• Israël, le terrorisme intellectuel rejoint le terrorisme tout court
     
    L’affaire Helen Thomas, doyenne des correspondants de presse à la Maison Blanche, où elle avait commencé à travailler au début du mandat de John F. Kennedy et qui a démissionné la semaine dernière, est un exemple patent du terrorisme intellectuel qu’exerce Israël ; un Etat qui se veut au-dessus des lois.

    C‘est malheureusement un exemple aussi de la faiblesse de l’Occident et surtout l’Amérique, la superpuissance mondiale, face au sionisme et ses chantages. L’histoire on la rappelle, Helen Thomas a osé tenir des propos anti-israéliens prenant la défense des Palestiniens.

     

     

    A deux mois de son 90e anniversaire, Mme Thomas a annoncé sa décision de prendre immédiatement sa retraite du groupe de journaux Hearst, ce qu’a fait savoir son employeur. Dans un entretien qu’elle avait accordé le 27 mai au site RabbiLive.com, qui lui avait demandé si elle avait « des commentaires à faire sur Israël », elle avait répondu : « Dites-leur de foutre le camp de la Palestine ». « Souvenez-vous que ces gens-là sont occupés et qu’il s’agit de leur terre, que ce n’est pas l’Allemagne ni la Pologne », avait-elle ajouté à propos des Palestiniens.

    Les Israéliens « peuvent rentrer chez eux, en Allemagne, en Pologne, en Amérique et n’importe où ailleurs », avait lancé Mme Thomas, qui a travaillé pour l’agence United Press International (UPI) de 1943 à 2000, avant d’être embauchée par Hearst comme éditorialiste. Mais elle n’a jamais quitté sa place de correspondante à la Maison Blanche, où elle est entrée dans le sillage du président Kennedy, élu en 1960. En 50 ans, elle aura couvert 10 présidents, dont Barack Obama, né 41 ans jour pour jour après elle et qui lui avait présenté en personne en août dernier un gâteau d’anniversaire à l’occasion de ses 89 ans. Elle était la seule à posséder un siège à son nom, situé au premier rang, juste devant le podium du porte-parole de la Maison Blanche.

    Tous ces détails pour démontrer l’importance de son rang. Mais en disant la vérité au sujet d’Israël, elle a été expulsée et humiliée. Ceci presqu’au moment où Israël avait mené son massacre contre la flottille de paix, révélant sa haine, sa violence et son rejet de toute solution équitable au Proche-Orient.

     

    Al-Ahram/hebdo


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  • Dans l’est de l’ Inde, des protestataires se battent contre le géant minier Arcelor Mittal


    AUTEUR:  Moushumi Basu मौशमी बासु মৌসুমি বসু

    Traduit par  Isabelle Rousselot. Édité par Fausto Giudice


     

    Dans les terres rurales et tribales de l'Inde orientale, des manifestants sont en guerre contre le géant mondial de la sidérurgie, Arcelor Mittal. " Nous sommes prêts à sacrifier nos vies, mais pas à céder un pouce de nos terres", crient les villageois. "La forêt, les rivières et la terre sont à nous. Nous ne voulons pas d'usines, ni d'acier ni de fer. Arcelor Mittal, va-t-en."

    Arcelor Mittal se considère comme "le N°1 mondial  de la sidérurgie " et ses revenus en 2006 s'élèvaient à 88,6 milliards de dollars. Opérant dans plus de 60 pays, il " a dirigé la consolidation de l'industrie sidérurgique mondiale et figure aujourd'hui comme le seul vrai aciériste d’envergure mondiale", d'après son site Internet.

    C'est ici, dans les États riches en minerais du Jharkhand et d'Orissa qu'Arcelor Mittal envisage d'investir 201 milliards de dollars pour établir sa "présence indienne" avec deux usines capables de produire 12 millions de tonnes d'acier par an. Mais avant de s'installer, l'entreprise familiale doit d'abord acquérir la terre qui est l'héritage ancestral de milliers d'Indiens pauvres.

    Dayamani Barla, une militante véhémente issue des communautés tribales, mène le mouvement du Jharkhand sous la bannière de l’Ashthitva Adivasi Moolvaasi Raksha Manch (AMARM, le Forum pour la protection de l’existence de la population tribale et aborigène). Elle a plaidé la cause de son peuple des villages de l'Inde rurale jusqu'aux centres de pouvoir européens (voir encadré).

    La pasionaria



    Le parcours de Dayamani Barla est matière à de nombreuses légendes. Elle a commencé comme domestique à Ranchi en lavant des ustensiles usagés. Lorsqu'elle était étudiante, elle a passé des nuits dans la gare ferroviaire locale, profitant des lumières des quais pour préparer une maîtrise de commerce. Elle est ensuite devenue journaliste autochtone écrivant des articles sur l'oppression et la lutte de son peuple. Elle a reçu le prix P Sainath des médias alternatifs pour le journalisme rural en 2000.

    Aujourd'hui, l'imposante femme de 47 ans défie un géant mondial de l'acier et mène un mouvement qui s'étend des arrière-cours rurales de la région indienne de Gumla jusqu'à Berlin et au Forum Social Européen.

    En octobre dernier, Barla a fait une conférence organisée par l'Adivasi-Koordination en Allemagne (AKD), un lobby et une organisation des droits humains associée aux affaires des indigènes indiens.

