• Kadhafi reprend Ras Lanuf

    Jeudi 10 mars au matin, les troupes de Saadi, fils de Kadhafi, ont repris aux insurgés la ville de Sidra, avant de se diriger vers le port pétrolier de Ras Lanuf. Arrivée à 5 km de la ville, l’armée loyaliste a engagé son bombardement : tirs d’artillerie, bombes larguées depuis les airs, et peut-être même des missiles lancés depuis des navires.  Dans Ras Lanuf, un hôpital de fortune a été monté en pleine rue, le vrai ayant été touché par les explosions. Malgré la violence de cette offensive, Kadhafi donne encore l’impression de se retenir. Il aurait pu depuis longtemps bombarder les portes de Ras Lanouf et de Brega, et détruire le peu d’armes lourdes dont disposent les insurgés. Mais il semble encore chercher une issue, une voie entre la défaite face à la révolution et un massacre donnant prétexte à une intervention étrangère. Par contre, s’il décide de tout mettre en oeuvre pour écraser les insurgés, on peut s’attendre à un tapis de bombes, ainsi qu’à des armes chimiques.

    Je suis parti à Brega, puis à Benghazi, après la perte de Ras Lanouf, vers 17H. Malgré son apparente « simplicité », le désert est bien un terrain en trois dimensions. On pourrait croire que les révolutionnaires n’en utilisent que deux, en réalite, ils n’en utilisent qu’une : la route. C’est la rançon de la guerre en jeans de marque et parfums bons marchés, personne ne se rapporte au terrain (et au reste) comme à un espace lisse ; personne ne batit de défenses, ne creuse d’abris, ne cherche à se cacher. Le soir-même, les troupes loyalistes pilonaient Brega. Du côté des insurgés il se mumure que l’armée (ou ce qu’il reste d’armée reguliere) a en réalité tendu un piege à Kadhafi en lui laissant Ras Lanouf, et que l’offensive des insurgés reprendra dès demain depuis Brega. Le fils Kadhafi, lui, prétend désormais vouloir marcher sur Benghazi.

    C’est un objectif d’importance, puisqu’il s’agit de la plus grande ville encore tenue par les insurgés, et c’est là qu’a élu domicile le Conseil National de Transition. La décision de la France aujourd’hui de reconnaître ce dernier comme seul interlocuteur légitime pour la Libye, ainsi que l’action de la diplomatie française sur place, a produit l’apparition de drapeaux bleus-blancs-rouges un peu partout et de délicieux slogans, tels ces « Merci Sarkozy » scandés par des femmes en niqab (vous apprécierez l’ironie de la situation).

    On peut s’avancer à dire que la Libye connaît une insurrection, un soulèvement populaire, mais pas encore une révolution. Contrairement, à ce que l’on pouvait certainement voir à Téhéran en 1979, il faudrait être sacrèment borné pour voir ici une situation de révolte contre l’Occident, ou même un début de critique de l’idee de la vie hégémonique dans nos pays. La situation est même fort différente de celle de la Tunisie pendant l’occupation de la Casbah ou de l’Egypte pendant celle de la place Tahrir. Ce qui prévaut ici c’est une unité contre le tyran Kadhafi. Il n’est pas question pour l’instant d’autre chose que d’un changement de dirigeants. C’est ce que montre encore le soutien dont peut se prévaloir le Conseil National de Transition, dont le rôle se limite principalement pour l’instant à des tractations diplomatiques.


    Il y a quelques jours, un lecteur avait posé une question sur l’influence de la « structure tribale » de la Libye sur l’insurrection. Il posait notamment la question des réglements de compte, ou de la naissance d’un nouveau régime autoritaire basé sur cette structure.
    Le caractère tribal de la guerre est en vérité peu marquant. Peut-être est-ce en partie lié au fait que la guerre se situe plutôt dans le nord du pays. Quoiqu’il en soit l’armée des shebab est une chose bigarée, composée de gens de toute la côte ouest du Cyranéïque. Il y a ici des personnes orginaires du Tchad ou du Mali vivant depuis longtemps sur la côte libyenne, sans compter les nombreux Egyptiens, et même quelques étudiants palestiniens, venus soutenir l’insurrection.
    S’il devait y avoir des luttes d’influence entres groupes tribaux, cela passerait plus certainement par les toutes jeunes institutions.

    Quant à l’armée de Kadhafi c’est avant tout une armée payée. Cette guerre apparaît de plus en plus comme une guerre privée d’un homme contre un peuple.

