• Libye : l’ « aide humanitaire » des bataillons de l’UE se prépare

    Après avoir refusé de participer à la guerre en Libye, le gouvernement allemand se ravise : l’Allemagne, a annoncé le ministre des affaires étrangères Westerwelle, est prête à envoyer des troupes pour « fournir de l’aide humanitaire aux civils libyens ».

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    Insurgés libyens sur les lieux d’un bombardement "humanitaro-militariste" de l’OTAN contre une colonne de pro-kadhafistes

    Elles feront partie de l’opération « Eufor Libya » (Force de l’Union européenne en Libye), que l’UE s’apprête à lancer. L’objectif officiel est de « soutenir les agences humanitaires dans leurs activités ». Les groupes de combat de l’Ue s’en occuperont, en habits de « coopérants ».

    Ce sont des groupes militaires de la dimension d’un bataillon, chacun de 1.500 soldats, hautement entraînés pour être projetés avec un préavis de 15 jours dans des « zones de crise lointaines, comme celles des failing states (Etats en faillite) ». Les groupes de bataille, employés généralement « mais non exclusivement » sur mandat de l’ONU, conduisent des « opérations de combat dans un environnement extrêmement hostile (désert, jungle, etc.) ». Leur mission est de « préparer le terrain à de plus grandes forces de peacekeeping »

    Le quartier général de l’opération « Eufor Libya », dont dépendent les groupes de bataille de l’Ue, est localisé à Rome, sur l’aéroport « Francesco Baracca » de Centocelle. Commandé par le contre-amiral Claudio Gaudiosi de l’état-major italien. Il fait partie du Commandement opérationnel du sommet inter forces (Coi), qui planifie et dirige les opérations militaires à l’étranger, ainsi que les manœuvres interforces et multinationales dans le cadre de l’OTAN.

    Le « mérite » de la constitution de la Coi, par la loi n. 25 du 18 février 1977, revient au premier gouvernement Prodi (centre-gauche NdT) qui lança la restructuration des sommets des forces armées, en augmentant les pouvoirs du chef d’état-major concernant les opérations militaires à l’étranger. Juste à temps pour la guerre contre la Yougoslavie et les suivantes en Afghanistan, Irak et Libye, auxquelles ont participé les forces militaires italiennes. Le Coi a maintenant une ultérieure satisfaction : l’attribution au contre-amiral Gaudiosi du commandement des groupes de bataille de l’Ue pour l’opération « Eufor Libya ».

    Etant donné que les USA ne sont pas disponibles pour envoyer de troupes en Libye, entrent en jeu les groupes de la bataille de l’Ue, pour lesquels se prépare le premier véritable test sur le terrain. Tandis que les plus grandes puissances européennes, mais pas l’Allemagne, participent individuellement à l’opération « Protecteur unifié » sous le commandement de l’OTAN (c’est-à-dire étasunien), en attaquant depuis le ciel et la mer les forces gouvernementales libyennes afin d’ouvrir la voie aux rebelles, l’Union européenne en tant que telle s’apprête à débarquer des troupes militaires en Libye.

    Formellement pour fournir de l’aide humanitaire aux civils, en réalité pour soutenir les rebelles et préparer le terrain à des forces plus grandes de « peacekeeping » sous drapeau européen, OTAN ou autre. Leur premier objectif sera d’occuper les zones clé de l’industrie énergétique libyenne, formellement pour les protéger des forces de Kadhafi ou pour garantir un cessez-le-feu, en réalité pour couper Tripoli de sa source fondamentale de revenus.

    Deux scénarios se dessinent ainsi : ou une Libye « balkanisée », divisée en deux ou plusieurs états ethnico-tribaux, avec les plus grosses réserves énergétiques aux mains d’un gouvernement ami disposé à toute concession, ou une situation de type irako-afghan, avec le renversement de Kadhafi et son remplacement par un administrateur des intérêts coloniaux des Etats-Unis et de l’Europe unie.


