• LOPPSI: La censure gouvernementale du Net adoptée au Parlement

    Paris, 21 décembre 2010 -- L'Assemblée nationale a adopté en deuxième lecture le projet de loi LOPPSI, dont l'article 4 met en place le filtrage administratif d'Internet via le cheval de Troie de la protection de l'enfance. Un tel dispositif extra-judiciaire, qui permettra à terme de généraliser la censure des contenus sur Internet, expose à de dangereuses dérives, tout en laissant prospérer les pédophiles et la pédopornographie.


    (CC) BySa La Quadrature du Net

    Le filtrage donne l'illusion que l'État s'attaque à la pédopornographie en ligne alors que le blocage de sites n'empêchera en rien les criminels qui se livrent à la production et à la distribution de ces contenus de prospérer1. Il s'agit en réalité d'un faux prétexte visant à légitimer le filtrage administratif d'Internet, et à déployer une infrastructure technique de censure.

    « Sous réserve de son adoption conforme – qui semble acquise – lors de la deuxième lecture au sénat, le parlement va donc permettre au gouvernement de filtrer le Net sans décision préalable de l'autorité judiciaire. Sans moyen pour les citoyens de contrôler la manière dont les sites seront censurés ou de s'opposer aux décisions, le gouvernement a carte blanche pour faire lui-même la police sur le Net au mépris des droits fondamentaux », déclare Jérémie Zimmermann, porte-parole de La Quadrature du Net.

    « Le risque est grand que ce filtrage extra-judiciaire du Net, qui remet en cause la séparation des pouvoirs, soit étendu à d'autres domaines.2 La porte est ainsi ouverte à de graves violations de la liberté d'expression et de communication, notamment dans le cas d'inévitables censures collatérales3. Il faut désormais que les députés opposés au filtrage administratif du Net saisissent le Conseil constitutionnel afin que l'article 4 soit censuré », conclut Zimmermann.

    Les citoyens doivent également se tenir prêts à contrer au niveau européen une tentative d'instrumentalisation de la protection de l'enfance pour justifier le contrôle d'Internet. Une directive, en cours d'examen au Parlement européen, risque en effet de généraliser à toute l'Union européenne le filtrage des sites à caractères pédopornographiques. Les projets extrêmes récemment dévoilés par le premier ministre britannique4 montrent le chemin que les censeurs du Net veulent emprunter.


    1. Plutôt que d'instrumentaliser la protection de l'enfance pour faire accepter le filtrage, le gouvernement aurait pu faire le choix de renforcer ses efforts pour obtenir le retrait des contenus incriminés des serveurs qui les hébergent. Il aurait également pu tenter d'améliorer la coopération internationale dans ce domaine. Ces modes d'action sont d'ailleurs recommandés par l'association d'information et de prévention sur la pédophilie, l'Ange Bleu qui s'oppose à l'article 4: « LOPPSI : la protection de l'enfance, cheval de Troie du filtrage généralisé d'Internet ? »
    2. 2. Le président Sarkozy a déja promis le filtrage aux industries du divertissement: « Plus on pourra dépolluer automatiquement les réseaux et les serveurs de toutes les sources de piratage, moins il sera nécessaire de recourir à des mesures pesant sur les internautes. […] Il faut donc expérimenter sans délai les dispositifs de filtrage. » – Vœux au monde de la culture du Président de la République, 7 janvier 2010 : http://www.elysee.fr/download/?mode=press&filename=100107-discours-Voeux...
      Éric Besson a également suggéré que WikiLeaks devrait être interdit en France, sans qu'aucune décision judiciaire n'ait pourtant condamné l'organisation: http://www.laquadrature.net/fr/wikileaks-et-la-censure-politique-dintern...
    3. 3. Voir la note de La Quadrature du Net « Le filtrage d'Internet viole l'État de droit »
    4. 4. http://www.pcinpact.com/actu/news/60945-blocage-sites-pornos-xxx-angleterre.htm

    Source ici

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    Analyse du scrutin n° 675 - Séance du : 21/12/2010

    Scrutin public sur l'ensemble du projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure.

    Nombre de votants : 500

    Nombre de suffrages exprimés : 492

    Majorité absolue : 247

    Pour l'adoption : 305

    Contre : 187

    L'Assemblée nationale a adopté

    Groupe UNION POUR UN MOUVEMENT POPULAIRE (314) :

