• ALI ZIRI

     

    Le doyen de la terre est mort samedi 18 juillet à 113 ans. En lisant l'article sur ce centenaire jovial et conservé grâce au « Whisky, aux femmes très libérées et aux cigarettes », je ne peux m'empêcher de penser à un autre homme mort récemment à 69 ans près de Paris. Et peut-être pas de mort naturelle, ni accidentelle.

     

    Le 9 juin, deux retraités auraient été roués de coups lors d'un contrôle de police dans la ville d'Argenteuil. Et l'un des deux retraités est mort. Les policiers ayant effectué dans ce contrôle officient toujours dans le même quartier. J'imagine un instant les amis et la famille du défunt croisant ces fonctionnaires de police sur le lieu même où un retraité, un jour de printemps, se serait fait tabasser à mort. Juste un fait divers balayé par le vent des dépêches AFP.

    Juste un retraité tombé en temps de paix

    Que s'est-il réellement passé ? Je ne connais pas les tenants et aboutissants de ce drame. En tout cas, un collectif s'est créé dans le quartier pour obtenir une enquête approfondie et la sanction des responsables de cette mort. Une bavure ou pas ? Affaire à suivre.

    Cet homme, ni doyen de la terre, ni réalisateur ou petit-fils de grand poète, ni chanteur ou footballeur, est passé à la trappe de l'histoire. Apparemment très peu d'écho dans la presse, où peut-être suis-je passé à côté des infos sur ce drame. Pourtant cette bavure -si elle s'avère en êre une- aussi importante que celles de Montreuil et ailleurs, n » a pas du tout suscité le même émoi ou ne serait-ce que des interrogations. Pourquoi ?

    Ce retraité, pas connu des médias (peut-être des services de police comme on entend souvent après des arrestations ? ) et pas jeune de cité -les jeunes font du bruit et attirent les caméras- va peut-être passer par pertes et profits des bavures qui se multiplient en France. Qui était-il ? Un type bien ? Un salaud ? Au fond, cet aspect là n'intéresse que ses proches et sa famille.

    Les gouvernants actuels rendent les flics intouchables

    Mais la manière dont son existence s'est achevée devrait intéresser tous les habitants de ce pays qui, à tout moment, peuvent subir un contrôle musclé. Surtout depuis que « l'outrage rébellion », arme non létale mais très efficace, peut-être dégainée à tout moment. Que peut donc faire un citoyen lambda face à un flic assermenté et buté ? Pas grand chose. Si ce n'est la fermer et espérer ne pas finir menotté et en garde à vue.

    Heureusement qu'une grande majorité des flics ne sont pas des adeptes de la bavure mais, à force de leur octroyer des droits de plus en plus importants et légitimer les violences policières, les gouvernants actuels les rendent intouchables et au dessus des lois qu'ils sont censés faire respecter. Combien de temps encore resteront-ils dans la légalité républicaine ? Peu à peu, pour faire plaisir à la place Bauveau, ils vont faire de l'excès de zèle et du chiffre ; tous les citoyens devront alors sortir casqués pour éviter un tir de flasball. Et personne ne viendra éructer en menaçant de karchériser les responsables de bavures…

    L'ancien ministre de l'Intérieur devenu président de la République va chaque année déposer une gerbe sur la tombe du soldat inconnu sous l'Arc de triomphe. Qui se souviendra le 9 juin prochain de ce retraité ? Et Carla Bruni, conviée à chanter pour l'anniversaire de Nelson Mandela, ira-t-elle fredonner un jour à Argenteuil « quelqu'un m'a dit… qu'un retraité de 69 ans est peut-être mort roué de coups par des policiers à quelques stations de métro de ma nouvelle maison » ?

    Au fait, cet homme avait un nom : Ali Ziri. Et il ne sera jamais doyen de la république française.

    Par Par Mouloud Akkouche , écrivain

  • Commentaires

    1
    reineroro Profil de reineroro
    Vendredi 25 Juin 2010 à 10:59
    Marine Vlahovic révèle aujourd’hui sur France Info qu’un rapport « accablant » de la commission nationale de déontologie de la sécurité relance la thèse de la bavure policière.

    L’explication de première autopsie (crise cardiaque due à un fort taux d’alcoolémie) est mise à mal par une autre expertise. Les médecins, qui ont de nouveau examiné le corps du retraité, découvrent de nombreux hématomes. 27 au total recensés sur le corps d’Ali Ziri. Certains sont très importants. Certains parlent déjà de bavure policière.

    Cette hypothèse est renforcée par un rapport de la commission nationale de déontologie de sécurité. Selon ce rapport, le traitement reçu par Ali Ziri après son arrestation a été particulièrement violent. Les images de vidéo surveillance le montrent. On y voit en effet Ali Ziri être expulsé du véhicule de police, jeté au sol, menotté, allongé par terre la tête dans le vomi.

    La commission nationale de déontologie réclame des sanctions contre les policiers visibles sur la vidéo. L’instruction du dossier Ali Ziri est toujours en cours. Arezki Kerfali doit quant à lui comparaître devant le tribunal en 2011 pour outrage à agent.
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