• RAMALLAH CHERCHE UNE ISSUE

    Ramallah cherche une issue

    Khaled Amayreh


    Le leadership palestinien cherche à sortir d’un processus de paix moribond au bord de l’effondrement, écrit Khaled Amayreh en Cisjordanie

    De plus en plus découragés par l’incapacité des USA - ou leur refus - d’obliger Israël à mettre fin à des décennies d’occupation militaire dans les territoires palestiniens, l’Autorité palestinienne (AP) prépare une liste de solutions qui empêcheraient la rupture des entretiens israélo-palestiniens patronnés par les USA.

    L’administration Obama a dit que la seule voie vers la paix au Moyen-Orient devait passer par les entretiens bilatéraux directs entre les deux parties. Toutefois, dans le contexte des entretiens directs ou indirects, Israël a poursuivi sans répit ses plans d’expansion en Cisjordanie et spécialement à Jérusalem-Est, souvent à contre-courant des appels étasuniens et internationaux en faveur d’un moratoire sur la construction de nouvelles colonies qui permettrait la reprise des entretiens de paix.

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    L’AP elle-même, qui subit de fortes pressions publiques pour l’adoption d’une position plus ferme devant l’intransigeance et l’arrogance israéliennes a juré de boycotter les entretiens déjà précaires si le gouvernement de Benjamin Netanyahu refusait de geler la construction de colonies. Pour sa part, le gouvernement israélien s’est engagé à poursuivre la construction de colonies ce qui, de l’avis des observateurs palestiniens et internationaux, détruirait les dernières chances de créer un État palestinien viable et territorialement contigu sur la base des frontières de 1967.

    Tout le processus de paix est fondé sur l’hypothèse d’un État palestinien viable créé aux côtés d’Israël. Mais l’appropriation constante et sans répit de terres dans les territoires occupés, site présumé du futur État palestinien éventuel, souligne la précarité du processus de paix et la quasi impossibilité de créer un véritable État palestinien.

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    Carte de la Palestine

    Incapable de convaincre les États-Unis de faire pression sur Israël, principalement en raison de l’influence immense du lobby juif américain sur la politique étasunienne concernant la question palestinienne, le leadership palestinien manifestement faible a consulté des États arabes clés tels que l’Égypte pour établir ensemble un plan diplomatique arabe forçant Israël à annuler ses plans d’expansion déchaînée des colonies.

    Selon les officiels de l’AP, la première solution de rechange serait une tentative de persuader l’administration Obama de reconnaître un État palestinien en Cisjordanie, dans la bande de Gaza et à Jérusalem si Israël refusait d’arrêter l’expansion des colonies. « Pour l’heure, nous nous concentrons sur la première option, à savoir les négociations » aurait dit Mahmoud Abbas à la fin de la semaine dernière.

    Toutefois, il est très peu probable qu’une administration US affaiblie soit en mesure de reconnaître un État palestinien basé sur des frontières vagues. Israël considère les territoires occupés comme « contestés » plutôt que « occupés » et les administrations US successives ont plus ou moins refusé de prendre position de manière définitive et engagée sur la question, insistant sur le fait que « les problèmes des frontières » devraient être aplanis et résolus lors des entretiens bilatéraux.

    Il est donc peu probable qu’engager les USA à reconnaître un État palestinien ait des chances d’aboutir étant donné la forte opposition au sein de l’administration de la part de la secrétaire d’État Hillary Clinton. Si les USA disent « non » aux demandes palestiniennes visant à obtenir la reconnaissance par les USA d’un État palestinien déclaré, l’AP et ses alliés arabes passeraient à une deuxième option : demander aux Nations unies ou au Conseil de sécurité des Nations unies de reconnaître un État palestinien.

    Une résolution des Nations unies à cet effet n’aurait toutefois que peu d’effet pratique et viendrait s’ajouter aux dizaines de résolutions par lesquelles les Nations unies ont exigé qu’Israël mette fin à l’occupation des terres arabes et annule ses mesures illégales, notamment la construction de colonies sur les territoires occupés, toutes résolutions qui sont restées lettre morte pour Israël. De même, les USA opposeront probablement leur veto à un projet de résolution exigeant du Conseil de sécurité qu’il reconnaisse un futur État palestinien.