    12 avril 2011 - Il Manifesto - Vous pouvez consulter cet article à :
    http://www.ilmanifesto.it/area-abbo...
    Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio


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  • Une mer de guerre



    Annamaria Rivera

    Traduit par  Fausto Giudice


    De nouveaux cadavres d’hommes, de femmes et d’enfants sont venus allonger la longue liste de ceux qui ont fait un immense tombeau de ce Mare Nostrum* qui fut autrefois une mer  permettant à des gens, des coutumes et des cultures de fraterniser, et devenu aujourd’hui une frontière blindée qui sépare et extermine, tuant ce qui reste de notre humanité.

    Les dernières 250 victimes du Canal de Sicile, des Érythréens et des Somaliens – que certains médias s’acharnent, malgré la dimension de cette tragédie, à qualifier de “clandestins” et d’“extracommunautaires” -, ne sont pas seulement mortes du fait de la prohibition de l’accès  à l’Europe, mais aussi de notre coupable ingérence “humanitaire” en Libye. On a préféré les bombardements aux corridors réellement humanitaires, on a ignoré cyniquement le devoir de sauver avant tout les êtres humains et, en premier lieu, les réfugiés, persécutés et pris au piège dans la guerre civile.

    D’ores et déjà nous le savons : même ces victimes par excellence, noyées (à cause de retards ou d’impéritie ?) au cours des opérations de secours des garde-côtes italiens, ne viendront pas solliciter l’empathie qui déclenche le ressort de la solidarité collective et induit la réflexion sur la folie de guerres “humanitaires” qui tuent des humains. Cela fait longtemps que notre malheureux pays n’éprouve plus les sentiments qui, il y a juste 20 ans, poussèrent les habitants de Brindisi, ville de 90 000 habitants, à restaurer, secourir et héberger dans leurs propres maisons 27 000 réfugiés albanais.
     
    Ce sont des eaux plutôt troubles qui ont coulé depuis sous les ponts : la propagande raciste et sécuritaire, le poison liguiste** administré jour après jour à des doses toujours plus élevées, une politique médiocre qui fait assaut de méchanceté à l’égard des “étrangers” dans la concurrence électoraliste, une Europe unie qui ne sait s’unir que quand il s’agit d’argent et défense de ses frontières contre l’irruption des Barbares. Si bien que pas même cette dernière tragédie, pas même les images des visages souffrants et terrorisés des rescapés et les récits de ceux parmi eux qui ont perdu en mer toute leur famille, pas même l’idée des enfants engloutis par les eaux qui auraient du les pousser vers le salut n’entraîneront de réflexion sur la folie collective dont nous sommes la proie.
     
    Nous applaudissons, plus ou moins tardivement, avec plus ou moins d’enthousiasme, au vent de printemps qui ébranle les régimes despotiques sur l’autre rive et nous acceptions le despotisme grossier des plombiers qui nous gouvernent, eux qui parlent d’êtres humains à la recherche d’un meilleur sort ou de salut en termes de robinets à fermer et de baignoires à vider.
     
    Nous participons à l’armée des “hommes de bonne volonté” qui vont pacifier la Libye à coups de bombes et nous nous fichons de nos malheureux ex-colonisés, d’abord discriminés ou réduits en esclavage, puis englués entre la guerre civile et l’intervention “humanitaire” : derniers du monde, sans paix et sans patrie, s’ils n’ont plus où aller, où retourner, c’est aussi grâce aux effets de longue durée de notre politique coloniale et néocoloniale.
     



    Le radeau des illusions, photomontage de Gérard Rancinan, Paris-Match n°3069, 13/3/2008
     

    Est-ce que nos plombiers de service joueront à nouveau aux victimes de l’Europe cynique et tricheuse qui n’arrive pas à les défendre contre le “tsunami humain” aussi à propos des survivants érythréens et somaliens et de ceux qui réussiront à arriver chez nous ? Est-ce que nos “hommes de bonne volonté” oseront subordonner le devoir d’accueillir dignement les réfugiés à quelque petit accord, en l’occurrence passé à l’arrachée avec l'hypothétique prochain gouvernement de transition libyen ?
     