    Lors d'un atelier de cinq jours au Forum Social Européen (FSE) à Malmö en septembre dernier, elle a parlé de « droits à la vie et vision du monde indigènes » et de « peuples indigènes et justice environnementale planétaire. »

    En 2004, elle a remporté une bourse de la Fondation nationale de l’Inde et en 2008, elle a reçu le prix Chingaari (la flamme) 2008 attribué aux femmes qui luttent contre la criminalité économique en Inde, pour son engagement dans la lutte contre Mittal.

    En dehors des prix, son travail a également donné lieu à des menaces de mort et des demandes pour qu'elle interrompe son militantisme. Mais en tant qu'organisatrice de l'Adivasi Moolvaasi Asthitva Raksha Manch (AMARM), Barla reste résolue : «  Nous ne céderons pas un pouce de notre terre pour le projet », a-t-elle déclaré. « La précédente disposition prise dans l'État pour les indigènes, au nom du développement, était très décourageante. Des anciens propriétaires de terre ont été réduits à devenir des maraudeurs sur leurs propres terres ou ont été obligés de migrer. Combien de temps encore peuvent-ils continuer à être trompés et déshérités de la sorte? », demande-t-elle.

    Toujours en contact avec son peuple et ses racines, Barla gagne sa vie en dirigeant une petite échoppe de thé, où assise sur un banc en bois, elle sirote du thé avec ses camarades tout en discutant des dernières stratégies de protestation.

    Barla affirme que la Constitution indienne protège les "tribus répertoriées" / les Adivasi dans les régions concernées, en interdisant aux non-tribaux et aux groupes privés de céder ou d'acheter les terres tribales et les ressources naturelles.

    Gumla et Khunti, les deux régions du Jharkhand concernées, sont habitées par les tribus Munda alors que le Keonjhar en Orissa est dominé par les tribus Gond, Munda, Dehuri et Saunti.

    "Pour les communautés tribales, la terre n'est pas un bien à vendre mais c'est un héritage", déclare Barla la pasionaria. "Ils ne sont ni les maîtres ni les propriétaires, mais les protecteurs de ces terres pour les générations futures. Les ressources naturelles ne sont pas, pour nous, seulement des moyens de subsistance mais représentent aussi un symbole de notre identité, de notre dignité, de notre autonomie et de notre culture pour des générations."

    La résistance déterminée menée ces cinq dernières années par les militants de l'AMARM dans le Jharkhand contre le groupe Arcelor Mittal semble avoir porté ses fruits. Le géant de l'acier a récemment décidé de se contenter d'un nouveau site dans les districts de Petarwar et de Kasmar dans la région de Bokaro du même État : « Le nouveau site se trouve à proximité de l'usine sidérurgique de Bokaro, propriété de la Steel Authority of India Limited, et nous avons discuté pour la première fois avec les villageois sur le site et nous avons reçu un accueil  plutôt bon», a déclaré Vijay Bhatnagar, PDG d'Arcelor Mittal en Inde et en Chine.


    Les militants ont accueilli ce transfert par une série de manifestations et d'actions. En octobre, Mittal Pratirodh Mamch (MPM : Plateforme d'opposition à Mittal) a organisé une énorme manifestation, avec de nombreuses banderoles et pancartes anti-Mittal, à Keonjhar dans l'État d'Orissa. Les militants affirment qu'en plus de déplacer un nombre massif de personnes, le projet proposé par Arcelor Mittal détruirait des forêts, des sources et des écosystèmes, mettant ainsi en danger l'environnement et l'économie de subsistance d'une communauté indigène dont la culture est ancrée dans l'agriculture et dans la forêt.

    « Par exemple, notre lieu de culte, ou Sarna Sthal, est composé d'un bosquet d'arbres, sasandari, que nous considérons comme sacrés, et l'emplacement de notre village comprend des pierres érigées à la mémoire des ancêtres de notre clan», indique Barla. « Est-il possible de réhabiliter ou de compenser la terre de nos ancêtres ? »

    La région de Keonjhar est riche en gisements de minerais de fer et en manganèse et contient 75 % des gisements en minerais de fer de l'Orissa. « Presque 10 000 personnes seraient déplacées et des fractions primordiales de terrains agricoles seraient supprimées... Pourquoi la société ne va pas plutôt s'installer sur des terres inutilisées, sans forêt ni agriculture, qui sont disponibles dans la région ? », demande Prafulla Samantra, une militante du MPM.

