• L’affaire dite de Tarnac en a été une parfaite illustration. Mais les occasions de pointer l’extension de l’arbitraire antiterroriste sont multiples, de l’affaire Chalabi dans les années 90 à l’interpellation récente de 200 manifestants. Au fil des ans et des lois, la législation d’exception est devenue norme, champ des poursuites s’étendant encore et encore. Le point sur la question, avec le Calas.

    Antiterrorisme : légalisation de l’arbitraire et extension de l’exception


     

    Le compte rendu ici


    votre commentaire
  • La nouvelle doctrine nucléaire américaine cible l'Iran et la Corée du nord

    Par Patrick Martin
    La définition de la nouvelle doctrine nucléaire des Etats Unis, dite Nuclear Posture Review (NPR) publiée par le Pentagone mardi est saluée par les apologistes du gouvernement Obama comme un pas en avant vers un désarmement nucléaire à l'échelle mondiale. Mais il n'en est rien.

    Le document expose un raisonnement qui justifierait l'utilisation d'armes nucléaires contre un Etat ne disposant pas de l'arme nucléaire, et ce pour la première fois depuis le bombardement atomique américain d'Hiroshima et Nagasaki. L'Iran et la Corée du nord sont désignés du doigt comme cibles potentielles.

    Ce document de 72 pages a été publié la veille de la visite d'Obama à Prague, capitale de la République Tchèque où il va signer un traité sur les armes nucléaires avec le président russe Dmitri Medvedev jeudi. Comme le NPR, ce nouveau traité est annoncé par la Maison Blanche comme un effort visant à réduire les stocks d'armes nucléaires et rendre moins probables leur utilisation. Cela aussi est un écran de fumée politique visant à dissimuler le danger croissant d'une guerre.

    De nombreux détails de ce traité américano-soviétique demeurent obscurs, mais le consensus des professionnels du contrôle des armes est que les réductions sont en grande partie superficielles et en fait plus petites proportionnellement que lors du dernier accord de ce type négocié par le gouvernement Bush en 2002. Les Etats-Unis et la Russie vont réduire à 700 chacun le nombre de missiles et bombardiers potentiellement nucléaires déployés, soit une réduction d'environ 100 à 200 chacun. Mais les définitions sont tellement imprécises que le nombre réel d'ogives disponibles pour utilisation restera quasiment le même.

    Le document NPR a été publié par le secrétaire à la Défense d'Obama, Robert Gates, rescapé du gouvernement Bush et un pur et dur de la CIA tout au long des deux dernières décennies de la Guerre froide. Cela en soi devrait réfuter les déclarations selon lesquelles la nouvelle doctrine nucléaire est un pas vers le désarmement, sans parler de pacifisme. C'est Gates qui avait déclaré, il y a de cela moins de deux ans, que Washington avait besoin de préserver le droit au recours à la première frappe nucléaire dans l'éventualité d'attaques bactériologiques ou chimiques sur des cibles aux Etats-Unis ou chez les puissances alliées.

    Ce document rejette les appels à déclarer que « l'unique objectif » de la possession d'armes nucléaires est de dissuader les autres de les utiliser, aussi décrite comme l'engagement au non emploi « en première frappe », ce qui laisse ouverte la possibilité que les armes nucléaires pourraient être utilisées dans une opération militaire américaine qui commence comme une guerre conventionnelle, telle la Guerre du Golfe de 1990-1991 ou les guerre actuellement en cours en Irak et en Afghanistan.

    La Maison Blanche est aussi revenue sur une promesse d'Obama durant la campagne présidentielle de retirer les armes nucléaires américaines de l'alerte appelée « hair-trigger alert », selon laquelle elles peuvent être lancées sur-le-champ contre des cibles en Russie. Les hauts gradés militaires se seraient élevés contre cette démarche et il n'y aura pas de changement significatif sur le statut de l'alerte concernant l'immense arsenal nucléaire américain.

    Le changement majeur de ce nouveau document consiste à déplacer le point de mire immédiat du projet d'armes nucléaires américain de la Russie et de la Chine, principales cibles pendant toute la période de Guerre froide, vers ce que le gouvernement Bush appelait « les Etats voyous » et que le gouvernement Obama désigne sous le nom de « outliers »[littéralement « marginaux »], c'est à dire ces pays qui sont les cibles les plus vraisemblables de l'action militaire américaine.