    Une remarque basique enfin. Les révoltes qui ont renversé ou ébranlé les régimes dictatoriaux de l’autre rive sont animées dans beaucoup de cas par le désir de liberté et l’exigence de dignité : la liberté et la dignité signifient pour les jeunes révoltés aussi la liberté de mouvement et le droit d’aller chercher ailleurs un sort plus digne, sans mettre en danger leur propre vie. Les gouvernements de transition ne pourraient donc pas prétendre représenter la rupture radicale avec les anciens régimes sans en briser les axes porteurs : parmi ceux-ci, les accords bilatéraux qui ont fait d’eux les gendarmes féroces et stipendiés de la Forteresse Europe.

    En somme, une des conditions pour que les révolutions en cours soient de vraies révolutions, capables de conquérir des couches du peuple, réside dans leur volonté et possibilité de résister aux chantages européens et plus généralement atlantiques. Ce n’est ni facile ni sûr. Mais ce serait moins ardu si ceux qui refusent d’endosser le vieux rôle de chiens de garde des frontières des autres, avaient pour alliés sur cette rive-ci ceux et celles qui décideraient vraiment qu’ils et elles n’en peuvent plus du colonialisme, des guerres “humanitaires” et des frontières blindées et seraient, pour ces raisons et pour d’autres, disposés à se révolter contre les plombiers et “hommes de bonne volonté” en tous genres.
     

    NdT

    *Mare nostrum : expression latine signifiant "notre mer", employée couramment dans la Rome antique pour désigner la Méditerranée, considérée comme la piscine domestique de la Rome impériale, et reprise par Mussolini dans sa rhétorique impériale, dans un discours prononcé à Tripoli en avril 1926 et annonçant sa volonté de “refaire de l’Italie” la puissance contrôlant la Méditerranée.

    ** Liguiste : de la Ligue du Nord, raciste et allophobe.

     



    Merci à Tlaxcala
    Source: http://www.ilmanifesto.it
    Date de parution de l'article original: 07/04/2011
    URL de cette page: http://www.tlaxcala-int.org/article.asp?reference=4532


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  • Venezuela. Hugo Chavez : "Triste la révolution qui dépend d’un seul homme."

    Triste la révolution qui dépend d’un seul homme. Ce ne serait pas une révolution, elle serait trop fragile pour prétendre en être une ». C’est ce qu’a répondu le président Chavez à la question du journaliste uruguayen Federico Fasano, sur ce qui se passerait au Venezuela sans lui. Le mandataire a insisté sur le fait que le processus politique qui se vit au Venezuela est une situation sui generis. « Je ne me crois pas indispensable. Personne n’est indispensable » a-t-il dit. Il a rappelé un épisode de sa vie : à 18 ans il avait failli mourir noyé dans une rivière de son Etat natal de Barinas, dans les Llanos vénézuéliens. « Croyez-vous que si je m’étais noyé ce jour-là, la Révolution Bolivarienne n’aurait pas eu lieu ? L’homme individuel apporte son style, son rythme… à des processus qui ne dépendent pas d’un seul homme, mais qui sont le produit d’un temps historique » a-t-il affirmé.

    Révolution pacifique mais armée

    « On ne peut pas mener une révolution pleine et profonde sans pouvoir la défendre » a dit le Président Chavez, interrogé sur la politique militaire de la Révolution Bolivarienne. Il a affirmé que cette politique est orientée vers l’intégration humaine des forces armées dans révolution sociale. Il a rappelé que dans le cas de la Révolution cubaine, Fidel a dû créer une armée, contrairement au cas vénézuélien où la rébellion a surgi des casernes.