    Ce qui nous amène à une seconde question qui a été posée, concernant le soutien étranger à l’insurrection, et l’éventuelle création de brigades internationales  (comme ce fut le cas durant la guerre d’Espagne).

    Pour ce qui est du soutien logistique, ce qui pouvait être fait très vite est déja en cours. Sur le front, il ne manque ni de nourriture, ni de vêtements, ni d’eau, ni d’argent, ni d’armes légères. C’est le fait des premiers pillages, mais aussi de livraisons de matériel, qui semblent venir des Emirats arabes, de Dubaï, et surtout d’Egypte. Ce qui manque désormais aux insurgés (en terme de matériel militaire en tout cas) ce sont des armes lourdes, et la coordination ainsi que les connaissances nécessaires à leur emploi. Il a déjà été écrit beaucoup de choses sur l’inexpérience des insurgés sur le front.

    Beaucoup de blessés le sont par des tirs de petit calibre, que l’on peut soupçonner être en fait des tirs amis. Leurs mitrailleuses 12,7mm ont tendance à s’enrayer. Et ils ne disposent pas de certaines informations militaires importantes (des tables de tir pour leurs armes soviétiques, par exemple).
    Si la guerre s’éternise on peut toujours s’attendre à ce que des combattants d’autres pays arabes (voire d’ailleurs) viennent rejoindre les insurgés – je parle du monde arabe parce qu’il est dans son entier lancé dans un mouvement commun qui a connu des succès et des échecs variés depuis la Tunisie. Mais, pour l’instant, à l’évocation d’éventuels combattants « étrangers » les gens ici éprouvent plutôt de la méfiance (crainte de la récupération, par exemple).

    Q., D., E., Benghazi, le 11 mars.


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  • Kadhafi, le Grand Argentier : Tous pourris ? Non, seulement tous kadhafisés, benalisés, moubarakisés, mohamedsixisés, bouteflikisés…

    par FG, 11/3/2011 Ici

    Le Colonel fou de Tripoli a réagi au quart de tour à la décision de Sarkozy de reconnaître le Conseil national de transition libyen comme gouvernement du pays. Il a menacé de faire des révélations pouvant provoquer la chute du locataire de l’Élysée. Ces révélations concerneraient le financement par le régime libyen de la campagne électorale qui vit l’élection de Sarkozy. Le Colonel n’est pas seulement fou, il est naïf.
     
    Croit-il vraiment que de telles révélations pourraient amener la chute de Sarkozy ? Jamais révélations n’ont provoqué de chute de président français, ou occidental. La seule exception à la règle est l’impeachment de Nixon suite au Watergate. Les révélations peuvent provoquer le limogeage de ministres, comme cela a été le cas pour Eric Woerth suite au bettencourtgate et Alliot-Marie suite au tabarkagate. Mais le diamant offert par Kadhafi à MAM n’a pas suscité l’intérêt des médias, ni en France ni en ailleurs. Et les vacances de François Fillon dans des hôtels de luxe égyptiens aux frais de Moubarak n’ont eu aucun effet sur le locataire de Matignon. Il n'y a pas eu d'Assouangate. Et il n'y aura sans doute pas de kadhafigate.
     
    Kadhafi, comme Ben Ali, comme Moubarak, comme Mohamed VI du Maroc, comme Bouteflika, comme tous les dictateurs du monde arabo-islamo-pétrolier, ont acheté tout ce dont ils avaient besoin en Europe :
     
    - Des actions et des participations dans des banques, des entreprises, des clubs sportifs,
    - Des hôtels particuliers, des villas, des appartements, des fonds de commerce, des voitures de luxe, des bateaux, des bijoux, des fourrures etc. pour eux et leurs familles,
    - Des prostitué(e)s, des chanteuses, des danseuses, des call-girls et autres escort boys,
    - Et enfin, last but not least, des hommes et des femmes politiques, des fonctionnaires, des policiers, des douaniers, des journalistes et autres faiseurs d’opinion.
    Les achats d’hommes et de femmes politiques se font sous trois formes principales :
    - les rétro-commissions versées sur les commissions versées pour tout contrat commercial d’importance ;
    - les dons aux partis en périodes de campagnes électorales
    - Les « petits cadeaux » personnels aux chefs de ces partis.
     
