• LA SCIENTOLOGIE SAUVÉE PAR UNE LOI DISCRÈTE ?

    La Scientologie sauvée par une loi discrète ? Un précédent : la protection des dénonciateurs !

    Est-elle vraiment due au hasard, cette suppression de la peine de dissolution d’une personne morale pour escroquerie ? Elle va sans doute permettre à l’Église de Scientologie d’échapper à cette condamnation dans le procès en cours qui lui est intenté pour « escroquerie en bande organisée » et dont le jugement est attendu le 27 octobre prochain. Pour le moins, cette modification législative est on ne peut peut plus opportune au moment où la secte est poursuivie et encourt précisément cette peine. La loi pénale est rétroactive dès lors qu’elle est moins rigoureuse que celle qu’elle remplace. Celle-ci a été votée par le Parlement, le 12 mai 2009, et promulguée dès le lendemain le 13, au milieu d’ une loi fourre-tout ayant comme noble fin « la simplification du droit ». Sans rire !<o:p></o:p>

      La loi du 17 juillet 1978, une révolution pour une administration opaque<o:p></o:p><o:p></o:p>

    Tant de rapidité et de discrétion font penser au précédent de la loi du 12 avril 2000 qui protège depuis les dénonciateurs et délateurs contre leurs victimes. Une semblable opération, en effet, a été menée adroitement en avril 2000 pour vider de son contenu la loi du 17 juilllet 1978, adoptée sous la présidence de M. Giscard d’Estaing, qui facilitait l’accès aux documents administratifs nominatifs.

    Elle avait représenté une sorte de « révolution » dans les mœurs de l’administration française, puisque, selon son article 6 bis, tout document « nominatif  » - c’est-à-dire mentionnant le nom d’une personne - pouvait être réclamé par cette personne et devait de droit lui être communiqué « sans que les motifs tirés du secret de la vie privée, du secret médical ou du secret en matière commercial et industriel, portant exclusivement sur des faits qui (lui) sont personnels, puissent (lui) être opposés ».

    Les informations à caractère médical devaient seulement être communiquées par l’intermédiaire d’un médecin traitant. Cette communication de documents était fondée sur le respect des droits de la défense de la personne mise en cause, impliquant le droit au débat contradictoire.<o:p></o:p><o:p></o:p>

    L’aboutissement d’un combat de 22 ans mené par l’administration<o:p></o:p><o:p></o:p>

    L’administration n’a jamais accepté de bonnes grâces d’appliquer cette loi qui lui compliquait la tâche : ses informateurs couraient des risques. Leurs victimes pouvaient leur demander des comptes avec preuves à l’appui. Plus habituée à l’opacité qu’à la transparence depuis des siècles, l’administration a donc opposé une résistance opiniâtre avec le secours des juridictions elles-mêmes. <o:p></o:p>

    - À la faveur de recours, elle a ainsi obtenu du Conseil d’État, le 14 octobre 1992 l’occultation du signataire sur les documents demandés pour le cacher à la personne qu’il met en cause. <o:p></o:p>

    - Puis, le 18 novembre 1999, elle s’est même vu reconnaître par la cour administrative d’appel de Nancy le droit... de perdre le document demandé. C’est commode quand on ne veut pas le transmettre. Mais, il faut croire que ces astuces ne suffisaient pas à assurer la sérénité de délateurs dont l’administration paraît priser les informations. <o:p></o:p><o:p></o:p>

    Un triple maquillage par trois leurres<o:p></o:p><o:p></o:p>

    C’est dans ce contexte qu’a paru la loi du 12 avril 2000 et son nouvel article 6, remplaçant l’article 6 bis originel, grâce à un triple maquillage. Comme toujours, les mauvais coups sont perpétrés en cachette. Quel député de base a vu venir celui-ci qu’on avait pris soin de dissimuler sous trois leurres  ? <o:p></o:p>

    1- Le nouveau texte était d’abord inscrit et donc perdu dans une de ces « lois fourre-tout » comme sait en voter parfois la représentation nationale. C’est aussi le cas de la loi du 13 mai 2009.<o:p></o:p>

    2- On avait ensuite donné à cette loi le noble but d’accroître « la transparence dans les relations entre administration et administrés » ! La loi du 13 mai 2009 s’est proposé « la simplification du Droit  » ! De quoi lever toute méfiance !<o:p></o:p>