    La nouvelle doctrine du Pentagone interdit l'autorisation de frappes nucléaires contre un pays ne disposant pas de l'arme nucléaire et qui utilise des armes bactériologiques ou chimiques, mais cette promesse n'est que pour la galerie étant donné que les Etats-Unis se réservent le droit de changer de politique dans le cas d'avancées significatives dans la capacité des armes bactériologiques à l'avenir.

    Plus significatif encore: Cette « interdiction » exclut tout spécifiquement les pays désignés comme n'étant pas en conformité avec le Traité de non prolifération (NPT.) Les Etats-Unis considèrent officiellement que la Corée du nord et l'Iran ne sont pas en conformité, bien que l'Iran n'ait pas été ainsi désignée par l'agence des Nations-Unies, l'Agence internationale de l'énergie atomique, qui applique ce traité. La Corée du nord s'était retirée du NPT avant de procéder à son premier essai nucléaire réussi en 2006.

    Gates a rendu explicite le ciblage de ces deux pays en disant ors d'une conférence de presse du Pentagone: « Il y a ici un message pour l'Iran et la Corée du nord... Si vous ne respectez pas les règles du jeu, si vous allez proliférer en matière de nucléaire, alors toutes les options sont ouvertes quant à la manière dont nous allons réagir envers vous. »

    Dans d'autres domaines de la stratégie nucléaire, le gouvernement Obama poursuit en grande partie la politique de George W. Bush, même s'il le fait à grand renfort de posture injustifiée sur la paix et le désarmement, du type qui avait été récompensé l'an dernier par le prix Nobel de la paix.

    Le Pentagone a déclaré que les Etats-Unis ne construiraient plus de nouvelles armes nucléaires. « Plus de nouveaux essais, plus de nouvelles ogives, a dit le général de Marine James Cartwright, président adjoint des des Etats majors réunis et principal commandant des forces de frappe nucléaire américaines. Mais le Los Angeles Times a fait remarquer, « Des officiels ont ensuite fait remarquer que cette politique pourrait leur permettre de ressortir des composants et modèles de vieilles ogives testées pour construire ce qui serait, à toutes fins pratiques, une nouvelle arme. »

    Le budget du gouvernement Obama comprend 5 milliards de dollars pour que le département de l'énergie mette en place ce que Gates appelle « un projet de modernisation crédible pour maintenir l'infrastructure nucléaire et soutenir la force de dissuasion de notre pays. » Il y a aussi des milliards mis de côté pour que des radars et des détecteurs très perfectionnés rendent les frappes des missiles non nucléaires plus précis et efficaces.

    Le NPR fait aussi des systèmes de défense antimissile un objectif stratégique majeur. Le gouvernement a réfuté les demandes des Russes d'inclure la défense antimissile dans le traité sur les armes nucléaires qu'Obama et Medvedev vont signer jeudi. Prenant la parole mardi à Moscou, le ministre des Affaires étrangères russe Sergei Lavrov a averti que la Russie pourrait se retirer du traité si elle sentait que ses forces nucléaires stratégiques étaient menacées par des avancées dans les défenses antimissiles américaines.

    La publication de la doctrine sur les armes nucléaires a provoqué chez les ténors républicains des fulminations prévisibles concernant la politique d'apaisement et le désarmement. Rudolph Giuliani, ancien maire de New York et candidat présidentiel, a dit sur National Review Online, « Un monde sans nucléaire est un rêve de la gauche, vieux de 60 ans, tout comme le service de santé socialisé. Cette nouvelle politique, tout comme le programme de santé d'Obama géré par le gouvernement est un pas de géant dans cette direction. »

    La comparaison est pertinente, mais pas pour les raisons avancées par Giuliani. Tout comme la « réforme » de la santé, la doctrine d'Obama sur les armes nucléaires est un effort pour diriger la politique gouvernementale vers la droite tout en utilisant une phraséologie réformiste. La restructuration des soins de santé va diminuer les dépenses globales allouées aux services médicaux des Américains, tout comme la « réduction » du nucléaire va augmenter les dépenses militaires et rendre dans les faits plus probable l'utilisation des armes nucléaires en temps de guerre.