    Un responsable de la société a une réponse toute prête : « Ces États sont fortement dotés en réserves de minerais et l'industrialisation est essentielle pour la croissance et le développement de la région», a-t-il déclaré sous couvert d'anonymat. « Par contraste, le potentiel agricole est peu important ici. Les zones qui ont été sélectionnées dans les deux États pour le projet l'ont été sur la base de considérations techniques comme la texture du sol, la disponibilité en eau, les perspectives d'amélioration des routes et la connectivité du réseau ferré, favorables pour l'usine. »

    Le responsable a indiqué que les besoins des villageois étaient pris en compte. « Nous ne pouvons aller de l'avant sans faire de la population locale les partenaires de l'entreprise, en offrant des opportunités pour leur subsistance et leur croissance, à travers des emplois directs et indirects. » Il a indiqué que la société était désireuse d'instruire et de former des jeunes « en partenariat avec différents instituts technologiques dans l'État », et en intégrant des femmes dans les différentes activités financières « grâce à  des groupes d'entraide. » « Même la partie illettrée de la population impliquée dans les travaux agricoles peut être formée à différents travaux non qualifiés. L'idée est de donner un nouvel essor à l'économie générale de la région. »

    Mettre le territoire sous surveillance

    Le président et PDG d'Arcelor Mittal, LN Mittal a depuis longtemps en projet de développer la production d'acier dans son pays de naissance. En octobre 2005, Mittal Steel Company N.V. et le gouvernement du Jharkhand ont signé un Protocole d'accord, préalable à la signature définitive d'un contrat (MoU) pour monter une usine de sidérurgie d'une capacité de production annuelle de 12 millions de tonnes d'acier, pour un investissement estimé à 9,3 milliards de dollars. En août 2006, Mittal Steel était racheté par son principal rival, Arcelor [une « fusion inversée », NdE] et la nouvelle entité signait un MoU similaire avec le gouvernement d'Orissa une année plus tard.

    Les deux projets sidérurgiques présentés seraient créés en deux phases et permettraient de produire 6 millions de tonnes d'acier chacun, avec l'installation d'une centrale électrique captive. L'achèvement de la première phase est prévue dans les 48 mois à partir de la date de l'accord mentionnée sur le rapport de projet détaillé et la seconde phase, 54 mois après l'achèvement de la première phase.

    Le méga-projet sidérurgique du Jharkhand requerra 4428 hectares de terre dans les régions de Gumia et Khunti et englobera 16 villages, selon les chiffres du ministère de l'Industrie de l'État.

    Cependant, Barla ainsi que les villageois locaux, affirment que les chiffres cités ci-dessus « doivent être considérés comme un minima et une première estimation. Mais si l'usine est réellement installée, les besoins en terrains vont manifestement être multipliés pour le développement des infrastructures et des communes, etc.. En même temps, 30 à 40 villages seront probablement déplacés», et la terre pillée, «menaçant ainsi l'environnement et la source même d'approvisionnement alimentaire des aborigènes locaux.»

    Les projets de 3 900 hectares conclus par Arcelor Mittal dans l'État d'Orissa s'étendent sur plus de 15 villages dans le district de Patna de la région de Keonjhar. Le site comprend des équipements pour fondre le charbon et produire l'acier ainsi que des aciéries et une centrale électrique de 750 Mégawatt. De plus, l'entreprise va explorer la possibilité d'installer une centrale électrique d'une capacité de 2 500 Mégawattsdans le Jharkhand et établir des habitations pour les employés et des infrastructures d'alimentation en eau.

    Le gouvernement central a approuvé la requête d'Arcelor Mittal de louer 202 hectares des mines de fer de Karampada avec des réserves de 65 millions de tonnes, situés dans la réserve forestière de la région du Singbhum à l'ouest du Jharkhand. Les gisements y sont minéralisés et de très bonne qualité.

    Jusqu'à présent, le refus par un nombre significatif d'agriculteurs et d'autres villageois dans le Jharkhand et l’Orissa de vendre leur terres, essentielles aux projets, a engendré des retards « inacceptables », a indiqué LN Mittal au Financial Times (Londres) en octobre. La population doit être « éduquée » pour comprendre et soutenir le bénéfice du développement industriel incluant le besoin de construire de nouvelles usines sidérurgiques sur des terres agricoles, a déclaré le PDG de Mittal. « Si nous ne progressons pas sur ces deux sites, il nous faudra abandonner l'idée de démarrer le projet à ces emplacements et chercher d'autres endroits en Inde pour notre développement." 

    Mais un jour après cet avertissement, le magnat de l'acier a publié une déclaration plus tempérée depuis son bureau de New Delhi : « Arcelor Mittal n'a aucunement l'intention de quitter l'Inde. L'Inde est un pays important pour la croissance de la demande en acier et représente une part importante des projets stratégiques à long terme. L'entreprise continue de travailler sur ces deux projets Greenfield dans le Jharkhand et l’Orissa. Cependant, si l'acquisition de terre continue à se révéler difficile, nous commencerons à chercher des sites alternatifs en Inde. »

    Le chef du gouvernement local d'Orissa, Naveen Patnaik s'est étonné de l'avertissement de Mittal. « Je n'ai pas reçu d’information de la sorte provenant de la société», a-t-il indiqué à une agence de presse indienne. « Je crois que l'acquisition des terres pour le projet de cette entreprise est en cours. Nous faisons notre possible pour faciliter le projet (et) nous souhaitons régler le problème d'acquisition des terrains à l'amiable et dans une satisfaction mutuelle avec les villageois. »

     

    Le point juridique

    L'opposition populaire aux projets d'Arcelor Mittal est basée sur l'annexe 5, article 244 de la Constitution indienne. Prenant effet en 1950, elle garantit aux peuples indigènes le droit d'administrer et de contrôler leurs terres dans neuf États : l'Andhra Pradesh, le Jharkhand, le Gujarat, l'Himachal Pradesh, le Maharashtra, le Madhya Pradesh, le Chattisgarh, l'Orissa et le Rajasthan.