    Un petit exemple : Saïf El Islam Kadhafi, Moustapha Zarti et Jörg Haider se sont connus à l’Université privée où ils faisaient leurs études de managers à Vienne dans leur jeunesse. Ils sont devenus copains comme cochons. Haider est devenu gouverneur de Carinthie et Saïf “gouverneur de Tripolitaine”, successeur putatif de son colonel de papa. Il a donc été amené à brasser les milliards de pétrodollars affluant dans les caisses libyennes. Résultat – entre autres - : «Il nous faisait parvenir régulièrement de l’argent en liquide avant les campagnes électorales», a déclaré un ancien proche du leader de l’extrême-droite autrichienne en août 2010. Haider, qui dénonçait les privilèges et la corruption de son vivant, a personnellement profité de cet argent, a jouté la source, précisant qu’une somme de 5 millions d’euros était déposée au Liechtenstein. Gerald Mikscha, ancien secrétaire personnel de Haider et trois autres personnes de confiance avaient accès à ces comptes.
     
    Si Kadhafi offrait 5 millions à un petit leader d’un petit pays d’Europe, combien en a-t-il offert au grand leader d’un grand pays d’Europe ? 50 ? 100 ? L’histoire le dira. Comme elle dira que ces dictateurs n’étaient – et ne sont – pas seulement les ennemis de leurs peuples, mais aussi ceux des peuples d’Europe, dont ils ont permis qu’ils soient gouvernés par leurs acolytes, auxquels ils servent, en fin de compte, de modèles, consciemment ou inconsciemment (voir les partouzes « bunga bunga » de Berlusconi, inspirées directement de celles de Kadhafi).
     
    Qui se rassemble s’assemble, certes, mais on le sait depuis longtemps : nos chefs à nous, Européens baignant dans la démocratie – ou la démocrassouille ? – ont l’ingratitude et la traîtrise inscrites dans leurs gènes. « Quand le citron est pressé, on le jette », répondit Frédéric II de Prusse à Voltaire, lorsque celui-ci s’étonna que le roi ne veuille plus l’héberger à Berlin.
    Kadhafi avait depuis longtemps fait le choix de distribuer son argent à droite, après le temps héroïque où il finançait les résistants des quatre coins de la planète. Il a ainsi creusé sa propre tombe. Tant pis pour lui.

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  • Al Jalaa Hospital, Benghazi, March 10 2011

    English transcription: http://pastebin.com/HU5pazNN

     


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  • Egypte: L'armée de Tantawi mise à nu

    Le Caire, Mars 2011. L'armée de Tantawi, chef suprême du Conseil Supérieur des Forces Armées vient de montrer son vrai visage au peuple qu'elle prétend défendre. A 17h15, c'est main dans la main que des militaires et des hommes de mains en civils armés de battes (les baltageyyas)  ont attaqués les manifestants de la place Tahrir. Les tentes ont été détruites avec violence. Les manifestants battus, arrêtés puis emmenés par la peau du cou au Musée du Caire qui sert de prison provisoire.

    Les baltageyyas, sous le contrôle et l'autorité des militaires ont arrêté de manière sélective des manifestants de la place. Ils s'est avéré que beaucoup de ceux que nous pensions être des "amis" étaient en réalité des infiltrés. La violence de cette descente était totale. Les baltageyyas se servaient de bombes aérosol qu'ils enflammaient pour s'en servir comme de napalms. Voir la vidéo tournée il y a quelques heures.

    Il ne subsiste plus aucun doute. L'armée de Tantawi est du mauvais côté et tient, depuis le début un double-langage: d'un côté celui d'un garant de l'établissement d'une Egypte démocratique et de l'autre celui d'un casseur de révolution utilisant la torture et la violence.

    Pour ceux qui sont sur place, il paraît de plus en plus clair qu'il y a réellement deux courants au sein de l'armée. Le premier est celui de Tantawi qui, aujourd'hui, ne cache plus son jeu. Le second est celui beaucoup respectueux de la révolution, de ses demandes et, surtout, de sa légitimité.

    Il est fort propable que le peuple égyptien s'unisse à nouveau après ces quelques jours ou toutes les tentatives ont été menées pour diviser les chrétiens et les musulmans, les femmes et les hommes, les égyptiens en général et les manifestants.

    La réponse devrait se faire connaître demain, mais surtout vendredi.

    On peut également s'attendre à quelques remous au sein de l'armée qui conduiraient, peut-être à un "coup" et à un renversement du système Tantawi qui n'est autre — Ô surprise — que celui de Hosni Moubarak, ce président prétendument honni qui passe des journées tranquilles dans un palais près de la mer.