    Les sénateurs républicains, John McCain et Jon Kyl ont publié une déclaration commune exigeant que le gouvernement Obama « ne retire de la table aucune option » de sa politique sur les armes nucléaires. On ne sait pas encore si les républicains du Sénat vont chercher à faire barrage au nouveau traité américano-russe qui requiert une majorité de 67 voix au Sénat pour être ratifié.

    D'anciens représentants de Bush ont toutefois mis l'accent sur la continuité de la politique entre les deux gouvernements. Gates, bien sûr, a eu le dernier mot sur la doctrine nucléaire, ainsi que les officiers militaires de haut rang tel le président des Etats majors réunis, l'amiral Michael Mullen, lui aussi venu de l'ère Bush.

    Nicholas Burns, sous-secrétaire d'Etat aux Affaires politiques sous Bush a salué la nouvelle politique et « sa ligne très dure » concernant l'Iran. « Les Etats voyous comme l'Iran et la Corée du nord sont réellement perturbateurs et représentent une menace pour le monde, » a-t-il dit. « Il me semble que cette nouvelle définition de la politique nucléaire du gouvernement Obama consolide la capacité des Etats-Unis à contrer cette menace et à sauvegarder les intérêts américains. »

    Le Wall Street Journal, farouche opposant du gouvernement Obama dans la plupart des domaines, a publié un article sur la doctrine des armes nucléaires déclarant qu'elle ne représentait que « de modestes changements aux forces nucléaires américaines, laissant intacte la menace américaine de longue date d'avoir recours à la première frappe nucléaire même contre des pays n'ayant pas l'arme nucléaire. »

    Dans une interview accordée au New York Times lundi, Obama a renchéri ses exigences sur l'Iran, déclarant que ce n'était pas seulement que le gouvernement américain s'opposait à la possession par l'Iran d'armes nucléaires, mais que l'Iran ne devait pas devenir 'un Etat capable du nucléaire.' »

    « Je pense que la communauté internationale ressent fortement ce que cela signifie de rechercher l'énergie nucléaire civile dans un but pacifique et contrairement à cela la capacité à construire des armes, » a-t-il dit. « Et une capacité à construire des armes est évidemment significative au moment où nous évaluons si oui ou non l'Iran ou tout autre pays fait preuve de sérieux concernant ces questions. »

    Etant donné que le terme « capacité » se réfère principalement à la possession de la connaissance scientifique et technologique cruciale, une telle capacité requerrait la destruction de l'infrastructure d'équipement avancée que l'Iran a développée au cours de nombreuses décennies.

    Source WSWS


    votre commentaire
  • Un an et demi d'attente avant un enterrement forcé

    Communiqué de presse du 13 avril 2010

     

    C’est un ultimatum cruel qui frappe de plein fouet la famille d’Artur Harutyunyan, jeune homme de 25 ans , père de 3 enfants , mort en prison en octobre 2008 dans des circonstances encore très troubles à ce jour.

    Lundi la famille reçoit enfin l’acte de décès qui n’avait pu être rédigé pendant 18 mois, faute de pouvoir mentionner le jour et l’heure précis de la mort d’Artur.

    La famille se refusait de cautionner les jour et heure approximatifs proposés jusqu’alors par les autorités, compte tenu de l’importance de ces éléments pour l’enquête sur les circonstances de la mort de leur fils.

    Ces 18 mois que le corps d’Artur a passé à la morgue ont infligé un surcroît de douleur à la famille.

    Mais hier lundi 12 avril, Alice, la mère du jeune homme, a le sentiment de toucher le fond du désespoir lorsque la mairie de Strasbourg lui téléphone pour la prévenir que son fils sera enterré à Strasbourg, mercredi 14 avril 2010 au matin.

    La famille ne pouvant supporter de vivre à Strasbourg après le drame a refait sa vie à Tours. Elle souhaite enterrer son fils à Tours, près d’eux. Mais comment réunir en 48 heures la somme nécessaire au transfert du corps ?