    Les droits indigènes ont été renforcés par le vote en 1996 de la loi sur l'extension du Panchâyat aux zones répertoriées (la loi PESA). Cette loi a permis aux communautés tribales traditionnelles d'avoir un contrôle sur leurs ressources naturelles locales, de reconnaître le droit coutumier, les pratiques sociales et religieuses et les pratiques de gestion traditionnelle des ressources de la communauté ; et elle a accordé des pouvoirs étendus aux assemblés de villages (Gaon Sabhas).

    En 1997, le jugement historique Samata de la Cour suprême a retenu la cause de la propriété tribale des terres autochtones. Samata, une ONG travaillant dans les zones répertoriées d'Andhra Pradeh a intenté un procès contre le gouvernement d'État pour avoir loué des terres tribales à des sociétés minières privées dans les zones répertoriées. La requête d'autorisation spéciale (SLP) déposée auprès de la Cour Suprême a mené, en juillet 1997, à une décision qui fait date, en statuant que le gouvernement est également une « personne » et que toute location de terres à des compagnies minières privées dans les zones répertoriées est considérée comme nulle et non avenue.

    Ces garanties sont des extensions de la loi de bail de Chhotnagpur édictée par les Britanniques dans le Jharkhand où les tribus Munda sont prédominantes. La loi qui reconnaît les droits traditionnels sur la terre, la forêt et les étendues d'eau offre un statut spécial aux peuples autochtones et un droit de bail aux villages. La section 46 de la loi CNT déclare clairement que la terre produisant des ressources naturelles et la terre villageoise sont la propriété de la communauté et ne peuvent être touchées sans le consentement des Gaon Sabhas. Selon cette loi, aucune personne qui n'est pas membre d'une tribu ou étrangère, ne peut acheter de terrains appartenant à des tribus dans ces régions.

    Le secrétaire du gouvernement d'Orissa, le Dr. AMR Dalwai a indiqué que tant qu'aucune terre n'est attribuée à la société, le processus suivra son cours. La société a eu des réunions avec les Gaon Sabhas (les assemblées de village) dans huit villages et il en sera de même bientôt pour les sept villages restant. Ces assemblées ont légalement pour tache de sauvegarder et préserver les traditions et coutumes du peuple, leur identité culturelle, les ressources communautaires et leur manière coutumière de résoudre les litiges.

    Les responsables du Jharkhand ont réagi différemment. Le gouverneur K. Sankaranarayanan a préconisé le dialogue entre l''entreprise et les villageois "qui possèdent la terre et qui doivent déjà accepter de s'en séparer", a-t-il souligné. "Si l'entreprise décide de se relocaliser dans un autre site, que puis-je y faire ? L'État n'y perdra pas ; d'autres sont prêts à intervenir."

    Cependant, lors de récents développements, le PDG Vijay Bhatnagar, avec le membre du groupe de direction, Sudhir Maheshwari et le vice-Président, MP Singh, ont rencontré le nouveau gouvernement du Jharkhand, dirigé par le Premier ministre Shibu Soren : "Nous sommes venus réaffirmer notre engagement,  nous sommes déterminés à poursuivre le projet dans l'État pour lequel le soutien du gouvernement de l'État est demandé. Le Ministre principal a promis tout son soutien au projet," a indiqué Bhatnagar.

    Entre-temps, les militants de l'AMARM dans le Jharkhand se battent bec et ongles contre le projet. En octobre, non découragés par une pluie battante, des milliers d'hommes et de femmes se sont rassemblés au quartier général de la région sur le site prévu de Gumla. Ils étaient armés des traditionnels arcs et flèches, et portaient des balais, des faucilles, des batteurs à grain et des tangi (machettes). Sur les pancartes et banderoles qu'ils brandissaient, on pouvait lire "Mittal va-t-en".

    Les villageois manifestaient contre la vente de 512,5 hectares de terre appartenant soi-disant au "gouvernement", pour laquelle l'entreprise a déjà payé 80 % du coût (12,39 crores soit 2,8 millions de $) à l'administration de la région. Les villageois ont appelé à l'annulation immédiate de l'acte de vente, soutenant que la terre comprend des ressources naturelles appartenant à la communauté comme les rivières, les ruisseaux, les forêts et les collines qui permettent à une dizaine de villages de vivre dans la région.

    Malgré le peu de chance qu'ils ont de gagner la partie, les locaux gardent espoir de conserver leurs terres ancestrales. "Les manifestations des villageois restent présentes à l'esprit", a indiqué le chef de l'administration de Gumla, Rahul Sharma, " la question est désormais en instance de la décision du commissaire divisionnaire mais jusqu'à présent, aucune terre n'a été attribuée à Arcelor Mittal."

     


    Source :  Protesters in Eastern India Battle Against Mining Giant Arcelor Mittal

    Article original publié le 2/3/2010

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  • Quand le mouvement anti-autoritaire génère sa propre répression

    Depuis quelques temps, on ne peut ignorer la recrudescence d’actions offensives et de textes visant à les accompagner par l’écrit. Tout le monde ou presque a sa position là-dessus, et nous n’entrerons pas ici dans ce débat là. Ce qui nous préoccupe, c’est la façon qu’à chacun de réagir à ces actions. Nous voulons parler ici d’indymedia Paris, et plus généralement des divers commentateurs/spectateurs qui fleurissent un peu partout sur le net comme ailleurs. Nous ne nous faisons pas d’illusions sur la pertinence de porter les luttes sur le terrain du net (qui n’est pas un outil neutre), cependant nous sommes bien obligés, lorsque que la répression para-policière privilégie ce média, d’en discuter.