    Il a conclu qu’« aujourd’hui, les forces militaires vénézuéliennes sont une force qui se définit fièrement comme anti-impérialiste, révolutionnaire, socialiste », et a affirmé que «  sans eux (les militaires) il serait impossible d’avancer »

    Il a rappelé les évènements du 11 avril 2002, lorsque s’est produit le coup d’Etat dirigé par l’impérialisme étatsunien et l’oligarchie vénézuélienne, mené par certains hauts gradés formés par la School of Americas (NDT : école étatsunienne par laquelle sont passés un grand nombre de dictateurs et de bourreaux). « Leur coup a échoué. Les capitaines ont continué à m’appuyer, les soldats m’ont libéré et se sont unis au peuple… pas un seul soldat n’a tiré contre le peuple » a-t-il expliqué.

    « Pourquoi as-tu été si généreux avec les vaincus ? » "Est-ce une caractéristique de la Révolution Bolivarienne ?" a demandé Fasano. « Oui, je crois qu’il faut être généreux, écarter la rancune » a répondu Chavez.

    A 12 ans de son écrasante première victoire électorale comme Président de la République, Chavez et son gouvernement continuent d’étendre les droits politiques, économiques et sociaux.

    En 2010, les élections législatives ont marqué un moment particulier dans la consolidation de la démocratie et des droits civils et politiques dans le pays. Ces élections ont vu la participation d’une quarantaine de partis de la gauche à la droite et 66% de participation, un niveau historique à ce type d’élection. Les partis de l’opposition ont choisis de revenir dans le jeu démocratique et ont gagnés 65 des 165 sièges à l’Assemblée Nationale.

    Depuis 1998, 16 élections ont eu lieu au Venezuela et ont toutes été validées par les observateurs internationaux de l’UE ou de l’OEA, incluant l’historique référendum de 2004.

    Malgré les accusations de supposées atteintes à la liberté d’expression, plus de 86% des médias utilisant le spectre radioélectrique public sont dans les mains du secteur privé et la plupart d’entre eux sont contrôlés par l’opposition politique. Plus de 184 chaînes transmettent librement au travers du câble. Il suffit de regarder les vifs débats dans la multiple presse écrite et les titres disponibles dans les kiosques pour se rendre compte de la vivacité de la liberté d’expression et de la presse dans le pays.

    D’après le rapport régional de l’ONG chilienne indépendante Latinobarometro 2010, 84% des vénézuéliens appuient la démocratie dans leur pays ; c’est l’indice le plus haut de la région.

    De plus, depuis 1998, le gouvernement appuie fortement les médias communautaires, soutient le développement de l’industrie des producteurs indépendants et l’accès à Internet pour tous les vénézuéliens. Actuellement, plus de 33% de la population dispose d’un accès à Internet. Un énorme bond en avant, sachant qu’en 1998, il n’étaient que 3%. Ce qui a valu au Venezuela de recevoir en janvier 2011 un prix de l’UNESCO

    Le Venezuela a également fait d’énormes progrès dans la lutte contre la pauvreté, l’inégalité et l’exclusion sociale. Depuis 1998, la pauvreté a diminué de moitié et la pauvreté extrême a chutée de deux tiers. Environ 5 millions de vénézuéliens sont sortis de la pauvreté ou de l’indigence, selon des organismes indépendants comme la CEPAL (ONU).

    Les groupes traditionnellement exclus, comme les femmes, les communautés indigènes ou les groupe afro-descendants, se sont vus garantir leurs droits par la Constitution de 1999, augmentant ainsi leur participation dans le processus de changement qui se déroule au Venezuela.

    A la fin 2010, quatre des cinq pouvoirs publics, comme le Tribunal Suprême ou l’Assemblée Nationale étaient (co-)dirigés par des femmes. Les groupes indigènes ont acquis pour la première fois 3 sièges à l’Assemblée Nationale, même s’ils ne sont que quelques pour cent de la population. 42000 conseils communaux sont actifs à travers tout le pays pour décider, réaliser et surveiller les travaux publics requis par les habitants, et les lois récentes renforcent cet état participatif, basé sur le pouvoir communal. Enfin la réforme agraire (4 millions d’hectares remis aux paysans) et le transfert des technologies de partenaires du Sud permettent d’avancer rapidement dans la souveraineté alimentaire et le développement de la production nationale, pour sortir de la dépendance extrême du pays avant la révolution.