    Cherchez l'erreur.

    Cris d'Egypte


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  • Les 8 de SEGI
    Contre le mandat d’arrêt européen : extension du domaine de la lutte au Pays basque nord




    Michel Porcheron

    Huit jeunes Basques indépendantistes de Segi, recherchés par la justice espagnole, se réfugient en France où ils poursuivent leur action. Ils rejoignent la lutte d’Aurore Martin, cachée quelque part au Pays Basque nord depuis deux mois   

    « Il y a de cela quatre mois, ils et elles ont dû fuir de la scène politique publique suite à la rafle de la police espagnole contre Segi. Ils sont réapparus lors d'une conférence de presse lundi  matin 21 février à Ispoure, avec le soutien d'une centaine de personnes. Cette semaine, en plus de dénoncer leur situation, ils et elles souhaitent renouveler leur engagement politique » (source : http://auroremartin.over-blog.com)  

    Le groupe compte cinq jeunes gens et trois jeunes femmes, tous âgés de 20 à 25 ans. Il s'agit de Beñat Lizeaga Urkidi (originaire de Zumaia, 22 ans) , Irati Tobar Eguzkitza (Portugalete, 24ans), Endika Perez Gomez (Larrabetzu, 23 ans), Jazint Ramirez Cruz, Aitziber Plazaola Oregi (Bergara, 25 ans), Xalbador Ramirez Cruz (Saint-Sébastien, 20 ans), Aiala Zaldibar Alvarodo (Vitoria-Gasteiz, 24 ans) et Bergoi Madernaz Del Pozo (Vitoria-Gasteiz, 23 ans).  

    Face à la menace d'un mandat d'arrêt européen (MAE) à leur encontre et le risque d'être arrêtés et jugés au tribunal de Pau, les huit jeunes indépendantistes  qui ont assuré avoir toujours mené leur action politique de façon publique, ont fait appel à la population et aux organisations politiques et sociales à les soutenir et à les protéger. Ispoure est une localité de la Basse Navarre,  Pyrénées Atlantiques, près de Saint-Pied de Port.

    Leur organisation, Segi, est interdite dans l’État espagnol mais légale en France.

    Action des 8 jeunes Basques contre le mandat d'arrêt européen

    Selon le quotidien Sud-Ouest, Aiala Zaldibar Alvarado, en cours de formation d'éducatrice, est déjà sous le coup d'un MAE émis par Madrid, activé par la France et validé le 1 février par la cour d'appel de Pau.

    Arrêtée le 18 janvier à Bayonne, laissée en liberté sous contrôle judiciaire, Aiala Zaldibar attend le verdict de la Cour de cassation auprès de laquelle elle a déposé un recours. Ceci selon le schéma de la procédure type qui, dans le cas de militants de nationalité espagnole, débouche immanquablement sur une remise à la justice espagnole, ajoute le quotidien Sud-Ouest.

     

    Aiala Zaldibar (au premier rang à gauche) à Ispoure. PHOTO JEAN-DANIEL CHOPIN

    Tous sous le coup d'un avis de recherche et d'un mandat d'arrêt en Espagne, aucun d'entre eux (exceptée Aiala Zaldibar), précise Sud-Ouest, n'est pour l'heure visé par la justice française.

    Tous ont l'intention de passer la semaine au Gymnase Faustin Bentaberri, à Ispoure. 

    Le Journal du Pays Basque a publié une lettre ouverte d'Aiala Zaldibar Alvarado (transmise par Askatasuna), datée du 19 février 2011

     « J’ai fui… »

    Aiala Zaldibar s'est expliquée en ces termes : « Lorsque j'ai appris mon ordre d'arrestation, j'ai décidé de fuir mon village, étant donné que beaucoup de personnes, lors des rafles précédentes, ont été arrêtées et torturées pour leurs idées politiques (…) En participant à la semaine d'action organisée à Ispoure, je souhaite dénoncer ma situation, et plus généralement la situation de toute la jeunesse indépendantiste du Pays basque. Je dénonce aussi le déni de justice que le mandat d'arrêt européen suppose… »

    Le lundi 21 février, à visages découverts, ils ont pris la parole dans le gymnase d'Ispoure, sous des banderoles réclamant le respect des « droits civiques et politiques », pour notamment dénoncer le mandat d'arrêt européen qu’émet l’Audiencia Nacional espagnole contre ceux qu’elle accuse d'être proche de ETA, ainsi que la « politique répressive » exercée à leur encontre, selon leurs déclarations.