    Il faudrait trouver plus de 4000 euros pour les frais d’obsèques d’Artur, dont 2000 euros rien que pour l’ultime voyage du corps et c’est mission impossible pour cette famille très modeste, qui ne bénéficie d’aucune aide.


    Compte tenu du terrible préjudice subit par cette famille :

    • avec le décès en prison du jeune homme qui avait pourtant été hospitalisé juste avant suite à une tentative de suicide en garde à vue,

    • après 18 mois de silences gênés, de non réponses, de non assistance de la part de la justice et des autorités compétentes alors que la famille dévasté cherche désespérément des explications,

    • après le classement sans suite de l’instruction initiale,

    • après le classement sans suite au motif « d’absence d’infraction » de la plainte déposée par Maître Bouzrou le 25 février 2010 contre la directrice de la maison d’arrêt de Strasbourg pour non assistance à personne en péril,


    C’est un degré d’inhumanité supérieur qui est atteint maintenant avec l’enterrement précipité d’Artur dans un endroit devenu étranger à sa famille.



    Contacts pour plus d’information :

    <wbr>

    <wbr>



    URL de ce communiqué : http://prison.eu.org/<wbr>article12391.html</wbr>

    </wbr> </wbr>

    votre commentaire
  • Honduras : une seconde base militaire US sur le sol hondurien

    mardi 13 avril 2010, par Primitivi

    Les États-Unis ne sont pas en reste pour leur extension militaire, tandis qu’une négociation est en cours avec le Brésil pour l’installation d’une base près de Rio de Janeiro, que 7 bases vont bientôt être installées en Colombie, une nouvelle base militaire US a été inaugurée vendredi dernier au Honduras.

    L’installation de cette dernière dans un pays qui connait depuis juin 2009 un regain de démocratie est bien évidemment justifiée par (cocher la bonne réponse)
    - a/ la lutte contre le terrorisme
    - b/ la lutte contre le narcotrafic
    - c/ le déploiement d’une aide auprès de la population

    Aller on ne va pas vous faire bisquer, la bonne réponse est b.


    A la frontière avec le Nicaragua. Inauguration d’une nouvelle base militaire américaine au Honduras Prétenduement pour lutter contre le trafic de drogue.

    Caracas le 9 Avril - Inauguration ce jeudi au Honduras d’une nouvelle base militaire des USA, pour ’combattre le narcotrafic’.

    L’ambassadeur des USA dans ce pays a informé que le sien avait investi 2 millions de dollars dans la construction des installations, en plus de fournir 4 navires et d’aménager les accès.

    La base navale est sitée au nord-est du département de Gracias a Dios, frontalier avec le Nicaragua. Elle compte un bâtiment multifonctions, un centre d’opérations qui permet d’augmenter la capacité à héberger davantage de personnel, et un quai pour l’ancrage des vedettes de patrouille.

    Par ailleurs, le diplomate a aussi expliqué que la base sera dirigée par la Force Navale du Honduras, coordonnée avec l’assistance des officiers du ’Commando Sur’ de l’armée américaine.

    Il convient de rappeler que les USA possèdent déjà une installation militaire dans ce pays d’Amérique Centrale à Palmerola, dans le département central de Comayagua, et qu’ils ont la possibilité de faire atterrir des avions à longue portée grâce à la longueur de sa piste.

    Il est nécessaire de mentionner que, bien que la Maison Blanche nie quelque appui au coup d’état contre le président constitutionnel Manuel Zelaya, la base de Palmerola a été l’endroit où a été conduit au départ Zelaya, après le renversement qu’il a subi le 28 Juin 2009.

    Sources :
    El Tiempo (Honduras) "Instalan base naval de EEUU para combatir el narcotráfico"
    El Heraldo (Honduras) "Honduras inaugura base naval en La Mosquitia"
    Radiomundial (Venezuela) "Inaugurada nueva base militar estadounidense en Honduras"
    Aporrea (USA) "Inaugurada nueva base militar estadounidense en Honduras"
    Europapress (Espagne) "EEUU y Honduras inauguran una base naval cerca de Nicaragua para actividades contra el narcotráfico"
    Traduction/Synthèse : Alma


    votre commentaire
  • Plus que jamais, les diktats du FMI

     

     

     
     

    Outil au service des grands créanciers, le FMI piétine les droits humains fondamentaux pour imposer ses politiques néolibérales au Nord comme au Sud.