    Pour: 284

    MM. Élie Aboud, Manuel Aeschlimann, Yves Albarello, Alfred Almont, Mme Nicole Ameline, M. Jean-Paul Anciaux, Mme Edwige Antier, M. Jean Auclair, Mme Martine Aurillac, MM. Pierre-Christophe Baguet, Patrick Balkany, Jean Bardet, Mmes Brigitte Barèges, Sylvia Bassot, MM. Patrick Beaudouin, Jacques Alain Bénisti, Éric Berdoati, Jean-Louis Bernard, Jean-Yves Besselat, Gabriel Biancheri, Jérôme Bignon, Jean-Marie Binetruy, Claude Birraux, Etienne Blanc, Emile Blessig, Roland Blum, Claude Bodin, Philippe Boennec, Marcel Bonnot, Jean-Louis Borloo, Jean-Claude Bouchet, Gilles Bourdouleix, Bruno Bourg-Broc, Mme Chantal Bourragué, MM. Loïc Bouvard, Michel Bouvard, Mmes Valérie Boyer, Françoise Branget, M. Xavier Breton, Mme Françoise Briand, MM. Philippe Briand, Bernard Brochand, Mme Chantal Brunel, MM. Michel Buillard, Yves Bur, Dominique Bussereau, Dominique Caillaud, Patrice Calméjane, François Calvet, Bernard Carayon, Olivier Carré, Gilles Carrez, Mme Joëlle Ceccaldi-Raynaud, MM. Yves Censi, Jérôme Chartier, Gérard Cherpion, Jean-François Chossy, Jean-Louis Christ, Dino Cinieri, Eric Ciotti, Pascal Clément, Philippe Cochet, Georges Colombier, Mme Geneviève Colot, MM. François Cornut-Gentille, Louis Cosyns, René Couanau, Edouard Courtial, Alain Cousin, Jean-Yves Cousin, Jean-Michel Couve, Mme Marie-Christine Dalloz, MM. Olivier Dassault, Marc-Philippe Daubresse, Bernard Debré, Bernard Deflesselles, Rémi Delatte, Richard Dell'Agnola, Mme Sophie Delong, MM. Yves Deniaud, Bernard Depierre, Vincent Descoeur, Patrick Devedjian, Nicolas Dhuicq, Eric Diard, Michel Diefenbacher, Jacques Domergue, Jean-Pierre Door, Dominique Dord, Olivier Dosne, David Douillet, Mmes Marianne Dubois, Cécile Dumoulin, MM. Paul Durieu, Christian Estrosi, Mme Jacqueline Farreyrol, MM. Daniel Fasquelle, Jean-Michel Ferrand, Alain Ferry, Daniel Fidelin, André Flajolet, Jean-Claude Flory, Nicolas Forissier, Mme Marie-Louise Fort, MM. Jean-Michel Fourgous, Marc Francina, Pierre Frogier, Yves Fromion, Sauveur Gandolfi-Scheit, Jean-Paul Garraud, Claude Gatignol, Gérard Gaudron, Jean-Jacques Gaultier, Hervé Gaymard, Guy Geoffroy, Bernard Gérard, Alain Gest, Franck Gilard, Georges Ginesta, Jean-Pierre Giran, Louis Giscard d'Estaing, François-Michel Gonnot, Didier Gonzales, Jean-Pierre Gorges, Philippe Gosselin, Philippe Goujon, Michel Grall, Mme Claude Greff, M. Jean Grenet, Mme Anne Grommerch, MM. François Grosdidier, Jacques Grosperrin, Mme Arlette Grosskost, M. Serge Grouard, Mme Pascale Gruny, M. Louis Guédon, Mme Françoise Guégot, MM. Jean-Claude Guibal, Jean-Jacques Guillet, Christophe Guilloteau, Gérard Hamel, Michel Havard, Michel Heinrich, Laurent Hénart, Michel Herbillon, Antoine Herth, Mme Françoise Hostalier, MM. Philippe Houillon, Guénhaël Huet, Sébastien Huyghe, Mme Jacqueline Irles, MM. Christian Jacob, Denis Jacquat, Paul Jeanneteau, Yves Jego, Mme Maryse Joissains-Masini, MM. Marc Joulaud, Alain Joyandet, Didier Julia, Christian Kert, Jacques Kossowski, Patrick Labaune, Mme Fabienne Labrette-Ménager, MM. Marc Laffineur, Jacques Lamblin, Mme Marguerite Lamour, MM. Jean-François Lamour, Pierre Lang, Pierre Lasbordes, Thierry Lazaro, Robert Lecou, Jean-Marc Lefranc, Guy Lefrand, Marc Le Fur, Jacques Le Nay, Jean-Claude Lenoir, Jean-Louis Léonard, Jean Leonetti, Pierre Lequiller, Céleste Lett, Mme Geneviève Levy, MM. Gérard Lorgeoux, Daniel Mach, Guy Malherbe, Richard Mallié, Jean-François Mancel, Alain Marc, Jean-Pierre Marcon, Mme Christine Marin, M. Hervé Mariton, Mme Muriel Marland-Militello, M. Franck Marlin, Mme Henriette Martinez, MM. Patrice Martin-Lalande, Alain Marty, Jean-Claude Mathis, Jean-Philippe Maurer, Pierre Méhaignerie, Christian Ménard, Gérard Menuel, Damien Meslot, Philippe Meunier, Jean-Claude Mignon, Pierre Morange, Pierre Morel-A-L'Huissier, Philippe Morenvillier, Jean-Marie Morisset, Georges Mothron, Alain Moyne-Bressand, Renaud Muselier, Jacques Myard, Jean-Marc Nesme, Jean-Pierre Nicolas, Yves Nicolin, Hervé Novelli, Mme Françoise de Panafieu, MM. Bertrand Pancher, Yanick Paternotte, Mme Béatrice Pavy, MM. Jacques Pélissard, Dominique Perben, Bernard Perrut, Henri Plagnol, Serge Poignant, Mme Bérengère Poletti, M. Axel Poniatowski, Mme Josette Pons, M. Daniel Poulou, Mme Sophie Primas, MM. Christophe Priou, Jean Proriol, Didier Quentin, Michel Raison, Eric Raoult, Frédéric Reiss, Jean-Luc Reitzer, Jacques Remiller, Bernard Reynès, Franck Reynier, Arnaud Richard, Franck Riester, Jean Roatta, Arnaud Robinet, Camille de Rocca Serra, Mme Marie-Josée Roig, M. Jean-Marie Rolland, Mme Valérie Rosso-Debord, MM. Jean-Marc Roubaud, Martial Saddier, Francis Saint-Léger, Mme Françoise de Salvador, MM. Bruno Sandras, François Scellier, André Schneider, Jean-Pierre Schosteck, Jean-Marie Sermier, Fernand Siré, Jean-Pierre Soisson, Michel Sordi, Daniel Spagnou, Eric Straumann, Alain Suguenot, Mme Michèle Tabarot, MM. Jean-Charles Taugourdeau, Guy Teissier, Michel Terrot, Jean-Claude Thomas, Dominique Tian, Jean Tiberi, Alfred Trassy-Paillogues, Jean Ueberschlag, Yves Vandewalle, Christian Vanneste, Mmes Isabelle Vasseur, Catherine Vautrin, MM. Patrice Verchère, Jean-Sébastien Vialatte, Philippe Vitel, Gérard Voisin, Michel Voisin, Jean-Luc Warsmann, Eric Woerth, Gaël Yanno et Michel Zumkeller.

