Des associations ont adressé un courrier à Éric Besson pour dénoncer un climat exécrable, alors que le ministre menace de porter plainte
La polémique sur la présence associative dans les centres de rétention est en train de virer au règlement de comptes entre la Cimade et le ministre de l’immigration Éric Besson. Ce dernier a affirmé lundi 11 mai qu’il envisageait de porter plainte pour diffamation contre le secrétaire général de l’association protestante, Laurent Giovannoni, qui l’avait un peu plus tôt accusé d’employer des « méthodes de voyou ».
Besson accuse également la Cimade de "mordre et de cracher en permanence sur la main qui (la) nourrit". Cette association "reçoit des subventions publiques à un niveau très élevé", a-t-il affirmé.
Sauf que c’est faux. Pour l’aide aux étrangers en rétention, la Cimade ne reçoit pas de «subvention». Elle est rémunérée pour des prestations accomplies dans le cadre du marché passé avec l'Etat.
Cette soudaine poussée de fièvre fait suite à la signature, le week-end du 8 mai par le ministre, des « marchés de prestation » qui confient à six associations une mission de soutien aux étrangers menacés d’expulsion. Depuis le début de cette longue procédure, engagée l’été dernier, la Cimade dénonce la volonté du gouvernement de chercher à l’affaiblir. L’association a engagé un recours au fond contre la procédure d’appel d’offres. Celui-ci doit être examiné dans les semaines qui viennent.
Dans l’attente de la décision, l’association avait introduit en avril une action en référé devant le juge administratif afin d’obtenir la suspension de la procédure. Une suspension ordonnée le 20 avril par le tribunal administratif de Paris, mais seulement jusqu’au 7 mai, le temps d’instruire ce dossier complexe. La semaine dernière, une première audience s’est révélée tendue et le magistrat a programmé une nouvelle séance le 13 mai.
Eric Besson a créé la surprise
Mais le week-end du 8 mai, le ministre de l’immigration a créé la surprise : ne s’estimant plus tenu par le délai du 7 mai, il a signé les marchés, invoquant une « situation d’urgence ». Légalement, les six associations doivent commencer à intervenir dans les centres de rétention au début du mois de juin. Plusieurs d’entre elles, France Terre d’Asile et Forum réfugiés notamment, s’étaient inquiétées des retards qui risquent de les empêcher d’être prêtes à temps.
Mécontente de la décision d’Éric Besson, la Cimade dénonce « la volonté du ministère de l’immigration de mener à son terme l’entreprise de démantèlement de cette mission associative unique en Europe ».
Jamais, lorsque Nicolas Sarkozy était ministre de l’intérieur ou sous le ministère de Brice Hortefeux, les relations entre les autorités publiques et une partie du monde militant ne s’étaient à ce point dégradées. Plusieurs associations, dont le Secours catholique et Emmaüs, ont adressé lundi 11 mai un nouveau courrier à Éric Besson pour dénoncer un climat exécrable.