     

     

    Les grandes puissances ont profité de la crise actuelle pour remettre le Fonds monétaire international (FMI), fortement délégitimé depuis des années, au centre du jeu politique. De concert avec l’Union Européenne, il impose sa politique de rigueur en Europe comme au Sud. Voulant passer en force, il poursuit imperturbablement la même politique néolibérale qu’il distille depuis les années 1980 aux pays en développement avec ses « plans d’ajustement structurel », baptisés au Nord « plans de rigueur » ou « mesures d’austérité ».

    En cas de refus ou d’insoumission, comme par exemple en Argentine en 2001, en Ukraine ou en Roumanie l’année dernière, le FMI accroît la pression en bloquant ses prêts, indépendamment des conséquences sociales. Pourtant, les échecs retentissants de ces politiques ont maintes fois été démontrés : partout les inégalités se creusent et la pauvreté gagne du terrain.

    « Si l’on examine le FMI comme si son objectif était de servir les intérêts de la communauté financière, on trouve un sens à des actes qui, sans cela, paraîtraient contradictoires et intellectuellement incohérents. »
    Joseph Stiglitz, prix Nobel d’économie en 2001, La grande désillusion (2002).

    Les grandes puissances contrôlent le FMI dès sa création

    Le FMI, tout comme son institution jumelle la Banque mondiale, est né à Bretton Woods (Etats-Unis) en juillet 1944. Aujourd’hui, 186 pays sont membres de ces deux organisations qui siègent à deux pas l’une de l’autre, près de la Maison Blanche à Washington. Mais le voisinage n’est pas uniquement géographique, il est aussi idéologique : elles promeuvent toutes les deux le fameux Consensus de Washington |1| dont les dix commandements sont prescrits aux pays surendettés à travers les plans d’ajustement structurel en contrepartie de nouveaux prêts.

    Le fonctionnent selon la règle « 1 dollar = 1 voix » permet aux pays riches de contrôler ces deux puissantes institutions, notamment les Etats-Unis qui à eux seuls disposent d’une minorité de blocage. En ce qui concerne le FMI, une règle tacite veut que le poste de directeur général élu pour cinq ans soit réservé à un Européen, tandis que celui de directeur général adjoint le soit à un Etats-Unien.

    1982 : la crise de la dette éclate

    Le 20 août 1982, le Mexique est le premier d’une longue liste de pays en développement à ne plus pouvoir rembourser une dette devenue colossale : la crise de la dette éclate. Le FMI entre alors en scène comme prêteur en dernier ressort et, tel un pompier pyromane, distribue ses prêts afin d’aider les pays en situation d’insolvabilité, non pas à sauver leur population surendettée mais à rembourser en priorité les créanciers. Ces prêts sont conditionnés à un programme d’ajustement structurel qui impose des mesures structurelles et des mesures de choc : privatisations massives ; libéralisation de l’économie et ouverture des marchés ; réduction drastique des budgets sociaux ; suppression des subventions aux produits de base ; développement des monocultures d’exportation au détriment des cultures vivrières ; hausse des taux d’intérêt pour attirer les capitaux… Comme le pronostiquait déjà Michel Camdessus, directeur général du FMI de 1987 à 2000 : « Toutes les entraves à la libéralisation du commerce seront supprimées, laissant les entreprises libres de produire et d’exporter leurs produits comme elles le souhaitent et comme le marché décide. »

    Les pays concernés s’endettent à nouveau pour assurer les remboursements des anciens prêts, mais cette fois à taux élevé… Le mécanisme subtil d’un néocolonialisme économique s’installe dans la durée : le service de la dette vient engraisser les créanciers et les politiques mises en place dans les pays sous accord avec le FMI passent sous contrôle de Washington. Il n’y a plus de souveraineté : les institutions financières internationales imposent les volontés des créanciers et ouvrent la voie aux multinationales dont la plupart siègent au Nord, dans les pays pilotant en fait le FMI. Pour démontrer l’omnipotence du FMI, rappelons que le président brésilien Lula dut signer un courrier l’engageant à respecter les accords passés entre le Brésil et le FMI avant son arrivée au pouvoir en 2002 : sa politique économique devait donc suivre les préceptes très discutables du FMI. La poursuite de l’austérité budgétaire avait été décidée jusqu’en 2005 lors de l’accord conclu avec son prédécesseur, le président Cardoso, quel que soit le candidat élu en 2002.