    Traduction : Sebastian Franco

    URL de cet article : http://www.larevolucionvive.org.ve/...


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  • Le procès de Rachel Corrie remet en cause l’impunité d’Israël (The Electronic Intifada)

    Plusieurs soldats israéliens ont été cités comme témoins à la Cour de Haifa en début de semaine, lors des auditions du procès de Corrie contre l’état d’Israël. Le procès traîne en longueur, mais des années après le meurtre de Rachel Corrie, l’impunité d’Israël fait l’objet d’un sérieux examen et est remise en question.

    Il y a huit ans, la militante américaine du Mouvement de Solidarité, Rachel Corrie, a été écrasée par un bulldozer blindé Caterpillar D9 de fabrication étasunienne à Rafah, au sud de la bande de Gaza occupée.

    Corrie, qui portait un gilet fluorescent orange et parlait dans un porte-voix, essayait d’empêcher la démolition de la maison d’une famille palestinienne par l’armée dans le corridor de Philadelphie, une large bande de terre de Gaza qui longe la frontière égyptienne en coupant Rafah en deux et dans laquelle des centaines de maisons ont été démolies de 2002 à 2004 selon les rapports sur le terrain de l’association des droits de l’homme Human Rights Watch.

    Après des années de procédures légales, les parents de Rachel Corrie, Cindy et Craig, ont réussi à faire comparaître des soldats qui étaient en service ce jour-là à Rafah devant la Cour de Haifa. Les auditions ont commencé en mars 2010 et se sont poursuivies en septembre, novembre et au début de cette semaine.

    Les parents de Rachel Corrie ne demandent qu’un dollar de dommages et intérêts à l’armée israélienne mais l’accusent d’être responsable de la mort injustifiée de leur fille et de négligence criminelle.

    Des témoignages oculaires d’autres militants du Mouvement International de Solidarité (ISM), attestés par des preuves photographiques, indiquent que Rachel a été écrasée par l’énorme lame d’un bulldozer et est morte peu après. L’armée israélienne et les hommes de loi qui la défendent, prétendent que la mort de Rachel était un accident, que le conducteur du bulldozer ne l’avait pas vue et que ce n’est pas la lame qui l’a tuée mais plutôt un tas de cailloux que le bulldozer a projeté sur elle en rasant la maison.

    Dans leurs témoignages, les soldats affirment inébranlablement que tous les Palestiniens de ce secteur étaient armés et considérés comme dangereux par l’unité militaire et que les ordres étaient de tirer pour tuer quand ils démolissaient des maisons. Ils sous-entendent par là que Rachel et les autres militants du Mouvement se sont mis eux-mêmes en danger en pénétrant dans une zone militaire fermée et que par conséquent ni les soldats ni leurs chefs ne peuvent être considérés comme responsables de sa mort.

    Mais la question que le juge s’est bien gardé de soulever c’est comment et pourquoi les soldats et leurs bulldozers blindés se trouvaient à cet endroit. Les soldats et leurs chefs obéissaient à l’ordre de démolir les maisons dans le corridor de Philadelphie - le nom qu’Israël donne à la bande de terre [d’environ 10 km de long NdT] qui lui sert de zone tampon entre Gaza et l’Egypte.

    Ces démolitions ont commencé en 2002 et se sont poursuivies au cours des deux années suivantes provoquant le déplacement de milliers d’habitants. Selon Human Rights Watch, après que les maisons aient toutes été démolies, un mur de fer a été érigé le long du corridor de Philadelphie ("Razing Rafah," 17 October 2004). La démolition des maison palestiniennes est une violation de l’article 53 de la Quatrième Convention de Genève qui stipule que "Toute destruction par une puissance occupante de biens immobiliers ou personnels appartenant individuellement ou collectivement à des personnes privées.... est interdite, sauf si cette destruction est rendue absolument nécessaire par des opérations militaires."