    Les Huit ont exposé   comment ils ont réussi à fuir  l'opération policière d’octobre dernier. Plus de cent personnes entouraient les jeunes de Segi lors de leur conférence de presse. Elles forment un nouveau collectif , le  "Collectif contre le mandat d'arrêt européen", incluant  le parti autonomiste Abertzaleen Batasuna, le parti radical indépendantiste Batasuna interdit en Espagne, l'union syndicale « Solidaires » et le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA).

    « Il est clair, indiquait, au nom du Collectif Francis, Francis Charpentier après avoir évoqué le cas d'Aurore Martin, que le débat entourant le mandat d'arrêt européen n'est pas celui de la nationalité mais celui des atteintes aux droits civils et politiques, le vrai problème est là… (…) Les illégalisations de Segi et d'autres organisations comme Askatasuna, Batasuna... laissent carte blanche à l'Etat espagnol pour condamner une activité politique. Ce ne sont pas des actions qu'ils jugent mais des idées.»

    Aurore Martin vit cachée depuis le 21 décembre pour se soustraire à sa remise à l'Espagne, validée par la justice française.

    L'un des jeunes Basques a estimé que «c'est parce que nous menons la lutte en faveur de l'indépendance et du socialisme que nous sommes en permanence punis, fichés, arrêtés, torturés et persécutés. Nous sommes définis comme `terroristes' parce que nous militons dans les assemblées d'étudiants, dans les mouvements féministes, en faveur du droit au logement ou encore parce que nous travaillons en faveur du gaztetxe.» Il a également fait allusion au nouveau contexte politique demandant aux «Etats espagnol et français [...] d'ouvrir la voie de la négociation.»

    Un document comportant des témoignages de cinq jeunes (dont deux femmes) arrêtés en octobre et décembre 2010, sur les pressions et mauvais traitements (1) auxquels seraient soumis les militants basques arrêtés en Espagne a été distribué.

    Entré en vigueur en France le 12 mars 2004, le mandat d'arrêt européen a été mis en place à la demande de l'Espagne pour simplifier les procédures d'extradition. Le mandat d'arrêt est dénoncé par les organisations des droits de l'homme comme « permettant de museler les opposants politiques, notamment par une extension abusive de la notion de "terrorisme" qui peut englober désormais toute expression politique tant soit peu radicale".

    Les mobilisations contre le mandat d'arrêt européen se sont intensifiées au Pays Basque nord après le feu vert de la justice française au MAE de l'Espagne à l'encontre d'Aurore Martin, ancienne dirigeante de Batasuna, parti indépendantiste légal en France mais interdit en Espagne (2) .

    Avec Aurore Martin, le MAE était appliqué pour la première fois envers une militante politique basque de nationalité française pour des supposés « crimes et délits » qui, aux yeux de la loi française, n'en sont pas, ce qui a poussé de nombreuses voix du monde politique et associatif à s'élever contre l'application du mandat d'arrêt européen, selon le site eitb.com qui rappelle que des formations politiques nationales comme le PC, PS, NPA, Modem, le conseiller général UMP Max Brisson et le maire de Biarritz, Didier Borotra, pour n'en citer que quelques-uns, se sont publiquement prononcés contre le MAE visant Aurore Martin, de nationalité française.

    Après des rassemblements permanents à Ispoure jusqu’au 25 février, la semaine d’action a prévu un concert (kantaldi) réunissant des grands noms de la chanson basque à Cambo et le 5 mars à Bayonne « une chaîne humaine ».

    Avant l’opération d’Ispoure, l’organisation Segi avait annoncé qu’elle manifestera le 25 février à Saint-Jean-de-Luz, tandis que se déroulera le Conseil municipal de la commune auquel devrait assister Michèle Alliot-Marie. Les jeunes radicaux abertzale réclament que « MAM dégage du gouvernement et du Pays basque » :

    « Ces dernières semaines, les pratiques d'Alliot se sont dévoilées au grand jour, nous avons vu, comme tout le monde, quels étaient les méthodes et le fameux savoir-faire français. Nous avons vu aussi pour quelles causes ce savoir-faire se transmet : pour stopper les révoltes contre les dictatures et pour pérenniser les intérêts de la France avec ces dernières. Du lacrymogène, de la matraque, en passant par le savoir-faire militaire reconnu par les plus grands tortionnaires du siècle passé… En respect pour ceux qui sont tombés dans cet hiver arabe, Michèle Alliot-Marie doit quitter le gouvernement. Sa place est dans un tribunal… Elle représente le mépris qu'a la France envers notre peuple, de ce fait elle n'a pas sa place ici », ont notamment indiqué les jeunes radicaux (Sud-Ouest, 16 février).

