L’institution sociale de la propriété a fait de la pénurie une menace quotidienne. La propriété, qu’elle soit privée ou commune, sépare l’individu du monde en créant une situation dans laquelle, plutôt que de simplement prendre ce que l’on veut ou ce dont nous avons besoin, nous demandons la permission ; une permission qui n’est généralement accordée que sous la forme d’un échange économique. De cette façon, on garantit différents niveaux de pauvreté à chacun, même les riches car conformément à la règle de la propriété sociale : ce que l’on ne nous permet pas d’avoir excède de loin ce que l’on nous permet d’avoir. La domination de la survie sur la vie est maintenue, et entretenue.
Ceux de nous qui désirent créer leurs vies selon leurs propres désirs, reconnaissent que cette domination, si essentielle pour le maintien de la société, est une ennemie que nous devons attaquer et détruire. Partant de là, le vol et le squat prennent toute leur signification en devenant partie intégrante d’un projet de vie insurgé. Mais l’assistance sociale, les repas de charité, la récup et la mendicité ne peuvent permettre de survivre que lamentablement sans un travail régulier. De plus ils n’attaquent en aucun cas l’économie ; ils sont intégrés à l’économie.
Souvent, Le vol et le squat sont de simples tactiques de survie. Les squatters qui exigent « le droit au logement » ou qui essayent de légaliser leur squat, les voleurs qui s’auto-exploitent au même degré que n’importe quel autre ouvrier pour accumuler des marchandises sans valeur - ces gens n’ont aucun intérêt dans la destruction de l’économie... ils veulent simplement une juste répartition de ses marchandises.
Mais ceux qui squattent et volent dans l’optique d’une vie insurgée, le font au mépris de la logique de propriété économique, de façon antagoniste. Refusant d’accepter la pénurie imposée par cette logique ou de se plier aux demandes d’un monde qu’ils n’ont pas créé, de tels insurgés prennent ce qu’ils désirent sans demander la permission à quiconque à chaque fois que surgit la possibilité. Dans cet antagonisme quotidien avec les règles économiques de la société, nous reprenons l’abondance du monde - et c’est un acte d’insurrection.
Pour maintenir le contrôle social, la vie des individus est volée. A la place, nous n’avons accès qu’à la survie économique, l’ennuyeuse existence du travail et de la paie. Nous ne pouvons pas racheter nos vies, nous ne pouvons pas supplier non plus. Nos vies seront seulement nôtres lorsque nous les aurons récupérées, volées - et cela signifie prendre ce que nous voulons sans demander la permission.
Extrait de Willful Disobedience N°2.
Traduit de l’anglais par Non Fides. Extrait de Non Fides N°IV