    Israël qui a signé la Convention, prétend que la loi "ne s’applique pas à son occupation de la Cisjordanie et de la bande de Gaza," selon un rapport détaillé d’Amnistie Internationale ("Document - Israel and the Occupied Territories : Under the rubble : House demolition and destruction of land and property," 17 May 2004).

    Amnistie Internationale ajoute que "Des évictions forcées opérées sur une telle échelle violent le droit des habitants au logement, qu’on les justifie par des "besoins sécuritaires/militaires" ou l’application de lois de planification ou qu’elles soient une forme de punition collective. Selon le droit international, il est interdit aux états de procéder par la force à des évictions."

    Les forces d’occupation ne se sont pas privées de violer abondamment le droit international - et ce sont ces violations auxquelles Rachel Corrie et ses camarades militants s’opposaient et qu’ils voulaient empêcher.

    S.R., le commandant d’une unité de l’armée israélienne qui a témoigné mercredi et dont le visage était dissimulé par un écran pour que les Corrie ne puissent pas le voir, a dit que "aucune des maisons [qui avaient été rasées dans le secteur] n’étaient habitées... Elles servaient toutes de bases à des activités terroristes."

    C’est une allégation mensongère ; la maison que Rachel essayait de protéger était habitée par la famille Nasrallah. Ni le Dr. Samir Nasrallah, un pharmacien, ni les membres de sa famille qui habitaient cette maison n’ont jamais été accusés "d’activités terroristes" par l’armée israélienne. Le Dr Nasrallah n’a jamais représenté la moindre menace pour l’armée ni le gouvernement israéliens la preuve c’est qu’Israël l’a même autorisé à aller aux USA animer une tournée d’information avec les Corrie -déplacement qu’un Palestinien soupçonné d’avoir des liens avec des terroristes n’aurait jamais pu faire.

    Quand j’ai assisté à une série d’auditions en septembre dernier, un autre responsable de l’entraînement militaire a affirmé avec impudence que "en temps de guerre, il n’y a pas de civils". Craig Corrie m’a dit que cette aveu avait été un choc pour sa famille et ceux qui les accompagnaient au procès mais pas une surprise vu la manière dont se comportait l’armée depuis le début.

    A Gaza ce n’était pas une guerre ; c’était -et c’est toujours- une occupation militaire agressive, meurtrière et inégale infligée au million et demi de résidents de Gaza.

    Human Rights Watch affirme que, le long de la frontière avec Israël cette fois, 2500 maisons de Gaza ont aussi été détruites de 2002 à 2004 après l’éclatement de la deuxième Intifada, pour que l’armée puisse réaliser ce qu’elle appelle la "zone tampon". La zone tampon est une bande de terrain de 300 mètres de large, un no-man’s land militarisé, le long de la frontière avec Israël qui a privé Gaza de plus de 35% de ses terres cultivables - et coûté la vie à plus de 100 Palestiniens tués par balle depuis mars 2010.

    En plus de la famille Corrie, assistaient aux audiences des militants, des journalistes et des observateurs spécialisés dans le droit de l’Ambassade des USA, the National Lawyers Guild, Human Rights Watch, Al-Haq, Avocats Sans Frontieres, Amnesty International, Yesh Din et d’autres organisations des droits de l’homme et des droits civils internationales, palestiniennes et israéliennes.

    Dans un communiqué de presse, Zaha Hassan de the National Lawyers Guild (l’association nationale des avocats) a dit "cela fait maintenant huit ans que la famille de Rachel et nous tous qui venons au procès pour les soutenir, nous attendons qu’on nous dise pourquoi le commandant de l’unité à ordonné au conducteur du bulldozer de passer sur l’endroit même où Rachel était en train de crier dans un porte-voix" ("National Lawyers Guild Free Palestine Subcommittee to Observe Resumption of Trial Brought by Family of Slain Peace Activist Rachel Corrie," 4 April 2011).