    (1)- « Mon nom a été soutiré sous la torture »

    Les huit jeunes ont indiqué que leurs noms ont été arrachés par les policiers espagnols «sous la torture» et des témoignages de leurs camarades arrêtés en octobre et décembre ont été distribués.

    Extraits :

    Oihana Lopez raconte que quand elle refusait de répondre aux questions, les policiers l'obligeaient «à faire des exercices physiques : en haut, en bas, en haut, en bas... Ils m'obligèrent à faire des flexions, et ils voulaient que je réponde, sinon ils allaient me taper la tête contre le mur. [...] Je faisais des efforts pour ne pas tomber par terre, parfois j'avais des vertiges, mais ils m'obligeaient à continuer, de plus en plus vite ; ils me frappaient et me tiraient les cheveux...»

    Imanol Beristain a fait un récit similaire : «Ils m'ont déshabillé de force et m'ont pris par le cou pour me jeter par terre. Ils touchaient l'urine avec ma tête et me crier que j'allais devoir la lécher. [...] Ils me tiraient par les cheveux et par les testicules aussi, sans arrêt. Tout cela à quatre pattes, à genoux et sur le front. Ils m'obligeaient à rester dans différentes positions, jusqu'à ce que je tombe par terre. [...] En même temps, quand j'étais à quatre pattes, ils m'attrapaient par les testicules et me les frottaient avec un sac. Ensuite, ils me mettaient le sac sur le nez, pour que je sente l'odeur et pour que j'étouffe. Ils m'ont mis le sac sur la tête, encore et encore, jusqu'à en déchirer quatre. J'essayais de les déchirer avec les dents quand j'avais la sensation d'étouffer. Alors, deux policiers me serraient très fort le nez et la bouche avec leurs mains [...]».

    Ainara Ladron Urbieta raconte, elle : «Ils m'ont obligée à me déshabiller et à m'allonger sur la table (pendant que je me déshabillais, ils se sont mis à rire) [...]. Ils ont essayé d'écarter mes jambes mais je les serrais de toutes mes forces. [...] Après un long moment d'interrogatoire, il s'est mis à me frapper sur les fesses avec la main ouverte. Puis il m'a posé une canette métallique très froide contre la fesse. Il a ensuite passé son doigt sur mon anus et mon vagin, en me touchant [...]».

    (2)- La Cour d’Appel de Pau a mis en délibéré au 1er mars sa décision sur le transfert en Espagne d'Eider Zuriarrain Mendiguren, militante basque espagnole soupçonnée de liens avec l'organisation ETA, arrêtée sur la voie publique le 10 février à Bayonne en vertu d'un mandat d'arrêt européen délivré par l'Espagne, apprenait-on mardi 22 février.

    Selon le site sudouest.fr, la militante, âgée de 31 ans, soupçonnée de « collaboration active avec des membres de l'ETA », avait été placée en détention après son interpellation. Elle avait été remise en liberté sous contrôle judiciaire lors de sa première comparution devant la Cour d'appel.

    Le Comité de défense des prisonniers basques Askatasuna avait dénoncé son arrestation, assurant dans un communiqué qu'Eider Zuriarrain Mendiguren "vivait publiquement à Urrugne et travaillait à l'ikastola (école basque, ndlr) de Bayonne » Selon des informations publiées dans la presse espagnole, la jeune Basque, originaire de Bilbao, était en fuite depuis février 2010 et figurait depuis lors sur la liste des « terroristes les plus recherchés » par la Garde civile.  Elle est soupçonnée, selon ces sources de presse, d'avoir hébergé en 2009 à son domicile le membre de l'ETA Euri Albizu Telleria et d'avoir aidé un autre etarra, Ibai Beobide, à fuir vers la France

    ►http://www.lejpb.com/paperezkoa/20110222/249945/fr/Huit-membres-Segi-menaces-par-le-mandat-d%E2%80%99arret-europeen

    ►http://bellaciao.org/fr/spip.php?article113958






    Merci à Michel Porcheron
    Date de parution de l'article original: 10/03/2011
    URL de cette page: http://www.tlaxcala-int.org/article.asp?reference=4187


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