    Abstention: 3

    MM. Marc Bernier, Etienne Pinte et Lionel Tardy.

    Non-votant: 1

    M. Bernard Accoyer (président de l'Assemblée nationale).

    Groupe SOCIALISTE, RADICAL, CITOYEN ET DIVERS GAUCHE (204) :

    Contre: 159

    Mmes Patricia Adam, Sylvie Andrieux, MM. Jean-Marc Ayrault, Jean-Paul Bacquet, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Mmes Delphine Batho, Marie-Noelle Battistel, M. Jean-Louis Bianco, Mme Gisèle Biémouret, MM. Serge Blisko, Patrick Bloche, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Jean-Michel Boucheron, Mme Marie-Odile Bouillé, M. Christophe Bouillon, Mme Monique Boulestin, M. Pierre Bourguignon, Mme Danielle Bousquet, MM. François Brottes, Alain Cacheux, Jérôme Cahuzac, Jean-Christophe Cambadélis, Thierry Carcenac, Christophe Caresche, Mme Martine Carrillon-Couvreur, MM. Bernard Cazeneuve, Guy Chambefort, Jean-Paul Chanteguet, Gérard Charasse, Alain Claeys, Jean-Michel Clément, Mme Marie-Françoise Clergeau, M. Pierre Cohen, Mme Pascale Crozon, M. Frédéric Cuvillier, Mme Claude Darciaux, MM. Pascal Deguilhem, Michel Delebarre, François Deluga, Bernard Derosier, Michel Destot, Julien Dray, Tony Dreyfus, Jean-Pierre Dufau, William Dumas, Mmes Laurence Dumont, Odette Duriez, MM. Philippe Duron, Olivier Dussopt, Henri Emmanuelli, Mme Corinne Erhel, MM. Laurent Fabius, Albert Facon, Hervé Feron, Mmes Aurélie Filippetti, Geneviève Fioraso, M. Pierre Forgues, Mme Valérie Fourneyron, M. Jean-Louis Gagnaire, Mme Geneviève Gaillard, MM. Guillaume Garot, Jean Gaubert, Mme Catherine Génisson, M. Jean-Patrick Gille, Mme Annick Girardin, MM. Joël Giraud, Jean Glavany, Daniel Goldberg, Gaëtan Gorce, Mme Pascale Got, MM. Marc Goua, Jean Grellier, Mme Elisabeth Guigou, M. David Habib, Mme Danièle Hoffman-Rispal, M. François Hollande, Mmes Sandrine Hurel, Monique Iborra, M. Jean-Louis Idiart, Mme Françoise Imbert, MM. Michel Issindou, Serge Janquin, Henri Jibrayel, Régis Juanico, Armand Jung, Mme Marietta Karamanli, M. Jean-Pierre Kucheida, Mmes Conchita Lacuey, Colette Langlade, MM. Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Marylise Lebranchu, MM. Michel Lefait, Jean-Marie Le Guen, Mme Annick Le Loch, M. Patrick Lemasle, Mme Catherine Lemorton, MM. Bruno Le Roux, Jean-Claude Leroy, Bernard Lesterlin, Serge Letchimy, Michel Liebgott, Mme Martine Lignières-Cassou, MM. François Loncle, Jean Mallot, Mmes Jacqueline Maquet, Marie-Lou Marcel, MM. Jean-René Marsac, Philippe Martin, Mmes Martine Martinel, Frédérique Massat, M. Didier Mathus, Mme Sandrine Mazetier, MM. Michel Ménard, Kléber Mesquida, Jean Michel, Pierre Moscovici, Pierre-Alain Muet, Philippe Nauche, Henri Nayrou, Alain Néri, Mmes Marie-Renée Oget, Françoise Olivier-Coupeau, George Pau-Langevin, MM. Germinal Peiro, Jean-Luc Perat, Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont, Sylvia Pinel, Martine Pinville, MM. Philippe Plisson, François Pupponi, Mme Catherine Quéré, M. Dominique Raimbourg, Mme Marie-Line Reynaud, MM. Marcel Rogemont, Bernard Roman, René Rouquet, Patrick Roy, Michel Sainte-Marie, Michel Sapin, Mme Odile Saugues, M. Christophe Sirugue, Mme Marisol Touraine, MM. Jean-Louis Touraine, Philippe Tourtelier, Jean Jacques Urvoas, Daniel Vaillant, Jacques Valax, André Vallini, Manuel Valls, Michel Vauzelle, Michel Vergnier, André Vézinhet, Alain Vidalies, Jean-Michel Villaumé et Philippe Vuilque.