    3- Et, surtout, on avait écrit ce nouvel article 6 de manière à le rendre incompréhensible au premier abord par un joli jeu de mots. Sans en avoir l’air, celui-ci a neutralisé une fois pour toutes « la malfaisance » de cette loi du 17 juillet 1978. Il faut, en effet, avoir l’œil exercé pour repérer la manœuvre imaginée par les experts en opacité administrative : le simple jeu de mots entre « intéressé » et « personne » suffit à interdire toute communication d’une lettre de dénonciation à sa victime : « ne sont communicables qu’à l’intéressé, est-il seulement précisé, les documents administratifs faisant apparaître le comportement d’une personne dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice. » <o:p></o:p><o:p></o:p>

    Un jeu de mots entre « personne » et « intéressé »<o:p></o:p><o:p></o:p>

    Comment donc ? peut objecter le lecteur qui n’a pas compris ! Preuve que le libellé est incompréhensible à première lecture ! Et pourtant c’est bête comme chou ! L’intéressé qui réclame communication d’une lettre – soit la victime – sera toujours différent de son dénonciateur – soit la personne. Or la loi défend de communiquer un document à un intéressé s’il fait apparaître le comportement d’une personne et que cette divulgation peut être préjudiciable à cette dernière.

    Une lettre de dénonciation ne peut donc être remise à sa victime/intéressée puisque cette communication révèle une dénonciation dont son auteur /personne peut être amené à en répondre devant un tribunal ! Le tour est joué.<o:p></o:p>

    En somme le seul « intéressé » qui a droit, selon la loi, à avoir communication de cette lettre de dénonciation sans courir le risque d’un préjudice, … c’est l’auteur de la lettre de dénonciation ! Cet article 6 introduit le burlesque dans le Droit : il prive la victime dénoncée de la preuve d’une dénonciation calomnieuse dont elle aurait besoin, et autorise l’administration à fournir au dénonciateur un double de sa lettre de dénonciation dont il n’a pas besoin, sauf si, par imprévoyance, il n’en pas gardé copie et qu’il veut relire sa prose ! Mais il est vrai que cette protection n’est pas apparue comme suffisante à la Cour de Cassation puisqu’elle exige depuis un arrêt de 2002 que la victime apporte la preuve que son dénonciateur savait que le fait dénoncé était faux au moment même de la dénonciation !!! <o:p></o:p>

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    Des responsables politiques de mauvaise foi <o:p></o:p><o:p></o:p>

    Cet article 6 est un bel exemple des méthodes en usage pour ridiculiser le Droit et ruiner les libertés acquises. Les députés pour la plupart n’y ont sans doute vu que du feu ! Les responsables interrogés, en revanche, ont tenté soit de nier en toute mauvaise foi l’analyse de cet article 6, aujourd’hui validée par la juridiction administrative, soit de justifier cette réécriture de la loi. <o:p></o:p>

    - En 2002, M. Jospin a, sans rire, défendu le progrès que représentait cette loi. Quel progrès, en effet, que de rétablir l’opacité administrative ! Il demandait même de faire confiance au Conseil d’État, en cas de contestation. Le Conseil d’État, défenseur des libertés ? Comme en 1940 quand il n’a trouvé rien à redire aux discriminations des décrets-lois antisémites ? <o:p></o:p>

    - En 2002 également, M. Chirac, lui, comme toujours, a promis de faire examiner cette analyse par un comité d’experts, pour finir par faire répondre en 2005 que la Présidence de la République n’était pas compétente en matière législative. Tu parles, Charles ! Dans un régime politique où 90 % des lois sont d’origine gouvernementale ? <o:p></o:p>

    - En 2005 également, le président de la commission des lois du Sénat a été plus franc : il a osé soutenir joliment qu’il n’était pas « souhaitable que l’État (pût) à son tour procéder à une dénonciation  » !

    - Auparavant, en octobre 2003, il s’était tout de même tenu un colloque au Sénat pour célébrer le 25e anniversaire de cette grande loi du 17 juillet 1978, sans que quiconque s’émût de l’opération qui, en 2000, l’avait dénaturée ! Seules Mmes Corinne Lepage et Christine Boutin se sont élevées contre cette loi en 2002.<o:p></o:p><o:p></o:p><o:p></o:p>

    Sauf erreur, cette nouvelle affaire de loi fort opportune qu’on découvre après coup bien cachée dans les plis d’ une loi fourre-tout adoptée à la va-vite au moment même où l’Église de Scientologie est poursuivie pour « escroquerie en bande organisée », paraît bien s’inscrire dans la ligne du précédent de la loi du 12 avril 2000.

    Paul Villach<o:p></o:p> ICI 


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