    Hassan a ajouté : "La justice exige qu’on réponde à ces questions et qu’on demande des comptes à ceux qui sont responsables de sa mort."

    Mercredi, le juge, Oded Gershon, a avoué fièrement en pleine Cour, qu’il avait été juge militaire plus tôt dans sa carrière. On ne sait pas encore si son parti pris en faveur de la politique de l’armée influencera la décision finale dans l’affaire Corrie, mais l’événement dans son entier constitue un précédent d’une importance capitale.

    Des soldats israéliens responsables de la démolition de maison et du meurtre de Palestiniens et d’internationaux peuvent désormais être amenés devant la justice. Les ordres militaires sont méticuleusement examinés. Des fissures dans le système extrêmement solide de l’impunité militaire commencent à apparaître et les Corrie sont déterminés à élargir ces fissures pour que d’autres familles endeuillées puissent elles aussi demander justice.

    La prochaine série d’auditions commence le 22 mai et la salle du palais de justice sera à nouveau bondée. Pour les Corrie et les membres des innombrables familles palestiniennes qui attendent depuis le début de l’occupation israélienne en 1948 qu’on leur rende enfin justice, le processus légal est peut-être pénible et douloureux mais il est vital. Cela fait trop longtemps qu’on attendait ça.

    Nora Barrows-Friedman

    Nora Barrows-Friedman est une journaliste indépendante primée qui écrit pour The Electronic Intifada, Inter Press Service, Al-Jazeera, Truthout et d’autres organes de presse. Elle fait régulièrement des reportages en Palestine.

    On peut trouver le résumé des auditions et d’autres informations sur le site web de la fondation de Rachel Corrie à l’adresse rachelcorriefoundation.org.

    Pour consulter l’original : http://electronicintifada.net/v2/ar...

    traduction : D. Muselet

    URL de cet article 13378
    http://www.legrandsoir.info/Le-proces-de-Rachel-Corrie-remet-en-cause-l-impunite-d-Israel-The-Electronic-Intifada.html

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  • Après le débat, on leur dit quoi aux musulmans ?

    Caleb IRRI

    Il y a ceux qui sont pour, et puis il y a ceux qui sont contre. Et puis il y a le reste, c’est à dire la majorité des citoyens, qui s’en foutent éperdument. Mais le débat sur l’Islam, renommé ’débat sur la laïcité’, aura bien lieu, et ce malgré tous les ’débats’ justement lancés sur sa tenue- ou pas. Une chose est sûre cependant, c’est qu’à cette occasion les masques sont tombés, comme je l’avais déjà fait remarquer à l’occasion des cantonales. Au sein de la majorité présidentielle des voix se font discordantes, et c’est tant mieux : le pouvoir du président sur la majorité s’effrite, et on commence enfin à trouver qu’il va trop loin.

    Car ce débat sur l’Islam, susceptible de remettre en cause la loi de 1905 sur la séparation de l’Eglise et de l’Etat, fait aujourd’hui peur à ceux-là mêmes qui ont compris où le chef de l’Etat voulait les conduire : c’est-à-dire la stigmatisation des Musulmans, avec comme objectif la création d’un ’bouc-émissaire’ économique, à travers l’utilisation des évènements actuels pour détourner l’attention du peuple des véritables responsables de l’état du monde : les gouvernants eux-mêmes.

    En mettant en place ce débat, il sera donc question de l’Islam, afin de savoir si cette religion convient ou non à la définition qu’on voudrait faire de la laïcité, et par conséquent si cette religion pose ou non un problème vis à vis des valeurs que prétend défendre la France.

    Je ne reviendrai pas ici sur les définitions de la laïcité, ni même sur l’interprétation que l’on peut faire de la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat, je n’en ai pas les compétences, et d’autres le font bien mieux que moi. Mais je voudrais m’intéresser à ce que ce débat pourrait entraîner comme conséquences : car s’il y a débat, il y a conclusion du débat, et théoriquement réponse à la question : y a-t-il un problème musulman en France ?