    Groupe GAUCHE DEMOCRATE ET REPUBLICAINE (26) :

    Contre: 25

    Mme Marie-Hélène Amiable, M. François Asensi, Mmes Huguette Bello, Martine Billard, MM. Alain Bocquet, Patrick Braouezec, Jean-Pierre Brard, Mme Marie-George Buffet, MM. Jean-Jacques Candelier, André Chassaigne, Yves Cochet, Jacques Desallangre, Marc Dolez, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Pierre Gosnat, Maxime Gremetz, Jean-Paul Lecoq, Alfred Marie-Jeanne, Roland Muzeau, Daniel Paul, Mme Anny Poursinoff, MM. François de Rugy, Jean-Claude Sandrier et Michel Vaxès.

    Groupe NOUVEAU CENTRE (25) :

    Pour: 18

    MM. Jean-Pierre Abelin, Christian Blanc, Pascal Brindeau, Hervé de Charette, Charles de Courson, Stéphane Demilly, Raymond Durand, Michel Hunault, Olivier Jardé, Yvan Lachaud, Claude Leteurtre, Nicolas Perruchot, François Rochebloine, Rudy Salles, André Santini, François Sauvadet, Francis Vercamer et Philippe Vigier.

    Contre: 1

    M. Jean Dionis du Séjour.

    Abstention: 5

    MM. Thierry Benoit, Philippe Folliot, Francis Hillmeyer, Hervé Morin et Jean-Luc Préel.

    Députés NON INSCRITS (8) :

    Pour: 3

    Mme Véronique Besse, MM. Dominique Souchet et François-Xavier Villain.

    Contre: 2

    MM. Nicolas Dupont-Aignan et Daniel Garrigue.

     


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  • La "haine contre l'islam", un fourre-tout

    Après les Assises internationales contre l'islamisation, organisées à Paris le 18 décembre, la journaliste du quotidien Al-Hayat dénonce le climat antimusulman en France. Dans un texte virulent, elle estime que le débat est instrumentalisé par plusieurs organisations.

    21.12.2010 | Nahla Chahal | Al-Hayat

    Des "Assises contre l'islamisation" se sont tenues à Paris le 18 décembre 2010.

    Le samedi 18 décembre se tenait à Paris un rassemblement contre "l'islamisation de la France". Le communiqué qui annonçait ces Assises internationales contre l'islamisation de nos pays comporte tout ce qu'on peut imaginer en phrases chocs et discours primaire. Il met en garde contre une Europe dominée par la charia et appelle les Européens en général et les Français en particulier à défendre leur "identité" et leur "civilisation". Lors des pauses, les buffets étaient composés exclusivement et symboliquement de vin et de jambon. Ce rassemblement a attiré des visiteurs du monde entier, notamment des Danois et des Suisses. Ils ont confronté leurs expériences dans la lutte contre la propagation et la domination de l'islam.

    Récemment, Marine Le Pen [probable présidente du Front national à la mi-janvier] a parlé de "l'occupation musulmane" de la France, comparant la prière sur le trottoir autour des mosquées au défilé de soldats allemands pendant la Deuxième Guerre mondiale. On lui a objecté que ces prières dans la rue étaient dues à l'exiguïté des mosquées et à leur nombre insuffisant. Madame n'en a cure : elle voudrait qu'il y ait moins de mosquées encore. Il s'agit de la fille du chef du parti d'extrême droite, celui-là même qui avait accédé au second tour [en devançant le candidat socialiste] de la présidentielle de 2002 et avait obtenu 20 % des voix. Elle se bat pour hériter du parti de son père et ainsi se présenter à la présidentielle de 2012. Certains affirment qu'il faut prendre ses déclarations pour de la démagogie électorale, ce qui serait, selon eux, une circonstance atténuante.

    La première chose à noter est que les organisateurs du rassemblement contre "l'islamisation de la France" ont confié le service d'ordre à la Ligue de défense juive (LDJ). La LDJ est une organisation quasi militaire qui fait acte d'allégeance à Israël. Généralement, elle s'occupe de perturber les rassemblements de soutien à la Palestine et à s'en prendre à certains de ses participants. Elle est interdite aux Etats-Unis [où elle a été créée en 1968 à l'initiative de Meir Kahane] en raison de sa violence et de son extrémisme. Voici qu'elle réapparaît comme protectrice d'un rassemblement de nature et d'inspiration fascistes. Car le dénominateur commun entre les deux, c'est l'hostilité bruyante à l'islam et l'appel à chasser les musulmans du pays. Il faudrait leur demander s'ils ne comptent pas les chasser en... Palestine.

    La confusion intellectuelle est un exercice auquel s'est également adonnée la ministre des Affaires étrangères française, Michèle Alliot-Marie. Lors de la conférence du Conseil européen des communautés juives, le 12 décembre dernier, elle a déclaré que la France était l'amie d'Israël, qu'elle était engagée derrière sa sécurité et son intégration dans la région (mais en quoi un ministre français peut-il décider à la place des peuples de la région !). La même ministre, oh combien éloquente, a des antécédents. Quand elle était encore ministre de la Justice, elle avait considéré que la campagne de boycott des produits israéliens était une campagne contre les produits casher et tombait donc sous le coup de la loi sur l'antiracisme. Comment, dans ce contexte, les fascistes pourraient ne pas se sentir encouragés à se rassembler pour parler du "danger de l'islam pour l'Europe" ? Comment ne pas s'étonner de voir des alliances contre nature ?