    Le fait est qu’aujourd’hui, le moyen choisi (faute de mieux) par les divers groupes d’attaques pour communiquer leurs raisons, sont les médias de type « open publishing » tels les Indymedias, qui se définissent eux-mêmes comme des outils de lutte ouverts à tous contre l’État et le Capital.

    Ceci dit, il est tout à fait souhaitable que les contenus antisémites, racistes, homophobes sexistes ou politiciens se fassent rembarrer par simple cohérence. Mais censurer de la même manière des communiqués de collectifs de lutte, anonymes ou non, c’est participer au silence imposé par cette société qui refuse toute lutte sortant des cadres imposés de la communication démocratique (médias bourgeois, médiations politiciennes...).

    Récemment, Indymedia Paris a refusé nombre de communiqués et d’articles émanant des luttes contre les machines à expulser et à enfermer [1] ; qu’il s’agisse de tracts, d’informations sur la répression policière ou de communiqués d’actions directes [2].

    Au final on peut se demander si, comme la justice et ses flics, Indymedia Paris n’aurait pas créé lui-même sa propre catégorie d’indésirables, qui souvent correspond exactement aux catégories policières. Car les textes souvent désignés par la police comme provenant de la fantasmagorique « Mouvance Anarcho-Autonome », sont les mêmes que ceux qui sont censurés par Indymedia Paris. Ceux qui sont en ce moment dans le viseur de l’État qui tente de les isoler par la répression sont donc aussi punis de la censure par le collectif Indymedia Paris, les isolant encore un peu plus.

    Par exemple dans le cadre des arrestations du 15 février dernier, liées à la solidarité autour du procès des inculpés de l’incendie de Vincennes, un article détaillant l’arrestation d’une huitième personne [3](pourtant un simple article informant d’un nouveau cas de répression), disparaissait mystérieusement et n’apparaissait plus ni dans les articles refusés, ni en attente, ni en débat, comme si il n’avait jamais existé ; en somme un pur procédé bolchévik.
    A nouveau, un tract sorti suite aux arrestations du 8 juin à Paris [4], émanant de personnes proches de l’affaire a été censuré, accompagné d’un commentaire lapidaire de la modération : « Prospectus ».

    Autre exemple récent, un tract a propos des émeutes de Villiers-le-Bel et de solidarité avec les inculpés [5]a été refusé plusieurs fois. Les motifs invoqués (chronologiquement) par la modération : « Recup’ merdique. les jeunes des cités n’ont pas besoin de vous pour se révolter », « Article déjà refusé. Il n’y a pas eu de tirs de "chevrotine" [6]. Inutile de fantasmer. Et autres passages douteux comme la "canaille grands frères" » ou encore « Lire attentivement la charte. » et « Prospectus ».
    Il en va de même pour un nombre important de communiqués d’actions directes, avec pour seul motif que les textes ne seraient « pas clairs » ou « inintelligibles », alors que nous savons bien que le vrai problème est ailleurs et ne se réduit pas à une simple question « stylistique ».

    Tout ceci est grave.

    Personne ne demande à telle ou telle organisation, collectif ou individu de relayer contre leur volonté quoi que ce soit sur leurs sites. Nous ne nous immisçons pas dans la gestion privée des médias qui leur appartiennent. Mais nous exigeons des médias à vocation publique, ouverte et libre, comme Indymedia, l’application de leurs propres principes de base, chacun étant libre par ailleurs de critiquer, d’opiner, de contre-publier des critiques ouvertes, sur un pied d’égalité [7]et tant que le contenu ne constitue pas un travail de flic. Ce n’est pas le cas d’Indymedia Paris.

    Il est maintenant un autre phénomène dont nous voudrions parler, et qui, s’il n’est pas exactement de la même nature que le premier, participe néanmoins a une même logique d’isolation et de séparation.

    Habituellement, nous n’accordons aucune importance, sur indymedia ou sur les forums, aux divers commentaires qui viennent généralement polluer les articles. Ils ne servent souvent qu’à satisfaire les pulsions idéologiques de quelques fanatiques du clavier. Mais lorsque ces adeptes du monde virtuel épargnent quelques heures sup’ aux flics qui nous observent avec des commentaires du type : « encore un coup des totos de Montreuil » , « encore un coup des non fides/cette semaine », « encore un texte de totos allumés qui cassent des vitrines » « "tract trouvé dans la rue" c’est signé tel ou tel », « ces gens-là, je les connais, ils ne foutent jamais un pied en manif » , « tient les non fides ont repris du service », ou encore « ce tract n’a pas été diffusé réellement » ou au moment où sortait la lettre de Damien depuis la prison de Villepinte : « Mais de quoi se plaint-il, l’ADN a parlé non ? », nous ne pouvons taire notre colère. Des commentaires venant de militants libertaires ou non, souvent bien connus et se présentant comme tel.