    Si cette solution devait échouer également (comme c’est tout à fait probable), l’AP - avec probablement les conseils des Égyptiens - appellerait à la convocation d’une conférence internationale de paix. Toutefois, une telle conférence serait une abomination pour Israël qui la rejetterait carrément.

    Avec beaucoup d’arrogance, les officiels et les dirigeants israéliens ont dit à plusieurs reprises qu’ils ne permettront pas à d’autres nations ou d’autres groupes de nations de dicter les frontières d’Israël. En d’autres termes, Israël rejetterait et ignorerait tout effort de la communauté internationale l’obligeant à respecter le droit international concernant les territoires palestiniens occupés. L’Égypte soutient fermement la tenue d’une conférence internationale de paix, condition incontournable, selon elle, d’une paix véritable.

    Effectivement, les officiels égyptiens ont exprimé leur frustration croissante devant les atermoiements et les blocages israéliens, l’un d’eux déclarant que l’impasse du processus de paix doit se terminer pour assurer les droits des Palestiniens. « Un sommet international redéfinirait les éléments de base et les frontières d’un État palestinien qui serait érigé sur les territoires occupés en juin 1967, avec ou sans les colonies israéliennes ».

    Cet officiel égyptien a ajouté que de toute façon, il faut faire quelque chose pour maintenir l’actuel processus de paix en vie et en empêcher l’effondrement. Entre-temps, certains croient que les différentes parties au processus de paix s’intéressent exclusivement à le maintenir symboliquement en vie plutôt que de le voir aboutir aux objectifs qu’il professe.

    Cela mis à part, il n’y a pas de doute que si les Palestiniens et les Arabes reviennent à d’anciennes options, c’est plus par découragement devant l’échec US à faire pression sur Israël que dans le but de renforcer une position palestino-arabe qui changerait fondamentalement le processus de paix dans son ensemble. Entre-temps, avec chaque jour qui passe, Israël maintient l’expansion intensive de ses colonies, repoussant encore davantage un futur règlement.

    En outre, le fait que la société juive d’Israël devienne de plus en plus chauvine et raciste signifie qu’ une solution digne au conflit arabo- israélien deviendra beaucoup plus difficile à réaliser. La semaine dernière, le rabbin Ovadia Yosef, autorité spirituelle du parti extra fondamentaliste Shas, aurait dit : " Dieu a créé les non- juifs sous forme d’ ânes pour servir les juifs". Et "c’est la raison pour laquelle Dieu les maintient en vie".

    Yosef n’est pas une personne marginale en Israël. Il a des centaines de milliers de partisans et il est souvent décrit comme le « faiseur de rois » vu son influence personnelle sur les différents gouvernements israéliens. Pourtant, des commentaires de type fasciste comme ceux de Yosef n’ont pas suscité de réprobation en Israël, ni de la part du gouvernement ni parmi les intellectuels et pas même dans les médias. Ceci n’a rien de neuf, mais c’est révélateur.

    (JPG) Khalid Amayreh est un journaliste qui vit à Dura, dans le district d’Hébron, Cisjordanie, Palestine occupée. Il a un bachelor en journalisme de l’université d’Oklahoma (1981) et un master en journalisme, de l’université de Southern, Illinois (1983)

    Du même auteur :

    -  Le fascisme sous forme de lois
    -  Pour Abbas, c’est le moment de démissionner
    -  Colonies juives : une débauche de constructions
    -  Pendant les pourparlers, Israël continue de tuer
    -  Irrémédiables criminels de guerre
    -  Un échec clairement programmé


    4 novembre 2010 - Al Ahram Weekly - Cet article peut être consulté ici :
    http://weekly.ahram.org.eg/2010/102...
    Traduction : Anne-Marie Goossens

    ** Les colons israéliens ont entamé la construction de 1 649 logements depuis la fin, le 26 septembre, du moratoire sur la colonisation israélienne en Cisjordanie. Dans un rapport, l'ONG israélienne La Paix Maintenant, ajoute que les fondations pour 1 126 autres chantiers ont en outre été creusées durant cette période.

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