    La seconde chose qu'il faut noter est la présence de certains membres d'extrême gauche parmi les organisateurs. Leur laïcisme sans concession les a aveuglés au point de se joindre à des groupes fascistes dont certains ne sont pas si laïques que cela, puisqu'ils se réclament du christianisme. Ainsi, en fin de compte, le seul point commun entre eux est la "lutte contre l'islam". En font partie également des féministes qui considèrent le voile comme leur principal ennemi. Bref, cette réunion est fréquentée par des gens auxquels on ne s'attendait pas et dont la présence suscite des interrogations sérieuses. Les principales organisations des droits de l'homme, les grands partis de gauche, les Verts ainsi que les syndicats ont condamné la réunion et ont demandé son interdiction. N'ayant pas obtenu gain de cause, ils ont appelé à une contre-manifestation. Il s'agit là d'un combat qui se déroule en Europe et dans le monde.


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  • Les interventionnistes : des emmerdeurs ou des coopérants ?

    Oscar FORTIN

    Il y a à peine une semaine, la Secrétaire d’État des États-Unis avec ses collègues du Canada et du Mexique invitaient les Haïtiens à se prendre en main et à solutionner eux-mêmes leurs problèmes, prenant pour prétexte que la « communauté internationale » (parlant d’eux-mêmes) ne pouvait pas tout faire. Pas un instant leur est venu à l’esprit que le peuple haïtien se porterait sans doute beaucoup mieux si leurs relations avec ce pays avaient été moins interventionnistes et plus coopératives. Depuis la mise à la porte du Président Aristide par les GI, ils n’ont pas cessé d’en contrôler la gouvernance.

    Plus au sud, le Venezuela et la Colombie vivent depuis plusieurs semaines de véritables désastres causés par des pluies comme jamais ils n’en avaient eues. En Colombie comme au Venezuela il y a des morts, de nombreux affaissements de terrains, des dizaines de milliers de familles qui doivent être hébergées dans des zones plus sécuritaires. Dans les deux pays c’est l’état d’urgence et les gouvernements doivent faire vite pour faire face à la situation.

    En Colombie, le Président Juan Manuel Santos a décrété l’état d’urgence économique, social, écologique, mesure qui lui permettra de légiférer pour une période de 90 jours, l’autorisant à prendre des crédits internationaux et à utiliser des ressources budgétaires sans l’approbation du Congrès. Tout cela s’est fait sans que personne quelque part dans le monde s’en scandalise et pour cause.

    Au Venezuela, le Président Chavez a demandé à l’Assemblée nationale de voter une loi, la Loi habilitante, qui lui donnera les pouvoirs nécessaires pour affronter l’état de crise que vivent des centaines de milliers de personnes. Cette disposition est prévue dans la Constitution et ne peut être décrétée unilatéralement par le Président comme c’est le cas en Colombie. Elle doit être débattue et votée par l’A.N. Ce fut fait jeudi dernier avecl’appui de 157 voix, amplement suffisant pour être validée au premier tour. Vendredi, le 17 décembre, le Président l’a sanctionnée. Dans les circonstances, il n’y avait vraiment rien pour scandaliser qui que ce soit.

    Mais voilà que la Secrétariat d’État à Washington, plus préoccupée d’ « emmerder » que de « coopérer », a eu le temps de donner une conférence de presse pour dénoncer cette « loi habilitante » qui donne au Président Chavez les pouvoirs nécessaires pour accélérer les mesures à prendre pour venir en aide aux populations affectées par ces pluies torrentielles. Voilà que soudain, ce qui avait été interprété comme tout à fait naturel pour la Colombie devient, pour le Venezuela, matière à une campagne internationale de dénigrement contre le Président Chavez.

    Cet acharnement contre le Venezuela et le Président Chavez n’a d’autre fondements que ces intérêts oligarchiques et impériaux qui ne peuvent se résigner à ce qu’un peuple s’affirme et assume son propre destin. Chavez est, à ce jour, celui qui représente le mieux la grande majorité des Vénézuéliens et c’est pour cette raison qu’ils votent pour lui et l’appui dans ses initiatives. Cette démocratie sur laquelle l’empire et les oligarchies n’ont pas de prise est un véritable poison qui tue le simulacre de démocratie dont ils se font hypocritement les apôtres.

    Dans les nouvelles de ce matin, on apprend que Chavez se trouve de nouveau confronté à une nouvelle vague de tueurs à gage, plus nombreux que les vagues antérieures, dont l’objectif premier est de le tuer. Il a rassuré les siens en disant que ces menaces n’allaient pas l’enfermer dans une tour d’ivoire, mais qu’il allait plutôt et avec encore plus d’énergie se consacrer au service de son peuple et ,en ces temps particuliers, au service des plus affectés par ces pluies torrentielles.

    Je pense que Chavez et son peuple méritent tout notre respect et j’ose espérer que la machine à la désinformation s’évanouira vite dans les ténèbres d’où elle vient.

    Oscar Fortin

    URL de cet article 12271
    http://www.legrandsoir.info/Les-interventionnistes-des-emmerdeurs-ou-des-cooperants.html

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  • Le coup de massue est tombé!

    Me voilà amenée à vous écrire une lettre d’un genre particulier.
    Je m’adresse à vous tous aujourd’hui pour vous exprimer toute mon indignation, mon inquiétude, ma peur, mais aussi toute ma détermination et ma volonté de me battre.
    Il est l’heure de défendre nos droits civils et politiques avec force, ce précédent ne laisse rien présager de bon.