    Nombre de pays en développement qui étaient autosuffisants en produits alimentaires (tel Haïti avec le riz) au début des années 1980 importent aujourd’hui les denrées nécessaires à leur population. L’agriculture subventionnée des pays occidentaux a inondé les pays du Sud, ruinant des dizaines de milliers de familles paysannes et les chassant de leurs terres vers les bidonvilles. Le Sénégal doit importer la totalité des ingrédients du plat national, le Yassa poulet, et Haïti importe le riz qu’il cultivait autrefois en quantité suffisante pour nourrir sa population… Lorsque les spéculateurs se ruent sur ces produits à la bourse de Chicago comme on l’a vu en 2008, les prix de ces produits explosent sur les marchés locaux et des dizaines de pays connaissent des situations dramatiques de famine.

    La contestation n’a cessé de s’amplifier

    Conséquence directe de l’abandon des subventions aux produits de première nécessité imposée par le FMI, les oppositions à ses experts ultralibéraux se sont multipliées depuis un quart de siècle. Les « émeutes FMI » éclatent à intervalles réguliers au Sud. Citons l’exemple du Pérou en 1991 où le prix du pain est multiplié par 12 en une nuit, ou celui du Caracazo (3 jours d’émeutes occasionnant de nombreux morts) au Venezuela en 1989 suite à l’application d’un plan d’ajustement structurel…

    Devant l’impopularité des conditions liées à ses prêts, plusieurs pays (Brésil, Argentine, Uruguay, Indonésie, Philippines, Turquie…) ont remboursé anticipativement leur dette envers le FMI au milieu des années 2000, afin de se débarrasser de sa tutelle encombrante. L’encours des crédits du FMI s’est effondré et, au printemps 2008, l’institution a été contrainte de se séparer de 380 de ses 2634 employés et de vendre une partie de son stock d’or. Par ailleurs, l’institution est confrontée à une grave crise de légitimité et les trois derniers directeurs du FMI ont démissionné avant la fin de leur mandat.

    Le FMI et la crise

    Suite au G20 de Londres du 2 avril 2009, le FMI a vu ses ressources tripler afin qu’il puisse multiplier ses prêts tous azimuts. Partout les conditions sont sévères : réduction ou gel des salaires de la fonction publique, réduction des pensions de retraite, privatisations des entreprises publiques, etc.

    Une dizaine de pays d’Europe de l’Est ont ouvert une ligne de crédit avec le FMI en moins d’un an, une délégation du Fonds est attendue en Ukraine à la fin du mois de mars. Si la Lettonie veut continuer à recevoir les financements du FMI et de l’Union européenne, elle doit décider une réduction de 20% des salaires des fonctionnaires et de 10% des pensions de retraite. Ces politiques suscitent des réactions de la population qui descend dans la rue : grève générales se succèdent en Grèce, manifestations d’enseignants en Lettonie, de fonctionnaires en Roumanie, plus de 90 % des Islandais refusent par référendum de rembourser une dette jugée illégale...

    John Lipsky, n°2 du FMI et ancien haut responsable de la banque JP Morgan, a prévenu les pays développés qu’ils doivent préparer leurs opinions publiques aux mesures d’austérité à venir, comme la baisse des allocations santé et retraite |2|. Si les peuples ne s’opposent pas farouchement et immédiatement aux exigences du FMI et des gouvernements du Nord au service des marchés financiers, d’importantes régressions sociales auront lieu et il est urgent de les empêcher.

    Notes

    |1| Lire Damien Millet et Eric Toussaint, 60 Questions 60 Réponses sur la dette, le FMI et la Banque mondiale, CADTM-Syllepse, 2008.

     

     

    |2| Reuters, 21 mars 2010.

    Source CADTM


    votre commentaire