    Si la réponse est ’non’, alors nous rentrerons tous chez nous fiers et contents, le score du FN devrait mathématiquement baisser, et tout retournera dans l’ordre rapidement.

    Mais si l’on considère, à la fin du débat, qu’il y a bel et bien un ’problème musulman’ en France, que fait-on ?

    On interdit la religion musulmane ? On retire la nationalité aux Musulmans, ou leur colle-t-on un croissant rouge sur le corps ? Est-ce qu’on les torture, est-ce qu’on les réduit en esclavage, ou leur supprime-t-on simplement des droits sociaux ? Doit-on les mettre dans des camps pour les exterminer, ou arrête-t-on juste de commercer avec eux ? Va-t-on leur déclarer la guerre, les envahir ou seulement les expulser ?

    Et puis ensuite, faut-il considérer tous les Arabes comme des Musulmans ? Peut-on les qualifier de « race » au même titre que les Juifs autrefois, ou comme des adeptes d’une religion ? C’est quoi le problème exactement, les étrangers ou leur religion ? Et les enfants de Musulmans seront-ils alors « automatiquement » Musulmans eux-aussi ?

    A partir du moment où l’on juge qu’il y a problème, il faudra bien admettre qu’il y faut trouver des solutions... Y êtes-vous prêts ? Est-ce vraiment cela que vous voulez ? Que voulez-vous à la fin ? que les Musulmans ’périssent’ par vos mains, ou seulement qu’ils s’intègrent ? Dans le premier cas, imaginez ce que cela signifie. Et dans le second cas, il vous faudra alors regarder en face le véritable responsable des situations qui vous mettent mal à l’aise, le gouvernement lui-même, et nous tous à travers lui. Car quels sont les reproches que l’on entend à propos des Musulmans ?-Ils prient dans la rue ? offrez leur des lieux de culte, et ils disparaîtront.

    -Vous ne voulez plus voir de burqas ? donnez-leur l’exemple, et ôtez-vos propres lunettes ’écran-total’. Si ces femmes apprenaient à lire et lisaient le Coran, elles verraient que cette pratique n’est pas obligatoire.
    -Vous trouvez qu’ils reçoivent trop d’aides sociales ? donnez leur du travail !
    -Des jeunes des cités vendent de la drogue et des armes ? Légalisez le cannabis et offrez-leur d’autres perspectives d’insertion.
    -Il y a trop de travail au noir, et vous voulez qu’ils payent des impôts ? Donnez-leur des papiers.
    -Vous ne comprenez pas qu’ils se réunissent tous ensemble dans des cités ghettos ? Offrez leurs des logements décents et moins chers, ils ne refuseront pas
    -Ils vous regardent de travers ? changez votre propre regard sur eux, et les leurs suivront.

    Lorsque vous arrivez dans un lieu que vous ne connaissez pas, vous aimez à ce que ceux qui sont déjà là, et qui se connaissent tous, vous accueillent avec gentillesse pour vous présenter, pour vous apprendre les règles et traditions locales, pour vous intégrer. Si personne ne vous parle et qu’on vous laisse de côté, vous vous renfermerez sur vous, et ne chercherez que la compagnie des autres exclus, qui eux vous comprennent et vous accueillent. En acceptant de croire qu’il existe un « problème musulman », nous rendons nous-mêmes possible l’existence de celui-ci. Nous excluons ceux-là mêmes à qui nous reprochons de ne pas s’intégrer... Que feriez-vous à leur place ? 

    Réfléchissez bien à ce que vous voulez, mais aussi aux conséquences que vos opinions impliquent dans la réalité. Car admettre que les Musulmans sont un problème pour la France conduira à l’adoption de solutions concrètes. Le voulez-vous vraiment ?

    Alors soyez sérieux, et stoppez-là la discussion : il n’y a pas d’autre alternative envisageable que l’intégration, un point c’est tout. 

    Caleb Irri

    http://calebirri.unblog.fr

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