    L’inacceptable est-il acceptable  ? Bien sur que non ! Cependant l’histoire du Pays Basque nous a souvent démontré que l’inacceptable était possible  : les extraditions, les multiples mandats d’arrêt européens délivrés à des dizaines de militants politiques (Segi, Askatasuna, Udalbiltza…), l’existence des législations et tribunaux d’exceptions à Paris et Madrid, la pratique de la torture dans les commissariats et casernes espagnoles, les partis politiques interdits, deux quotidiens fermés et ses journalistes torturés et incarcérés, les arrestations massives, la disparition et la mort de Jon Anza… Tout cela existe, cette répression est normalisée, c’est le lot quotidien du Pays Basque, des Basques. Cela est possible car les principales formations politiques en France et en Espagne, avec la complicité de leurs relais locaux, le permettent, le défendent et pour certains le laissent faire par leur silence coupable.  Il est temps de prendre vos responsabilités !

    Je n’ai pas été surprise par le verdict de la Cour de Cassation. Nous le savions depuis longtemps, dans les affaires basques, les justices espagnole et française sont là pour appliquer des décisions politiques. Depuis mon incarcération à Seysse, les dés étaient jetés, le reste n’était que de la mise en scène, une belle mascarade. Tout cela pour arriver à leur fin, l’illégalisation de fait de Batasuna par l’Etat français, de toute la gauche abertzale, et plus s’ils le jugent nécessaire. Une illégalisation sournoise menée main dans la main avec l’Espagne.

    Une preuve de plus que l’Etat français est un acteur majeur et direct du conflit politique basque. En acceptant ce MAE, Paris ne fait que renforcer ses choix politiques  : la répression et la négation du Pays Basque  ; une négation qui est à l’origine de ce conflit. Il n’y aura pas de solution juste donc définitive tant que la France ne reconnaîtra pas l’existence politique du Pays Basque nord.
    Ce nouveau saut répressif a lieu au moment où la gauche abertzale multiplie ses efforts en faveur d’un processus démocratique de résolution de ce conflit. Mon Mandat d'Arrêt Européen et le maintien dans l’illégalité de la gauche abertzale sont des obstacles à sa mise en place. Tous les acteurs du conflit doivent pouvoir participer à ce processus en toute normalité ; dans ce sens, la gauche abertzale doit être légalisée sur l’ensemble du Pays Basque et toutes les poursuites judiciaires à son encontre stoppées.

    Malgré cette répression, ces provocations, Batasuna réaffirme son engagement en faveur de ce processus démocratique. Dans ce sens, nous mettrons tout en œuvre pour qu’il puisse aller jusqu’à son terme.

    Je n’ai pas l’intention de me soumettre aux autorités espagnoles, ni de faciliter à la France l’exécution de mon Mandat d'Arrêt Européen. Depuis quelques jours, ma vie a quelque peu changé. En effet, mon activité politique est interdite en France, en Espagne et en Pays Basque. Je n’ai pas d’autre choix que de me cacher pour pouvoir continuer mon activité politique au sein de Batasuna. J’ai donc décidé d’arrêter mon contrôle judiciaire et de ne plus me montrer publiquement. Je suis en Pays Basque, parmi vous, grâce à vous, grâce aux nombreux amis et soutiens qui m’ont accueillie et ouvert leurs portes. En Pays Basque, il y a une valeur qu’on ne nous enlèvera jamais, c’est celle de la solidarité.
    Merci à tous, proches, amis, militants, élus… pour tout le travail accompli. Sans vous tous, cela ne serait pas possible. Continuons ce travail, rassemblons-nous, créons entre tous un rempart contre la répression, créons les conditions de la résolution de ce conflit, créons les conditions de la reconnaissance politique du Pays Basque nord.  

    Pour terminer cette lettre je vous demande d’avoir une pensée pour les militants incarcérés ou réfugiés, et leurs familles, qui, comme moi, vont passer les fêtes de fin d’année loin de leurs proches.
    Merci.


    Kolpea erori da!

    Hemen nauzue, gutun « berezi » hau idatzi beharrean.
    Zuei zuzentzen natzaizue gaur, nere atsekabea, nere kezka, nere beldurra, bainan ere borrokarako dudan determinazioa eta borondatea adierazteko.

    Gure eskubide zibil eta politikoak indar guziz defendatzeko ordua iritsi da, aurrekari honek ez dakar deus onik.

    Onartezina, onargarri ote da? Noski ezetz! Baina Euskal Herriko historiak maiz erakutsi digu onartezina gerta zitekeela : estradizioak, hamarnaka euskal militante politikoren kontra galdeginak izan diren euroaginduak (Segi, Askatasuna, Udalbiltza…), legedi eta auzitegi berezien izaera Parise eta Madrilen, torturaren erabilpena espainiar komisaldegietan, alderdi politikoen debekatzea, bi egunkariren hestea eta bertako kazetariak torturatu eta presondegiratzea, atxiloketa masiboak, Jon Anzaren desagerpena eta heriotza …. Guzti hori eguneroko ogia da, errepresioa normalizatua da, Euskal Herriak eta euskaldunek egunero bizi ditugun egoerak dira. Hau posible egiten da, Espainia eta Frantziako alderdi politiko nagusiek, lekuan lekuko konplizeekin, baimentzen dutelako, defendatzen dutelako eta horietarik batzuen kasuan, isiltasunaren aitzakipean egiterat uzten dutelako. Zuen ardurak hartzeko ordua da !

    Kasazio gorteak eman duen emaitzak ez nau harritu. Aspalditik genekien, euskal aferetan, espainiar eta frantziar justizien papera erabaki politikoak aplikatzea dela. Seysses-en presondegiratu nindutenetik jokoa Egina zen, beste guzia itsura hutsa zen, maskarada polit bat. Guzi hori beren helburuetara heltzeko, Batasuna eta ezker abertzale osoa behin betiko debekatzea, eta gehiago, hala iduritzen bazaie. Legez kanporatze iluna, eskuz eskuz Espainiarekin daramatena.

