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EGYPTE : TAHRIR VIDÉ, MANIFS PARTOUT !

Egypte: Tahrir vidé, manifs partout!

Le Caire 14 février 2011. "A bas Moubarak!" Vu, je coche. "A bas la constitution! A bas l'Assemblée du Peuple!" Ça, c'est fait aussi. "Elections libres! Gouvernement civil!" On y arrive, patience et, surtout, prudence petits pas. 

Sans transition, la suite ne s'est pas fait pas attendre.

Tandis que l'on s'inquiétait de voir la place Tahrir se vider de ses manifestants, les nouvelles autorités furent prises de cours par la multiplication des grèves et de petites ou moyennes manifestations au Caire et en province. Une place de perdue, donc, mais dix de retrouvées.

Au menu: revendications sociales et salariales et grogne contre la hausse des prix des produits de première nécessité. Grèves dans des secteurs aussi divers que l'industrie pétrolière, les médias, la sidérurgie ou l'industrie textile.

Les salaires dans la fonction publique sont insignifiants et se situent autour de 35 ou de 40 euros par mois. A titre indicatif le kilo de viande se vend à 9€!

Même la police a défilé hier pour demander une hausse des salaires et scander à son tour: "Le peuple, la police, une seule main!".

Les employés des société privées se mettent aussi en grève et arpentent les rues où sont domiciliées leur entreprises respectives: "A bas! A bas! Mon-sieur! Shé-rif!". "Mais qui est Monsieur Shérif ?" demande une voisine. "Le patron!" répond une salariée.

Les archéologues, les fonctionnaires du ministère de la culture et les guides touristiques ont pris d'assaut ce matin le Haut Conseil des Antiquités présidé par Zahi Hawass qui, non solum a été maintenu au gouvernement sed etiam a été bombardé Ministre des Antiquités. Colère et furie des personnes citées plus haut pour qui l'homme au chapeau est une icône de l'usurpation et de la corruption. Au pied de son bureau des centaines de manifestants crient: "Descends! Descends!" ou "Voleur! Voleur! Qu'as tu fait de mon musée!".

Ainsi, ce que l'on observe aujourd'hui n'est plus la foule compacte de Tahrir, mais des dizaines, voire des centaines de petits groupes plus déterminés que jamais à ce que, secteur par secteur, justice soit faite.

Cris d'Egypte ici

 

**********

L'armée égyptienne ne fait pas que promettre la réalisation de vagues idéaux libéraux.

- L'armée a évacué à coup de matraques les occupants de la place Tahrir, hier, dimanche 13 février. (Elle a réussi là où la police de Moubarak avait échoué) Et elle continue aujourd'hui apparemment.
- L'armée a promis de réprimer durement les vastes mouvements de grève qui ont débuté la semaine dernière dans de nombreux secteurs.
- Derrière l'image de neutralité qu'elle s'est forgée, l'armée a participé à l'arrestation, la détention et parfois à la torture de centaines voire de milliers de protestataires au cours de ces 20 derniers jours.

Certains appellent cela une révolution, une victoire du peuple ; il faut être aveugle pour ne pas y voir un coup d'État réalisé en douceur. Les premiers symptômes ne trompent pas !

Depuis l'arrivée de Nasser (qui était issu de l'armée, de même que Moubarak) l'armée joue un rôle très important dans la politique et l'économie du pays. Les officiers supérieurs détiennent d'innombrables entreprises dans l'armement, le BTP, le tourisme, le pétrole, le textile... Certains généraux ont profité de leur place privilégiée pour bâtir de grosses fortunes. On comprend mieux leurs intérêts et leur menace de réprimer sévèrement les mouvements de protestation des travailleurs et l'action des syndicats.

L'armée a également soutenu explicitement la contre-réforme agraire qui a jeté des centaines de milliers de paysans sur les routes et qui ont ensuite été remplir les bidonvilles du Caire et d'Alexandrie - elle a même parfois joué un rôle directement répressif contre ces paysans qui luttaient contre l'avènement de la nouvelle hégémonie des grands propriétaires terriens au cours de ces 15/20 dernières années.

Le régime de Moubarak n'était que la structure politique et policière qui permettait le maintien de cette mainmise économique sur l'Égypte. La domination était double. Moubarak a été le fusible à faire sauter pour conserver intact le reste du système. Aujourd'hui ce sont les mêmes personnes, le même milieu, qui demeurent au pouvoir. La particularité de la nouvelle donne est que cette « bourgeoisie-militaire » se retrouve en plus aux commandes de l’Etat.

Mais l'armée ne pourra sans doute pas conserver le contrôle direct du pouvoir politique en raison des pressions populaires et internationales qui demandent un respect des valeurs démocratique. L'instauration officielle d'une dictature militaire parait être un scénario peu probable (même si dans les faits leur pouvoir est déjà et restera énorme). L'armée se contentera donc de placer à la tête de l'État quelqu'un qui se chargera de continuer à défendre ses intérêts.

Bien sur les généraux ne sont pas les seuls à avoir en jeu de gros intérêts économiques : par conséquent les conflits et les tractations du jeu démocratique qui s'annonce n'auront pour enjeu réel que la meilleure défense des intérêts des différentes classes économiquement dominantes (armée, propriétaires terriens, patronat « indépendant », entreprises étrangères puissantes). Toutes les autres idées utilisées dans le débat ne seront que de la poudre aux yeux : des arguments idéologiques chargés de masquer les véritables enjeux de la possession du pouvoir politique.

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