous ayez commencé ou pas à la renseigner) et de rejoindre les opposants à ce fichage qui enferme l’enfant dans un déterminisme contraire à notre éthique professionnelle.

Merci de votre attention, et peut-être à bientôt,

Le CNRBE

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