    Beste behin ere, argi gelditzen da estatu frantsesa euskal gatazkaren parte hartzaile zuzena dela. Euroagindu hau onartuz, Parisek bere hautu politikoak berretsi besterik ez ditu egiten : errepresioa eta Euskal Herriaren ukapena ; gatazkaren oinarrian den ukazioa. Ez da aterabide justurik izanen Frantziak ipar Euskal Herriaren izaera onartzen ez duen bitartean.

    Pausu errepresibo hau, ezker abertzalea gatazkaren konpontzeko prozesu demokratiko baten aldeko urratsak ematen ari denean gertatzen da. Nere kontrako euroagindua eta ezker abertzalea ilegalizaturik mantentzea oztopoak besterik ez dira bide hortarako. Gatazkaren aktore guziek parte hartu behar lukete prozesuan normaltasun osoz, eta zentzu hortan, ezker abertzalea legeztatua izan behar litzateke Euskal Herri osoan eta honen kontrako prozedura guziak bertan behera utziak.
    Errepresioa eta probokazio hauek direnak izanik ere, prozesu demokratikoaren aldeko engaiamendua berresten du Batasunak. Eta ahal dugun guzia aginen dugu hori bururaino joan dadin.

    Ez dut nere burua espainiar agintarien esku uzteko asmorik, ez eta Frantziari euroaginduaren aplikapena erresteko ere. Azken egunetan, nere biziak aldaketa zonbait izan ditu. Preseski, nere ekimen politikoa debekatua da Frantzian, Espainian eta Euskal Herrian. Ez dut gordetzea beste hauturik, Batasunaren baitan dudan ekimen politikoa segitu ahal izateko. Kontrol judiziala bertan behera uztea erabaki dut beraz eta nere burua ez gehiago publikoki erakustea. Euskal Herrian naiz, zuen artean, zuei esker eta atea ideki didaten hainbat eta hainbat lagun eta sustengatzaileri esker. Euskal Herrian bada sekulan kenduko ez diguten balore bat : elkartasuna.

    Milesker deneri, hurbilekoak, lagunak, militanteak, hautetsiak… egin duzuen lanagatik. Zuek gabe, guzti hau ez zitekeen posible izanen. Segi dezagun lanean, elkar gaitezen, errepresioaren kontrako harresia eraik dezagun denen artean, gatazka konpontzeko baldintzak eraik ditzagun, ipar Euskal Herriaren ezagutza politikorako baldintzak sor ditzagun.  
    Gutuna bukatzeko, militante presondegiratu edo iheslarientzat gogoeta bat izan dezazuen eskatzen dizuet, bai eta beren familientzat ere, urte ondarreko besta hauek, beren hurbilekoengandik urrun pasako bait dituzte.
    Milesker.

    Aurore Martin, le 20 décembre 2010


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  • Depuis 2002, les gouvernements successifs ont fait voter une quinzaine de lois pour étendre l’arsenal sécuritaire du pouvoir. Cette frénésie juridique est officiellement justifiée par la volonté d’adapter les outils répressifs aux nouvelles formes de criminalité, notamment les phénomènes de bande et les délits liés aux nouvelles technologies. 
    Derrière ces prétextes agrémentés de cas particuliers croustillants (agressions envers les personnes âgées, «pédopornographie»…),  se dessine un contrôle de plus en plus étroit de nos espaces de libertés et la privatisation croissante de ce contrôle. Dans cette optique, les nouvelles technologies, moins décriées quand utilisées par le pouvoir, sont largement mobilisées pour généraliser et automatiser la surveillance des populations. 
    Nouvelle incarnation de ce mouvement de fond, la Loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (Loppsi 2) étend encore les possibilités techniques et juridiques de soumission de toutes les facettes de nos vies à une logique de contrôle tous azimuts. 
    Petit tour d’horizon des régressions en cours.


    Travail-Famille-Pavillon

    Au nom de la prévention d’éventuels «risques pour la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques», le texte donne la possibilité au préfet d’expulser sous quarante-huit heures les occupants d’habitations hors normes ou illicites. Ces dénominations recouvrent pêle-mêle les campements, bidonvilles, mobil-home, maisons sans permis de construire ou les habitats choisis (yourtes, tipis, cabanes…). Les habitations incriminées pourront être détruites tandis que les occupants et les propriétaires des terrains, publics comme privés, se verront condamnés à de fortes amendes.

    Manipulant l’image d’individus vivant dans un dénuement extrême et la compassion ou la crainte qu’ils peuvent susciter, le pouvoir instrumentalise la misère qu’il a lui-même contribué à créer pour réduire les possibilités d’échapper à sa logique.

    Quelle comparaison établir entre la situation d’un sans-abri survivant sous tente au pied d’un pilier d’autoroute urbaine, et celle d’une famille établie en yourte au fin fond de la campagne bretonne ? Aucune si ce n’est qu’elles s’inscrivent toutes deux en marge du mode vie dominant.

    En gommant les distinctions entre ces marginalités, l’une subie, l’autre choisie, le pouvoir fait coup double : il accentue encore la gestion purement sécuritaire des exclus du système, et institue la prohibition des choix de vie réfractaires au système.