    Quelles que soient les intentions affichées ou non de ces commentateurs, de telles affirmations participent de fait à isoler, à séparer un peu plus les différentes luttes, et à propager l’idée que les velléités offensives n’appartiendraient qu’à quelques individus facilement identifiables, kamikazes et fous-furieux, alors même que la révolte est diffuse et répandue.

    Il ne devrait pas être nécessaire d’expliquer que des flics travaillent sur internet, mais leurs connaissances des divers courants et de leurs différences n’est pas nécessairement très élaboré, que donc ce type de commentaires leur rend la tache plus facile. Est-ce vraiment ce que vous cherchez ?

    Il n’est certes pas un problème d’assumer publiquement haut et fort ses idées et sa solidarité avec tel ou tel acte conflictuel, mais revendiquer des actes particuliers de la même façon est une autre paire de manches, pour des raisons qui paraissent évidentes, du moins parmi ceux et celles pour qui la lutte contre l’autorité n’est pas qu’une affaire de mots, de postures intellectuelles ou de rôles sociaux. Et si des personnes trouvent pertinent, voir nécessaire, de ne pas signer les textes qu’ils souhaitent diffuser, c’est qu’ils ont leurs raisons, qui ne sont pas discutables, mis à part pour les quelques-uns qui ont pris l’habitude à ce que le sigle de leur organisation permanente apparaisse en bas de chaque tract, comme un réflexe conditionné, et comme si la visibilité n’était qu’une question de signature.

    Au delà de son propre positionnement, qu’il soit d’ordre théorique, pratique ou idéologique, il y a des choses dont on ne peut pas parler n’importe où, n’importe comment et n’importe quand, malheureusement. Mais entre exprimer son désaccord avec un certain type d’offensive(s), voir avec telle ou telle action, et jouer les flics du net, chercher qui se trouve derrière chaque tract, affiche, journal, action directe, il y a un pas à franchir, que seuls les mouchards franchissent.
    Plus largement, on peut se poser des questions sur l’intérêt de poster des commentaires lapidaires de quelques lignes si insignifiants sur le net, qui démontrent l’incapacité regrettable à produire une analyse, une réflexion et une critique un peu poussées, en dehors de quelques mots d’insulte et de discrédit prononcés à chaud et toujours sur internet.

    Pour en revenir au cas particulier d’indymedia Paris, ce texte est le dernier que beaucoup d’entre nous (essayeront de) publier sur ce site, et nous appelons quiconque est en accord avec ces quelques lignes à faire de même, et à aller chercher ou propager l’information ailleurs, en attente d’une réaction claire à ce texte.
    Nous ne souhaitons pas insister sur le rôle présumé d’un ou plusieurs individus au sein du collectif, mais mettre chacun devant ses responsabilités. Le collectif Indymedia Paris est responsable dans son intégralité, que ce soit de façon active ou passive, des choses qui sont faites en son nom.

    Assemblée d’anti-autoritaires.

    Trouvé sur Indy Lille. Source lien

    PS : Nous invitons tous les individus et collectifs possédant un média (journaux, table de presse, lieux, site...) à publier si comme nous ils en ressentent l’intérêt, ce texte ou des réponses, et ce dans la volonté de faire naître un débat pour l’instant quasi-inexistant sur la question.

    Notes

    [1] Parfois des articles sont publiés puis dé-publiés, le plus souvent ils sont refusés d’emblée et cachés en des recoins du site auxquels seuls les connaisseurs de l’outil ont accès.

    [2] Alors que bizarrement, de nombreux articles émanant du pouvoir et de ses amis - NPA, syndicats, chefs d’État anti-impérialistes-, ou des annonces de débats présidés par des conseillers régionaux et des magistrats passent sans problème. Si ça ne s’appelle pas choisir son camp...

    [3] Affaire « DABs-balades... » : La 8e personne arrêtée et interrogée http://grenoble.indymedia.org/2010-05-30-Affaire-DABs-balades-la-8eme

    [4] Ils veulent la guerre ? http://www.non-fides.fr/?Ils-veulent-la-guerre

    [5] Guerre et paix - A propos des émeutes de Villiers-le-Bel http://lille.indymedia.org/article22808.html

    [6] Précisons tout de même qu’il y a bien eu des tirs de chevrotine, que c’est d’ailleurs pour cela que certains seront jugés aux assises. Aussi, d’autres textes plus politiquement corrects certainement, et qui mentionnent ces mêmes tirs de chevrotine ont eux été publiés sans embuches.

    [7] notamment de la part des modérateurs zélés en question


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  • Donnons des coups de pied aux fesses.

    Il y a quelques jours, le président Barack Obama a demandé à ses collaborateurs de lui indiquer quelle était la paire de fesses qu’il lui fallait botter pour châtier le coupable du pire désastre écologique de l’Histoire que vient de provoquer BP dans la mer des Caraïbes. En m’appuyant sur une si salutaire exaspération, je me permets de lui dresser une liste, préliminaire, de paires de fesses qu’il va pouvoir botter.

    Tout d’abord, vous devriez, Monsieur le Président, demander à votre Première Dame de vous administer un grandiose coup de pied dans votre présidentielle paire de fesses parce que vous n’êtes pas, Monsieur le Président, comme on dit dans les Caraïbes, le « negrito du batey », le negrillon de l’usine à sucre, c’est-à-dire le gamin qu’on envoie faire les commissions, mais bien le premier magistrat de la plus formidable superpuissance qui ait jamais existé à la surface de cette Terre.