    Combiner droits de propriété et normes sanitaires et d’édification, est une figure de style classique des pouvoirs pour réduire l’emprise des populations sur leur choix de vie. Et toutes les occasions seront bonnes pour encore élargir les normes à respecter : détecteurs de fumée bientôt obligatoires, certification écologique… Autant de critères qui imposeront l’utilisation de matériaux, de techniques ou même de technologies spécifiques, ainsi que la contribution d’experts «agréés». Autant de limitations de l’autonomie des populations quant au choix de leur mode de vie. Autant d’injonctions à embrasser un modèle fondé d’un côté sur le salariat, et de l’autre la sollicitation de prestataires rémunérés pour chaque aspect de nos vies.

    LOPP-Story : la réalité devient télévisée

    Vous avez aimé la vidéosurveillance ? Vous allez adorer la «vidéoprotection». Armé de ce doux euphémisme, le texte autorise l’installation de caméras par les pouvoirs publics partout où bon leur semble. Les entreprises privées pourront faire de même aux abords de leurs locaux. Avec la miniaturisation des appareils, ceux-ci sont de plus en plus difficilement détectables. La couverture du territoire par vidéosurveillance est une «priorité» pour le gouvernement qui subventionne l’équipement des communes.

    Impossible de traiter toutes les images issues de ces dispositifs ? Que nenni, le texte s’appuie sur les solutions logicielles de traitement automatique de flux de données. Le pouvoir s’octroie la possibilité de vérifier la conformité de nos comportements dans l’espace public avec ce qu’il en attend ; et ce en tout lieu et à chaque instant. Un pas de côté qui n’entre pas dans les grilles d’analyse des sentinelles humaines ou numériques ? Ces dernières interpréteront votre attitude comme hostile, subversive ou simplement suspecte et lanceront la réaction «appropriée». Au nom de notre protection, c’est l’usage de notre espace commun qui se trouvera réduit à ce que nos gouvernants estiment légitime : aller bosser, consommer.

    «Premier Life», «Second Life» : même surveillance

    Beaucoup considèrent que les réseaux de communication numériques constituent de nouveaux espaces de liberté, loin des velléités sécuritaires des pouvoirs en place. Le gouvernement ne l’entend pas de cette oreille, car nul ne peut ignorer que la Toile est un sombre repère de terroristes et autres pédophiles. Le texte prévoit donc la possibilité d’intercepter les communications électroniques et de pénétrer à distance dans les machines des particuliers. Le pouvoir est aidé en ce sens par la structure de plus en plus centralisée des réseaux, et leur gestion par quelques grosses entreprises promptes à collaborer pour maintenir leurs bénéfices. Tout comme l’espace public, les réseaux numériques une fois nettoyés n’auront plus qu’une seule utilisation autorisée : les échanges commerciaux.

    Fichage judiciaire : marquage à vie du sceau de l’infamie

    Jusqu’à une époque récente, une personne condamnée par la justice pouvait bénéficier d’un «droit à l’oubli». Les années écoulées effaçaient progressivement les «erreurs de jeunesse» de la mémoire collective, et les outils bureaucratiques permettaient encore l'«enfouissement» des dossiers. Avec l’instauration des fichiers numériques judiciaires et de police, la donne est radicalement changée. Car un fichier ne s’efface pas de lui-même et a rarement des trous de mémoire. Or la Loppsi propose d’étendre les possibilités d’inscription d’un individu dans ces fichiers. Les données relatives à une personne innocentée ne seront plus systématiquement supprimées. Alors que la taille excessive de ces fichiers et la véracité des éléments qu’ils contiennent sont largement remises en cause, il va être encore plus difficile d’en sortir. En outre, le texte prévoit l’interconnexion entre plusieurs de ces fichiers. Les recherches croisées au travers de ces différents fichiers réduiront encore les mailles du filet bureaucratique. La constitution de cette base de données conduira à la mise en place d’une hypermnésie institutionnelle revancharde, rappelant ad vitam aeternam que tel individu a un jour enfreint la loi.

    Embaucher la moitié de la classe populaire pour surveiller l’autre…

    La mise en application des mesures de la Loppsi et des lois qui l’ont précédée va générer activité et richesse, en quantité proportionnelle aux atteintes pour nos libertés que constituent ces textes, c’est-à-dire beaucoup. Or, dans notre monde libéral, aucune richesse ne saurait échapper à la voracité des «entrepreneurs» et autres «investisseurs». Les délégations de service public se multiplient et le marché de la sécurité intérieure explose. Devant le nombre croissant d’acteurs privés intervenant dans le domaine, le texte prévoit la mise en place d’un «conseil national des activités privées de sécurité», chargé entre autre «d’assurer la discipline de la profession» et de «préparer un code de déontologie». En affichant une volonté régulatrice voire «moralisatrice» du domaine d’activité, ce conseil n’a qu’un but : légitimer les appétits des officines privées pour le formidable gâteau sécuritaire. Au passage, cela permet de désamorcer les critiques d’esprits obtus, susceptibles de s’alarmer de la présence de motivations commerciales dans un domaine si sensible pour nos libertés individuelles. «Dormez tranquilles» semble nous répondre ce conseil, puisque la solution ultime est simplement de «surveiller les surveillants».

    Au-delà des atteintes à nos libertés individuelles, Loppsi 2 est un pas de plus dans la soumission de nos vies à la logique capitaliste. Un outil de destruction des autonomies populaires, visant à nous plonger dans le moule du salarié-consommateur, à criminaliser les alternatives à ce modèle et traquer ses réfractaires par un contrôle généralisé. Comble du cynisme ou simple cohérence idéologique, la gestion de ce contrôle accru est elle-même considérée comme source de profits.

    Antoine. STE-93.




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