    Et si ces bandits de la BP polluent les côtes de votre pays, c’est parce que vous-même, tout comme vos prédécesseurs, vous avez été mous, faibles et timorés envers les oligopoles pétroliers qui, depuis des décennies, provoquent un véritable écocide en Alaska et dans le golfe du Mexique où il était certain que, tôt ou tard, des accidents comme celui qui vous alarme aujourd’hui se produiraient. Mollesse et complicité également manifestes envers les maffieux du casino financier mondial, avec siège à Wall Street, qui provoquent d’abord une crise et qui ensuite exigent leur sauvetage financier, sauvetage auquel vous procédez avec des fonds publics et en faisant main basse sur l’épargne et les revenus des contribuables étatsuniens.

    Un coup de botte, donc, dans vos fesses puisque vous ignorez que ces grandes sociétés sont presque invariablement dirigées par des délinquants en col blanc protégés par la Maison Blanche, les élus des deux Chambres, les grands médias et les lobbies qui financent les campagnes politiciennes des Représentants et des Sénateurs en leur demandant en échange de garantir l’impunité de ces mêmes oligopoles lorsqu’ils agressent l’environnement. Mais, en outre, votre épouse Michelle devrait vous asséner un autre coup de pied dans ves fesses pour punir votre puérilité lorque vous pensez qu’on bâtit son autorité politique en faisant appel aux twitters, facebooks et autres gadgets informatiques. Tout ça peut occasionnellement créer un éphémère climat d’opinion, mais rien de plus.

    Pour combattre les requins de Wall Street et le complexe militaro-industriel, il faut beaucoup plus que ça. Voyez ce que fit un de vos prédecesseurs, Franklin D. Roosevelt, qui put réaliser de très significatifs changements dans l’économie des Etats-Unis (Loi sur l’assurance maladie, rigoureux contrôle du système bancaire, impôts sur la fortune et la rente, banque centrale, etc.) en s’appuyant sur deux institutions qu’il mobilisa et renforça : les syndicats ouvriers et son propre parti. Aveuglé par les progrès de l’informatique, vous avez pensé qu’aujourd’hui ces outils sont dépassés et vous vous êtes trompé.

    Mais vous n’êtes pas le seul à mériter qu’on lui botte les fesses. D’autres illustres derrières méritent grandement de vigoureux coups de pied. Ceux du Secrétaire à l’Energie des Etats-Unis, ceux des présidents des Commissions de l’Energie de la Chambre des Représentants et du Sénat et, bien entendu, les sales derrières des membres de votre équipe de conseillers économiques et très spécialement Lawrence Summers et Robert Rubin, artisans de la totale dérégulation du marché financier et auteurs intellectuels de la crise économique.

    N’oubliez pas non plus d’administrer un autre coup de pied bien asséné aux escrocs de Goldman Sachs qui ont écrit les chiffres macroéconomiques de la Grèce (et allez donc savoir de combien d’autres pays !) et aux bandits de Moody’s qui avec leurs frauduleux calculs « risques pays », ont favorisé leurs amis et plongé de nombreux pays dans une profonde crise économique.

    Et puisque nous en parlons, n’oubliez pas non plus d’asséner un bon coup de pied dans les fesses de vos compères et laquais de Tel-Aviv qui s’imaginent qu’ils ont le droit de tuer en toute impunité des Palestiniens ou, comme à Gaza, de les soumettre à un lent génocide semblable à celui que le peuple juif a dû endurer de la part des nazis dans le ghetto de Varsovie, par exemple. Et, au passage, vous méritez un autre coup de pied dans vos insignes fesses parce que vous oubliez que vous êtes Prix Nobel de la Paix et soutenez ce gouvernement de fanatiques, fondamentalistes, racistes, génocidaires - qui, grâce à la politique impérialiste des gouvernements des Etats-Unis successifs, disposent des seules bombes atomiques qui existent au Moyen Orient - et permettez qu’ils continuent à bafouer les décisions de l’ONU et les règles les plus élémentaires de la légalité internationale.

    Coup de pied aux fesses plus que mérité parce que vous êtes parfaitement au courant de tout cela mais vous vous obstinez cependant à dénoncer l’armement nucléaire que… l’Iran pourrait finir par posséder, mais qu’aujourd’hui il ne possède pas ! Au passage vous pourriez donner un bon coup de pied dans les fesses de votre Secrétaire d’Etat Hillary Clinton qui est très angoissée par la course aux armements que mènerait, selon elle, le Venezuela et cela bien que les dépenses militaires du Venezuela ne totalisent que le quart de celles de la Colombie. Aïe !!

    Atilio A. Boron ici

    Rebelión
    http://www.rebelion.org/noticia.php...

    traduction M. Colinas


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  • A quoi ressemble un marchand d’armes ? Est-ce que le mal est inscrit sur ses traits, transparent ? Ou bien arbore-t-il au contraire une ganache de pékin moyen ? Question d’importance. La tenue du salon de l’armement terrestre Eurosatory (Villepinte, 14-18 juin), summum du genre, semblait l’occasion parfaite d’enquêter sur le sujet. Plongée dans l’univers boueux des VRP de la mort.

    Eurosatory : le grand pince-fesses des VRP de la mort

    mercredi 16 juin 2010, par Lémi

    Dans toutes les allées, les mêmes faces rubicondes et satisfaites, les mêmes uniformes – chemise blanche, costume passe-partout, coiffure bien dégagée sur les côtés et/ou dégarnie, peau luisante – , les mêmes rires gras. Un verre de champagne à la main, un attaché-case à l’autre, une naïade plus moins peinturlurée pendue au bras (pour les plus éminents), ils s’agglutinent devant les stands, ravis d’être là, paradant parmi leurs pairs. En grappes, ils échangent force commentaires sur les merveilles présentées, du Taser XREP/X12 à la grenade assourdissante Splinterless SV-135, en passant par les nouvelles joyeusetés balistiques made in Israël et les bon vieux Renault-trucks des familles, yeux gourmands, ravis de tant de puissance de feu.

    Ils sont à la fête. C’est que le grand raout de l’armement n’est pas seulement commerce de mort, il est aussi l’occasion pour les représentants ès grande faucheuse de tous les pays de se rencontrer dans une ambiance décontractée. C’est là qu’ils discutent des nouveaux petits bijoux semeurs de morts, présentent leurs nouveautés et signent de juteux contrats. Normal, dans ces conditions, que l’atmosphère soit à la bonne humeur et à la courbette servile : il y en aura pour tout le monde. Quelques gradés – médailles et uniformes en bandoulière – déambulent l’air grave, détonnent presque dans le paysage. Les autres, qu’ils soient brésiliens, russes, français, américains, bulgares ou saoudiens, se ressemblent tous : VRP funèbres fabriqués en série, un peu minables, un peu beaufs, un peu grandes-gueules. La grande foire à la saloperie humaine ressemble à une FIAC du pauvre, voire à un salon de l’électro-ménager (si on fait abstraction des marchandises présentées, évidemment). Perturbant.

    Pour le Rouletabille naïf égaré au salon Eurosatory, l’expérience est plutôt éprouvante [1], voire carrément effrayante. Horreur à la mesure de nerfs de nerfs de géant [2] ! Difficile de s’imaginer la chose, l’ampleur du désastre : 50 000 professionnels du secteurs attendus sur quatre jours, 1 300 exposants qui tous ont placé leurs billes (ou une partie d’icelles) dans l’armement terrestre, de Dassault à Taser, de Lockhead Martin (le roi du missile) à EADS, affichant leurs marchandises rutilantes comme d’autres leurs tapis. Opulents et joyeux. Il faut dire, comme le rappelle Philippe Leymarie sur son blog du Monde Diplo (ici), qu’ils auraient tort de faire la gueule, tant leur industrie est plus que jamais florissante :

    « En dépit de la crise, les dépenses militaires mondiales – toutes spécialités – ont atteint un nouveau record pour 2009, selon le rapport de l’Institut de recherche pour la Paix de Stockholm (SIPRI) publié le 2 juin dernier : 1531 milliards de dollars ont été consacrés au secteur militaire (+ 6 % par rapport à 2008, et + 49 % par rapport à l’année 2000). »

    Alors, d’un stand à l’autre, c’est le même spectacle : champagne et petites pépées, rires et claques dans le dos. Les affaires tournent, l’heure n’est pas à la sinistrose. Dehors, un petit train touristique [3] permet aux plus impotents d’aller jeter un coup d’oeil à la ribambelle de tanks s’étalant sur un parking immense, chenille vicieuse. Pas loin, une escouade d’officiels allemands s’engouffre dans un gigantesque véhicule blindé, visite guidée ponctuée d’exclamations enthousiastes. Allée F4, des yeux égrillards suivent les croupes des hôtesses d’accueil, quelques blagues fusent en polonais. Devant un stand, un type à l’accent belge, manifestement bourré, s’adresse à son interlocuteur japonais dans un anglais hésitant : « Cette roquette, mon vieux, elle te défonce un tank d’un claquement de doigt. Notre grande fierté. » Un temps. « Bon, on va la boire cette bière ? »

    À deux pas, un ricain excité, l’air ado, s’empare des mitraillettes d’un stand, l’une après l’autre, méthodiquement, pour les soupeser et mimer l’assaut furieux, l’œil en érection. Plus loin, les représentants de Taser tentent de m’expliquer que jamais an grand jamais l’on n’a pas pu faire état d’un lien direct entre un décès et l’utilisation d’une de leurs merveilles. Litanie déprimante.

    De cette plongée de quelques heures dans le raout des marchands de mort, je ne retiendrai finalement pas grand chose. Quelques instantanés mentaux saisis au vol. Quelques photos parlantes (ci-dessous). Une impression de dégoût omniprésent – gerbe en embuscade. Et, en fond neuronesque, ce vieux refrain sur la « banalité du mal  » qui tambourine à l’esprit. Vus comme ça, ils ont presque l’air normaux. Est-ce vraiment une excuse ?


     

    Notes

    [1] En fin de journée, on le ramassera à la petite cuillère.

    [2] Malcolm Lowry, in Au-dessous du volcan.

    [3] Disney Reich, again :

    .


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